CONTRE UNE POIGNÉE DE DIAMANTS
The Black Windmill – Royaume-Uni – 1974
Support : Bluray & DVD
Genre : Thriller
Réalisateur : Don Siegel
Acteurs : Michael Caine, Donald Pleasence, John Vernon, Delphine Seyrig, Janet Suzman…
Musique : Roy Budd
Durée : 106 minutes
Image : 2.35 16/9
Son : Anglais et Français DTS-HD Master Audio 2.0
Sous-titres : Français
Editeur : Éléphant Films
Date de sortie : 06 juillet 2021
LE PITCH
Le fils d’un agent du contre-espionnage britannique est enlevé. Envers et contre sa hiérarchie, celui ci va alors tout faire pour le retrouver.
Faux semblants
S’ils démarrèrent, chacun à leur manière, leur carrière dans les années 40, il fallut attendre les années 70 pour que Don Siegel et Michael Caine travaillent enfin ensemble. Le réalisateur américain, auréolé de son récent Dirty Harry, et l’acteur anglais, déjà en tête d’affiche de nombreuses productions d’importance (la trilogie Harry Palmer notamment), s’unirent alors pour donner au genre espionnage un nouveau spécimen encore jamais vu. Un drôle de mélange où se croisent plusieurs genres et qu’Éléphant Films rappelle à nos mémoires. Et c’est tant mieux.
Contre une Poignée de Diamants commence donc au son de chant d’enfants, alors que le titre et le cast apparaissent à l’écran sous la forme de cubes de bois colorés. Plusieurs photos nous montrent alors deux écoliers jouant dans la campagne avant de s’arrêter, avec un modèle réduit d’avion, sur une base désaffectée de l’armée. Un écriteau demande expressément de ne pas pénétrer dans les lieux, mais les deux camarades, qui viennent de faire le mur de leur école pour tester leur jouet, n’y prêtent pas attention. Une jeep arrive alors à leur niveau, deux militaires les jettent à l’intérieur sans ménagement et les mènent à leur supérieur (le patibulaire John Vernon, que Siegel a pris dans sa valise après Dirty Harry) qui va ordonner leur enlèvement. Une fois les deux gosses assommés pour le compte, les militaires enlèvent leur uniforme et dévoilent des vêtements civils. Ellipse. Un gentleman dans un impeccable costume bleu (Michael Caine) frappe à une porte et entreprend une conversation avec une femme (l’excellente Delphine Seyrig) qui était sensée être militaire dans la scène précédente. Lui semble sortir de prison, elle avoir besoin de lui pour un travail illégal dans lequel il est question de diamants. L’homme une fois reparti, la femme rejoint son complice (le gradé vu précédemment) qui, dissimulé dans la pièce, a pris leur conversation en photos.
A ce moment du film, un nombre impressionnant de faux semblants à déjà perdu le spectateur. Ces militaires n’en sont vraisemblablement pas. Ce gentleman ne sort pas non plus de prison mais est un espion. Quant aux enfants enlevés, on va bientôt apprendre que l’un des deux est son fils et qu’il va servir de monnaie d’échange pour des membres de l’IRA voulant mettre la main sur des diamants détenus par une agence de contre-espionnage.
L’amour d’un père
Contre une Poignée de Diamants est l’adaptation du roman Seven Days to a Killing de l’écrivain anglais Clive Egleton. Si la trame principale reste la même dans les grandes lignes (les Russes du roman étant ici remplacés par l’IRA), Don Siegel et surtout le scénariste Leigh Vance (qui a surtout oeuvré pour la télévision) vont lui appliquer un traitement inhabituel dans ce genre de productions. A commencer par son introduction pleine de faux semblants qui perd d’emblée le spectateur (qui vaudra une partie de son échec au film). Ensuite, au travers du personnage du toujours excellent Donald Pleasence ; soit le responsable d’une agence de contre-espionnage sensé diriger son équipe d’une main de maître mais qui cumule les approximations et les défaillances. Ainsi, en pleine réunion, il confond le nom d’un protagoniste avec celui de l’acteur Sean Connery (autant dire James Bond), suscitant l’hilarité de ses collaborateurs ; perd son sang froid tel un gamin découvrant un fabuleux jouet durant une scène où une mallette piégée est présentée au héros (une scène évoquant évidemment là aussi 007). Un personnage fantasque donc, à l’opposé des bureaucrates sérieux et déterminés habituels et qui va bien évidemment représenter un obstacle majeur pour le personnage de Caine dès qu’il apprend que la vie de son fils est en jeu.
Tout va alors tourner autour du personnage de Michael Caine, encore une fois parfait dans le rôle de cet agent taiseux, qui va devoir composer entre ses devoirs professionnels et privés. Sa femme (la très sobre Janet Suzman), de laquelle il est récemment séparé, lui reprochant son air détaché, son manque d’humanité, face à la situation. Comme si la vie de son fils lui importait peu. Ce qui est tout le contraire, la caméra de Siegel ne ratant jamais une occasion de le montrer via des photos de l’enfant se trouvant dans tous les lieux où agit l’espion (son bureau, son appartement). Jusqu’à ce que, persuadé que sa hiérarchie ne fera rien pour sauver son fils, il décide de prendre lui-même les rênes, suive les coupables jusqu’en France (une énième rupture de ton dans la narration) avant un final d’une violence brute à coup de duel au fusil mitrailleur au sein d’un moulin à vent (celui du titre original).
Au final, Contre une poignée de Diamants ne ressemble véritablement à aucun autre film d’espionnage de l’époque. En est-il d’ailleurs un ? Car le fond de son histoire mis à part, il cumule tellement de ruptures de ton, entre humour, faux-semblants, romance et violence sanglante (tout cela autour de l’enlèvement d’un enfant, torturé certes hors champs mais tout de même) qu’il fait finalement surtout parti de ces films inclassables qui furent de copieux échecs à leur sortie à cause justement de cette identité mal définie. Mais qu’importe ! Car à part sa fin trop abrupte (on aurait aimé une happy end un peu plus formelle) Contre une Poignée de Diamants est un authentique petit grand film à découvrir tout séance tenante.
Image
Une très belle restauration, notamment au niveau des couleurs, entre teintes très crues et très douces. Très 70’s en somme. Le bleu azur du costume de Michael Caine dans l’introduction est un délice pour l’oeil. De très beaux contrastes et des noirs excessivement profonds, notamment lors du final. Face à toutes ses qualités, les quelques défauts de la pellicule qui n’ont pas pu être éliminés sont des détails finalement sans grande importance.
Son
Une unique piste vo, mono d’origine, qui malgré un manque évident de relief profite elle aussi d’une belle restauration. Les voix sont claires (ah l’accent anglais!) et la bande son n’est pas en reste.
Interactivité
Deux entretiens de quelques minutes autour du film. Le premier par Eddy Moine, qui comme toujours a bien préparé sa copie et regorge d’informations et d’anecdotes. On lui préférera toutefois celui d’Olivier Père (responsable du cinéma sur Arte) qui comme toujours dispense sa passion avec beaucoup plus de naturel. Une bande annonce d’époque est-elle aussi disponible dans la section bonus.
Liste des bonus
Le film par Eddy Moine (10’07), Le film par Olivier Père (24’38), bande annonce d’époque (2’15).