CONTES CRUELS DE LA JEUNESSE
青春残酷物語 – Japon – 1960
Support : Bluray
Genre : Drame
Réalisateur : Nagisa Oshima
Acteurs : Yusuke Kawazu, Miyuki Kuwano, Yoshiko Kuga, Fumio Watanabe…
Musique : Riichiro Manabe
Durée : 97 minutes
Image : 2.35 16/9
Son : Japonais DTS HD Master Audio 1.0
Sous-titres : Français
Editeur : Carlotta Films
Date de sortie : 28 juillet 2021
LE PITCH
Makoto use de son charme pour se faire raccompagne chez elle par des quadragénaires lors de ses sorties nocturnes. Lorsqu’un soir, l’un d’entre eux tente de la ramener de force à son hôtel, l’arrivée de Kiyoshi, un étudiant délinquant, lui permet d’échapper au pire. Désormais attachés l’un à l’autre, Makoto et Kiyoshi entament une relation amoureuse ambiguë et troublée par les excès de violence de ce dernier…
Une fureur de vivre
Seconde réalisation de Nagisa Oshima (L’Empire des sens, Furyo) et véritable manifeste de cette dissonante « nouvelle vague japonaise », Contes cruels de la jeunesse donne la voie à une génération qui vient se fracasser sur un avenir verrouillé et condamné.
Longtemps inédit en France, Contes cruels de la jeunesse fut produit à une époque où en France le cinéma japonais ne s’exportait encore que sous la forme des grandes œuvres de Kurosawa ou Mizoguchi, assez lointaines forcément aux remises en question de notre fameuse Nouvelle Vague locale. Pourtant au Japon la nouvelle génération d’auteurs et cinéastes était finalement travaillée par les mêmes énergies et des revendications équivalentes. A ce titre Contes cruels de la jeunesse en est un fougueux témoignage, décrivant dans un arrière-plan chaotique et tiraillé, une société marquée par les manifestations étudiantes, l’antimilitarisme et le rejet de l’occupant américain, mais aussi d’un réveil économique déjà inégalitaire qui ne vient que confirmer le patriarcat et les disparités traditionnelles. Que restes-t-il alors à la jeunesse des années 60 ? Nagisa Oshima répond par un fatalisme brutal transformant ce qui aurait pu être une bluette étudiante, en passion enflammée, en relation masochiste (comme souvent chez Oshima) où le jeune couple se transforme en délinquants piégeant les vieux pervers et les rackettant violemment.
L’Appât
Rien de mieux à faire, pas d’autres moyens de survivre, pour ces gosses fiévreux de toute façon écrasés sous le poids de la morale moribonde et cynique, l’injustice des convenances et un nihilisme noir qui traverse chaque plan. D’une certaine manière Makoto et Kiyushi sont déjà vendus, prostitués (métaphoriquement et réellement) à la génération de leurs pères, et leur romance compliquée mais sincère, est vouée à la tragédie ou au dénie comme viennent le rappeler les regrets de la grande sœur Yuki et son ancien amant, petit docteur de quartier, désormais tristement esseulés. A l’instar du chef d’œuvre de Nicholas Ray, La Fureur de vivre, dont il est un authentique écho, Contes cruels de la jeunesse brûle en cinémascope d’une fureur incandescente à la photographie ardente. Mais le grand format, se mêle à des innovations perturbatrices, capturant l’énergie nocturne des rues tokyoïtes en caméra portée, multipliant les faux raccords et les ruptures, mêlant aux teintes saturées un jeu détonnant autours des très gros plans décadrés. En naît une atmosphère particulièrement lourde, une sensation constante d’empêchement qui se resserre inéluctablement sur les deux jeunes gens.
Accepter le compromis, la bienséance, l’intégration dans la société, ou s’engouffrer jusqu’à la mort dans ses désirs et sa fougue, les dernières minutes de Contes cruels de la jeunesse sonnent le glas d’un choix impossible.
Image
Restauré en 2014 par une équipe japonaise, Contes cruels de la jeunesse se voit désormais doté d’une somptueuse copie 4K. L’image a bien entendu été minutieusement nettoyée, débarrassée de la moindre imperfection, et les couleurs généreusement réétalonnées, offrent une nouvelle jeunesse au métrage. Couleurs chaudes et satinées, matières habilement dessinées, noirs impeccables, la définition précise et délicate accompagne comme jamais la moiteur de cet été japonais.
Son
Restauré par la même occasion, le mono d’origine gagne certainement en confort avec une restitution limpide et sobrement équilibrée. Aucune perdition et une belle énergie apportée à la bande originale sont à noter.
Interactivité
Autrefois proposé dans le coffret DVD Trilogie de la jeunesse aux cotés de Une Vie d’amour et d’espoir et L’Enterrement du Soleil, le Bluray de Contes cruels de la jeunesse en reprend l’entretien avec l’historien du cinéma Donald Richie, qui évoque directement les premières œuvres de Oshima, les spécificités de la « nouvelle vague japonaise » et la force revendicatrice aussi politique qu’esthétique du film en question. S’ajoute aussi une lecture passionnante de quelques extraits des carnets du réalisateur, dans lesquels apparaissent ses questionnements et ses ambitions autour de la gestation du film, affirmant une œuvre intégralement pensée et mûrement réfléchie.
Liste des bonus
« Le Japon sous tension » : entretien avec l’historien du cinéma Donald Richie (2008, 25’), Extraits des carnets de notes d’Oshima (15’), Bande-annonce originale.