Tourné en Floride aussi bien dans les décors naturels de Evergaldes qu’au sein du Studio Empire, Yellowneck (le titre original, mot péjoratif désignant les déserteurs sudistes durant la Guerre Civile américaine) est autant tombé dans le droit public américain que dans l’oubli… Produite par la défunte Republic Pictures, qui arrêta la production de films en 1958, cette œuvre est la première réalisée par R. John Hugh, également auteur de The Touch of flesh en 1960 et Naked in the Sun en 1957.
Ce dernier film partage d’ailleurs avec Yellowneck plusieurs points communs avec un tournage en Floride et la présence d’une tribu d’indiens peu connue dans nos contrées : les Séminoles. Peuple composé d’amérindiens autochtones ainsi que d’anciens esclaves noirs, il est entré dans la légende car il s’agit de la seule tribu jamais officiellement battue par l’armée américaine… Hormis une scène d’attaque, proche des canons du western, nous ne les verrons toutefois que très peu dans Cinq déserteurs, représentant une menace aussi constante qu’invisible sur cette troupe de renégats perdus dans ce véritable enfer vert où même la nature (tempête, sables mouvants…) et les animaux (pumas, alligators, serpents…) semblent vouloir empêcher leur échappée belle.

Soldats inconnus

Cette jungle marécageuse et inextricable sera d’ailleurs une véritable tombe pour nos soldats inconnus…En effet, force est de constater que le film autant que ses interprètes sont restés dans un anonymat plus que relatif. Hormis Lin McCarthy (Rawhide, Gunsmoke…) et Berry Kroeger (Perry Mason) qui eurent postérieurement des petits rôles à la télévision, le reste de la bande ne connut guère les honneurs. Bien que stéréotypés et caricaturaux, les personnages campés par Stephen Courtleigh (particulièrement investi en colonel défaitiste, alcoolique, dévasté par la fièvre), Harold Gordon (le trouble-fête) et Bill Mason tiennent la route et participent à l’atmosphère du jeu de massacre qui s’insinue au sein d’un film s’apparentant parfois à un huis-clos en plein air.
Le budget semble-t-il dérisoire du film, les stock-shots utilisés pour les apparitions d’animaux et l’aspect kitsch du tout ne sont malheureusement même pas rehaussés par l’utilisation du Trucolor, ancêtre du Technicolor… La qualité de la copie proposée rendant particulièrement difficile l’évaluation de ce procédé couleur ! Dénigré à l’époque pour son côté artificiel, il fut toutefois utilisé sur l’un des chefs d’œuvre du western, Johnny Guitare en 1954.

Bien que dispensable, la découverte de Cinq déserteurs ravira les cinéphiles amateurs de séries B américaines des années 1950, car malgré sa courte durée, son casting anonyme et une histoire peu originale, il impressionne par la générosité prodiguée et sa propension à aborder divers genres comme le fantastique et le film de guerre.