DANS LA SOURICIÈRE

The Trap – Etats-Unis – 1959
Support : Bluray & DVD
Genre : Thriller
Réalisateur : Norman Panama
Acteurs : Richard Widmark, Lee J. Cobb, Tina Louise, Earl Holliman…
Musique : Divers
Durée : 84 minutes
Image : 1.78 16/9
Son : Anglais et français DTS HD Master Audio 2.0 mono
Sous-titres : Français
Editeur : Rimini Editions
Date de sortie : 20 janvier 2021
LE PITCH
Ralph Anderson, avocat aisé, revient dans la petite ville où il est né, et dont son père est le shérif. Les retrouvailles se passent bien, jusqu’à l’arrivée d’une bande de gangsters.
Back to the Roots
Tourné au déclin des grands films noirs dont la puissance fut considérablement amoindrie par la généralisation de la couleur et l’essoufflement du genre, The Trap offre à Richard Widmark un voyage vers ses racines, et un véritable saut dans le temps, à destination d’un ouest sauvage lui aussi en voie de disparition.
Petite production distribuée par Paramount à la toute fin des années 50, The Trap a ces petits airs immédiatement attachants du film en forme d’anomalie, étrange écho de deux genres purement hollywoodiens, le film noir et le western, qui ne vont cesser justement d’être vampirisés et malmenés dans la décennie suivante. D’autant plus étonnant que ce croisement soit à l’initiative du réalisateur Norman Panama, yes-man de service surtout spécialisé dans les grands mélos et les comédies légères (Le Grand secret, Un grain de folie, Astronautes malgré eux) venant titiller les derniers succès du box-office. Si on repère ici une grande proximité avec des œuvres comme Les Inconnus dans la ville ou Un Homme est passé, The Trap (laissons de côté le titre français voulez-vous) ne s’inscrit pourtant dans aucune vague, dans aucune mouvance, dans aucune facilité. Si la mise en scène proprement dite, cadrages et mouvements de caméra, ne resteront pas dans les annales, il y a cependant une tension exponentielle qui nourrit cet étrange thriller démarrant comme de banales retrouvailles familiales lorsque le fils honnis tente de faire amende honorable auprès de sa famille délaissée, pour s’achever avec la rage d’un survival chauffé à blanc par le désert. Sans une once de gras, le film avance inexorablement, faisant sien les multiples pertes d’équilibre et les débordements de plus en plus évidents d’un genre à l’autre.
Cactus généalogique
Car du mélodrame il y a en a certainement, dans ce face à face entre un Widmark impeccable et son père (shérif bien entendu) rancunier tout d’abord puis face à son frère (adjoint cela va de soi), moins charismatique et jaloux de l’admiration que lui porte sa femme, ancien amour incarné par la sculptural Tina Louise (Le Petit arpent du Bon dieu, La Chevauchée des Bannis, Sapho) à la sensualité presque réservée d’une femme au foyer prête à retrouver sa liberté. Un trio de grand drame familial, surtout là finalement pour impulser plus d’implications encore du spectateur dans une montée en pression admirablement gérée. L’ennemi ici n’est ni plus ni moins que le narquois Lee J. Cobb (spécialiste des personnages odieux comme dans 12 Hommes en colère), mafieux en fuite mais sans pitié, dont l’arrivée, avec ses hommes de mains, dans la petite ville de Tulsa. Un décor ressemblant autant au cadre d’un épilogue de film noir qu’à celui du départ d’un grand western à l’ancienne. Les voitures ont bien entendu remplacé les chevaux, mais le décor aride avoisinant est toujours aussi torride et implacable, et rien ne ressemble autant à un assaut à la Rio Bravo que deux frères, accompagnés de la femme qu’ils aiment et du gangster qu’il pourchasse, retranchés dans une épicerie isolée. Il lui manque forcément cette petite once de virtuosité supplémentaire, d’évidence frappante, pour s’inscrire comme un incontournable, mais ce western moderne est un divertissement qui galope à bride abattue.
Image
Le film fut diffusé lors de sa première sortie en salle américaine au format 1.96 mais aussi 1.37 sans doute pour contenter quelques réseaux de salles encore équipées des anciens écrans carrés. Si les deux cadres étaient présents sur le Bluray US d’Olive Films, Rimini a choisi de ne préserver que le plus logique, celui au format le plus large, montrant clairement un cadrage plus naturel (les captures existent sur le net et c’est flagrant). Un choix pertinent donc et un master assez impressionnant qui redonne une seconde jeunesse au film avec une superbe définition, des magnifiques reflets argentiques et des couleurs particulièrement chaudes et racées. Zéro retouche numérique disgracieuse ici, le grain de pellicule est donc préservé coûte que coûte, mais aussi les décrochages des fondus enchainés ou de quelques plans d’ensemble à la pellicule plus abîmée.
Son
Les monos d’origine sont retranscrits ici avec des DTS HD Master Audio 2.0 plutôt propres, stables et efficaces. Le doublage français est assez réussi même si comme toujours l’opération écrase un peu le mix. La version originale est nettement plus naturelle mais on note quelques décalages verbaux sur certaines scènes en extérieur ce qui indiquerait quelques post-synchronisations. L’autre particularité du film est d’avoir une bande originale luxueuse composée par Bernard Herrmann, Alex North, Miklox Rozsa, Franz Waxman ou Victor Young (entre autres) … Tout simplement en piquant directement des extraits de leurs compositions pour d’autres films.
Interactivité
Zéro supplément sur l’édition américaine, Rimini choisit alors d’invoquer l’historien du cinéma Laurent Aknin pour enregistrer une présentation du film. Un entretien dans lequel on retrace bien entendu les petites filmographies de chacun, dans lequel on replace le film dans son contexte mais aussi où on insiste beaucoup sur son image de film entre deux époques, deux genres, comme une sorte de relais avec le Hollywood des années 60. Intéressant.
Liste des bonus
Interview de Laurent Aknin, historien et critique de cinéma (19’).