DEUX FLICS À ABATTRE
Uomini si nasce poliziotti si muore– Italie – 1976
Support : Bluray & DVD
Genre : Policier, Action
Réalisateur : Ruggero Deodato
Acteurs : Marc Porel, Ray Lovelock, Adolfo Celi, Franco Citti, Silvia Dionisio, Marino Masé
Musique : Ubaldo Continiello
Image : 1.85 16/9
Son : Italien et anglais DTS HD Master Audio 2.0
Sous-titres : Français
Durée : 97 minutes
Éditeur : Eléphant Films
Date de sortie : 22 août 2023
LE PITCH
Alfredo et Antonio luttent contre le crime au sein d’une unité spéciale très particulière, au-dessus de toutes institutions et lois. Ils opèrent dans l’arrogance la plus totale, mais quand ils doivent traquer Roberto Pasquini, un membre éminent du milieu, les choses se compliquent sérieusement…
Mais qui n’ont jamais peur de rien
Gros succès populaire en Italie à sa sortie malgré la concurrence imposante du fameux Flic en jean de Corbucci et avec Thomas Milian, Deux flics à abattre reste malgré sa réussite le seul et unique poliziottesco de Rugerro Deodato, futur metteur en scène d’un certain Cannibal Holocaust.
Ancien assistant de Rosselini (Viva L’italia) de Sergio Corbucci (Django) ou Anthonio Margheriti (Danse macabre), Deodato n’avait pas vraiment réussi à s’imposer comme réalisateur de premiers plans. Une aventure en pagne avec Gungala la pantera nuda, un western comédie avec I quattro del pater noster et un film de cape et d’épée polisson avec Zenabel, n’ont pas vraiment permis d’imposer un style remarquable ou mémorable. Un artisan besogneux comme beaucoup d’autres qui va alors faire une pause du coté de la télévision et de la publicité. Ce n’est qu’en 1975 qu’il revient finalement au grand écran avec le giallo sexy Ondata di piacere tout d’abord, puis surtout avec ce Deux flics à abattre, alias Uomini si nasce poliziotti si muore (« né comme un homme, mort comme un flic ») qui bien entendu s’engouffre dans l’un des genres les plus populaires et les plus prolifiques de cette décennie ; le poliziottesco. Et quelle meilleure manière de le faire qu’à partir d’un scénario de l’un des maitres du genre, Fernando Di Leo (Milan Calibre 9, Le Boss, Colère noire…). On y reconnait effectivement l’atmosphère solide, la vision âpre de la réalité du monde criminelle, la violence explosive, la fascination pour l’action musclée, mais aussi un certain mélange des genres, entre thriller sec et comédie de mœurs, que Deodato va clairement accentuer en relevant le cocktail jusqu’à des niveaux parfois assez déstabilisants.
Deux flics ami-ami
Di Leo avait imaginé un duo de flic couillus et homosexuels, Deodato préfère les transformer en authentique playboy, charmants voyous qui draguent sans vergogne la secrétaire du chef, sautent tout ce qui bougent et partagent aisément une jeune nymphomane… qui s’avère être la petite sœur du mafieux qu’ils poursuivent. Toujours porté sur la chose et la nudité gratuite, Deodato en profite pour nous offrir les visions des charmantes plastiques de Silvia Dionisio (Terreur express) et de sa sœur Sofia (Mon cher assassin), mais ne réussit pas totalement à faire oublier cette étrange promiscuité entre les deux protagonistes, désormais trop séducteurs et grandes gueules pour être honnêtes. Ce qui est sur cependant, c’est que malgré leur apparence de Starsky et Hutch ritals, les deux excellents acteurs de série B, Marc Porel (La Longue nuit de l’exorcisme, Big Guns, Un Parfum d’amour…) et Ray Lovelock (Bandits à Milan, Le Massacre des morts-vivants, La Dernière maison sur la plage…) incarnent des flics qui sont définitivement passés de l’autre coté de la barrière, n’hésitant pas à achever froidement un jeune délinquant qu’ils poursuivaient, à mettre en danger une pauvre otage, à canarder le moindre truand qui passe ou à cramer la collection de voitures de leur ennemis Roberto Pasquini, puis à le faire exploser dans son bateau de plaisance. Des vigilantes comme le neo-polar italien en avaient des tas mais qui détonnent autant par leur absence de moustache et de sur-virilité affirmée, que par leur décontraction constante, leur légèreté, comme si tout cela n’était qu’un jeu un peu sadique… Voir un jeu d’enfant devenu mortel comme le montre leur entrainement plus que dangereux dans un terrain vague. Une moralité assez trouble et une vision de la justice plus que douteuse dont la violence déjà bien présente à l’écran, aurait dû se montrer plus virulente encore (avec entre autres une énucléation plein cadre) si le film n’avait pas été charcuté d’une dizaine de minutes par la censure.
