CONTES CRUELS DU BUSHIDO
武士道残酷物語– Japon – 1963
Support : Bluray
Genre : Drame Historique
Réalisateur : Tadashi Imai
Acteurs : Kinnosuke Nakamura, Ineko Arima, Satomi Oka
Musique : Toshiro Mayuzumi
Durée : 123 minutes
Image : 2:35 16/9
Son : Japonais DTS-HD Master Audio 3.0 et 1.0
Sous-titres : Français
Éditeur : Carlotta Films
Date de sortie : 20 septembre 2022
LE PITCH
Iikura se rend en urgence à l’hôpital, au chevet de sa fiancée qui vient de faire une tentative de suicide. En rentrant chez lui, il découvre les écrits de ses ancêtres samouraïs, détaillant les atrocités endurées par eux depuis le XVIIe siècle au nom du code d’honneur du bushido. Cette caste de la noblesse militaire accomplissait des actes de violence sur ordre des seigneurs féodaux, mais ils souffraient encore plus de leur cruauté, souvent contraints au suicide rituel…
Seppuku
Dans la droite lignée d’un Hara-Kiri sorti l’année précédente, Contes Cruels du Bushido propose lui aussi une vision démystificatrice, dénué de tout glorification du fameux code d’honneur des samouraïs et des injustices et absurdités qu’il a pu engendrer. Mais le film de Tadashi Imai pousse la réflexion plus loin en nous faisant traverser les époques pour voir son évolution.
Le cinéaste n’ayant jamais caché ses orientations politiques très (très) à gauche dans ses précédents films, qui épousaient le point de vue des petites gens aux prises avec un système qui les broyait, il était évident que son Contes Cruels du Bushido n’allait pas nous montrer ce code d’honneur sous le prisme du romantisme et du nationalisme. Comme pour le western à la même époque, le Jidaï Geki (film historique Japonais) connait une métamorphose et une remise en question de ses fondements dans les années 60 et Tadashi Imai propose une fresque s’étalant sur plus de 300 ans à travers plusieurs générations d’hommes d’une même famille, qui vont tous se retrouver face à l’absurdité de ce code d’honneur, et leurs rapports face aux puissants qui en disposent. Pour finir dans l’époque contemporaine du film (les années 60) et témoigner que cette aliénation à un système médiéval à changé de visage mais n’a jamais disparu. Un lien thématique mais aussi visuel puisque tous les personnages au fil du temps seront interprétés par le même acteur, Kinnosuke Nakamura.
Bushido Atlas
Ce n’est pas innocent si la première histoire qui nous est racontée se passe juste après le début de l’ère Tokugawa (en 1600), qui est le moment où le Japon, unifié après de nombreuses décennies de guerre civile, a coupé tout contact avec le monde extérieur et s’est refermé sur lui-même. Une période où le fossé entre la pauvreté et la richesse devient de plus en plus extrême et où les anciens combattants se retrouvent au service de seigneurs à qui ils ne restent qu’a consolider leurs territoires. Ce sera le cas de l’ancêtre du personnage principal, qui après avoir réprimé la révolte de Shimabara, qui a vu les chrétiens Japonais être persécutés et chassés, scelle le destin de sa famille en suivant aveuglement son seigneur à cause des enseignements du bushido. Un aveuglement qui sera au centre de l’histoire de son descendant, qui raconte la stupidité du rituel du Sepukku (Hara-Kiri) suite à la mort d’un seigneur. Une mort qui en entrainait plusieurs dizaines à sa suite, et qui laissait des territoires (et des familles) exsangues.
Cette soumission morale qui devient physique prend une autre forme dans l’histoire suivante, qui décrit les abus sexuels que subit un des descendants par son seigneur et qui aboutira là aussi à une punition cruelle, laissé hors-champs mais illustrée par un mouvement de caméra brutal tout aussi violent.
Toutes les histoires suivantes vont suivre ce pattern de dominant/dominé avec des durées différentes suivant la présence symbolique de cette figure d’autorité. Celle se passant durant la Seconde Guerre Mondiale sera la plus courte (seulement une scène) puisqu’elle nous montre le dernier verre de pilotes kamikazes juste avant leur décollage. Pas plus de développement que ça, puisque c’est l’histoire la plus récente, mis à part celle contemporaine de l’intro et de la fin du film, et que dans ce contexte, c’est le pays lui-même qui fait office de seigneur et les sacrifices deviennent encore plus anonymes et mécaniques, comme le montre les questions toutes faites que pose le commandant à ses hommes pour les rassurer avant leur mort. Si cette sensation de fatalité fonctionne aussi bien à la vision, c’est aussi grâce au choix d’avoir fait interpréter les sept membres de cette lignée par le même acteur. Kinnosuke Nakamura offre une formidable performance passant du guerrier redoutable, au servant docile, du vieil au jeune homme, ce même visage symbole d’une histoire condamnée à se répéter.
Passionnante fresque historique et intimiste et vrai cri de colère de son réalisateur, Contes Cruels du Bushido garde encore de nos jours, toute sa force et son efficacité, preuve que comme l’explique le film, les rapports de pouvoir et de domination entre classes sociales sont des histoires anciennes mais toujours actuelles.
Image
La restauration 4K dont le film a bénéficié l’année dernière, et qui est proposé dans ce blu-ray, fait des merveilles. Le piqué de l’image sublime la très belle photographie, les cadres sont d’une netteté inattendue et tout le procédé préserve avec ferveur les matières et le grain de la pellicule.
Son
Le blu-ray propose deux pistes audios pour le film, la version mono d’origine et un nouveau mixage 3.0 DTS-HD. Un mixage qui propose un très bon rendu avec des voix très claires et les ambiances et différentes époques qui sont toutes très bien retranscrites.
Interactivité
Le professeur Futoshi Koga, historien du cinéma à l’université de Tokyo, dresse le portrait du réalisateur Tadashi Imai, sa place dans le cinéma japonais entre deux générations très marquées de cinéastes et ses choix politiques qui l’ont amené à se tourner vers les histoires sociales et les petites gens. Il revient ensuite sur Contes Cruels du Bushido en abordant sa structure scénaristique et un rapide portrait de son scénariste et de l’acteur principal, Kinnosuke Nakamura.
Liste des bonus
Tadashi Imai, le cinéaste du côté des faibles (12’).