DÉFENSE DE SAVOIR
France, Italie – 1973
Support : Bluray
Genre : Policier, thriller
Réalisateur : Nadine Trintignant
Acteurs : Jean-Louis Trintignant, Michel Bouquet, Charles Denner, Juliet Berto, Bernadette Lafont, Claude Piéplu, Marie Trintignant, Serge Marquand…
Musique : Bruno Nicolai
Durée : 100 minutes
Image : 1.66 16/9
Son : Français DTS HD Master Audio 1.0
Sous-titres : Français pour sourds et malentendants
Éditeur : Studio Canal
Date de sortie : 14 septembre 2022
LE PITCH
Une prostituée est accusée d’un crime. L’enquête révèle peu à peu de nombreuses implications politiques. Maître Laubret, l’avocat commis d’office à sa défense, met tout en œuvre pour faire éclater la vérité.
Politique fiction
Longtemps oublié, quasi invisible et inédit en vidéo, le quatrième film de Nadine Trintignant Défense de savoir a enfin droit à son édition Blu-Ray grâce à l’initiative de la collection « Nos années 70 » de Studio Canal. L’occasion de (re)découvrir un thriller politique bien ancré dans son époque et porté par un casting de qualité.
« Le monde entier est une scène, hommes et femmes, tous, n’y sont que des acteurs, chacun fait ses entrées, chacun fait ses sorties, et notre vie durant, nous jouons plusieurs rôles. » C’est par cette citation de William Shakespeare que s’ouvre Défense de savoir, première incursion de Nadine Marquand Trintignant dans le genre du thriller. Et à l’image de la dernière séquence, une conférence de presse spectaculaire, le film interroge en effet le spectateur sur les notions de vérité, de duplicité voire de manipulation, venant notamment du monde politique.
Dans le registre du film politique des années 1970, il est évident que ce long-métrage fait un peu pâle figure face aux autres œuvres francophones de l’époque signées Yves Boisset, Costa-Gavras ou Claude Chabrol par exemple. C’est d’ailleurs à ce dernier qu’on pensera particulièrement face à la description d’une bourgeoisie provinciale lâche et hypocrite, se croyant tout permis quitte à jouer avec la vérité.
Malgré un scénario intelligent signé Alain Corneau, futur mari de la réalisatrice, l’action est assez laborieuse et la mise en scène s’avère assez banale. Toutefois, on notera une construction réussie du film en flashbacks, nous dévoilant peu à peu les enjeux d’une sombre affaire mêlant meurtres et collage d’affiches électorales. Ainsi qu’une dernière partie de qualité dominée par le duel entre Trintignant et Bouquet, tous deux impériaux, lors d’une interview dantesque où l’art de la manipulation culmine à son sommet.
Affaires de famille
Pas toujours passionnant certes, Défense de savoir vaut tout de même le coup d’œil ne serait-ce que pour admirer les performances d’acteurs incontournables de cette décennie. Comme à son habitude, Charles Denner excelle en personnage fiévreux et parano, véritable détonateur d’une affaire qui ne laissera pas de marbre Michel Bouquet en patriarche souhaitant protéger sa famille… autant que sa carrière politique. Habitué à jouer les rôles d’homme de pouvoir cyniques, il retrouvera d’ailleurs Alain Corneau, ici au scénario, pour le premier film de celui-ci l’année d’après avec France société anonyme.
Si le film se développe sur l’histoire de la famille du futur député Cristiani, il est aussi en lui-même une véritable réunion de la famille Marquand-Trintignant ! D’abord dévolu à Sami Frey, le personnage de l’avocat revient à un Jean-Louis Trintignant toujours aussi à l’aise pour interpréter un personnage singulier (il est commis d’office à plus de quarante ans), presque inquiétant. Il donne ici la réplique à sa propre fille Marie qui étonne déjà par sa maîtrise dans un second rôle central toutefois. Enfin, Serge Marquand, frère de Nadine, vient compléter ce casting familial au sein duquel on retrouve aussi les excellents Juliet Berto, Bernadette Lafont ou encore Claude Piéplu.
Enfin, après avoir signé la B.O. d’Une journée bien remplie, premier film de Jean-Louis Trintignant, le compositeur italien Bruno Nicolai est aussi de la partie. Surtout connu pour ses collaborations avec Ennio Morricone en tant que chef d’orchestre, il délivre ici une belle composition entêtante et rythmée. Peut-être même un peu trop tant le propos et l’action du film semblent en deçà du lyrisme de la musique.
Sans être un incontournable des années 1970, Défense de savoir demeure un film intéressant, révélateur d’une certaine vision de l‘époque sur les élites et la politique notamment, qui méritait de sortir de l’oubli dans lequel il végétait.
Image
Bien que la photographie du film soit assez terne, la restauration 4K réalisée en 2018 accomplit son travail. La définition est impeccable, les cadres sont stables et propres et on appréciera particulièrement le grain argentique bien présent.
Son
On en prend plein les oreilles avec la somptueuse mélodie de Nicolai ! On remarquera toutefois quelques écarts du niveau sonore, avec des dialogues parfois feutrés et une musique au contraire surexposée.
Interactivité
Saluons l’initiative de Jérôme Wybon, pilote de la collection, de ressortir ces films oubliés, parfois inédits en vidéo comme ici. Durant sa présentation du film, le documentariste nous rappelle quelques éléments sur la réalisatrice, qui avait notamment participé au montage du Petit soldat de Godard et qui avant Défense de savoir traitait surtout de sujets autobiographiques, comme le déchirant Ça n’arrive qu’aux autres.
On découvre aussi avec plaisir quelques scènes coupées, ou non retenues, comme une impro entre Jean-louis et sa fille, ainsi qu’une drôle de séquence où Lafont, après avoir été traitée de « nymphomane » jette un plat de spaghetti sur la tête de Serge Marquand !
Enfin, on retrouve un document d’époque avec images du tournage et interventions de la réalisatrice et des acteurs. Jean-Louis Trintignant s’interdit « d’avoir un avis sur la mise en scène. » et loue le talent de sa fille : « Qu’est-ce qu’elle joue bien ! C’est la plus douée, moi c’est à force de travail que je suis devenu un acteur acceptable. »
Liste des bonus
Préface de Jérôme Wybon (4’), Reportage sur le tournage (11’), Scènes coupées (7’).