Pas étonnant que le film ait servi de carte de visite à Ruggero Deodato pour sa première entrée dans le genre qui va le rendre célèbre avec Le Dernier monde cannibale. Parfois taxé de réalisateur dilettante, en tout cas très inconstant et inégal, il signe d’ailleurs ici l’un de ses métrages le plus efficaces et les mieux rythmés avec quelques morceaux de bravoure très appréciables à commencer par cette spectaculaire et longue poursuite de huit minutes en moto dans les rues de Rome en mode tournage sauvage. Une belle entrée en matière pour un poliziesco un peu bordélique, roublard et populiste mais qui s’avère indéniablement divertissant.
Image
Le film n’affiche pas forcément une copie de dernière bourre mais assure en tout cas un résultat plutôt solide. L’image a été plutôt bien restaurée avec des cadres stables et très propres malgré la persistance de quelques points blancs, et une gestion assez généreuse du grain d’origine qui réussit à ne jamais devenir envahissant. La définition pourrait être plus poussée avec un nouveau scan 2K, mais l’ensemble affirme une esthétique réaliste grisonnante agréable et solide.
Son
Pas de doublage français ici, seules les pistes postsynchronisées italienne et anglaise sont présentées dans des DTS HD Master Audio 2.0 aussi sobres que clairs. On préfèrera aisément la version originale ritale mieux caractérisée et plus équilibrée que son homologue ricaine trop désincarnée, voir parfois carrément à coté de la plaque.
Interactivité
Troisième titre de la collection « Les Années de plomb » par Elephant Films, Deux flics à abattre partage le même livret que Colère noire et Mister Scarface. Un petit cahier d’une vingtaine de pages rédigé par Alain Petit qui présente sommairement mais efficacement les trois films en question en faisant quelques petits détours vers les carrières de chacun.
Sur le disque proprement dit, on trouve aussi une nouvelle présentation du duo Gérald Duchaussoy et Romain Vandestichele (auteurs de Mario Bava Le Magicien des couleurs) qui reviennent bien entendu sur la rencontre artistique entre Fernando Di Leo et Ruggero Deodato, sur les belles heures du neo-polar italien et évoquent autant les qualités que les défauts du produit. La bonne surprise ici vient de la reprise par l’éditeur français du long documentaire plus que complet « Violent Cops », making of rétrospectif en SD mais passionnant, qui donne la parole autant au réalisateur qu’aux acteurs survivants et aux techniciens un peu moins célèbres pour retracer les origines du film, les changements autour du scénario, la collaboration entre les deux têtes d’affiches, petites prises de bec du tournage (autour de la fameuse poursuite en moto justement), la censure et la sortie du film. L’édition reprend aussi une sélection de pubs tournées par Deodato et commentées par ce dernier, qui montrent toutes en général l’ambition de construire des petits courts métrages plutôt ambitieux vu le cadre.
Liste des bonus
Un livret rédigé par Alain Petit (24 pages), Le film par Gérald Duchaussoy et Romain Vandestichele (21’), « Violent Cops » : documentaire (40’), Ruggero Deodato : ses publicités commentées (19’), Bande-annonce.