CETTE SACRÉE VÉRITÉ
The Awful Truth – États-Unis – 1937
Support : Bluray & DVD
Genre : Comédie
Réalisateur : Leo McCarey
Acteurs : Cary Grant, Irene Dunne, Ralph Bellamy, Alexander D’Arcy, Cecil Cunngham
Musique : Divers
Image : 1.33 16/9
Son : Anglais et français DTS HD Master Audio 2.0 mono
Sous-titres : Français
Durée : 90 minutes
Éditeur : Wild Side Video
Date de sortie : 12 juillet 2023
LE PITCH
Lorsque Jerry Warriner est obligé d’inventer un week-end en Floride pour pouvoir jouer aux cartes avec ses amis, sa femme, Lucy, passe du temps avec Armand Duvalle, son séduisant professeur de chant… D’un commun accord, les époux décident de mettre un terme à leur vie commune. Seul l’avenir de Mr. Smith, leur fox-terrier, les oppose et les déchire. Le jugement est sans appel : Lucy aura la garde du quadrupède et Jerry obtient un droit de visite.
I Love Lucy
Classique indémodable de la grande comédie américaine, Cette sacrée vérité, au-delà du duo irrésistible formé par Cary Grant et Irene Dunne, est l’affirmation des talents trop souvent négligés de Leo McCarey, véritable maitre du genre et qui signait là l’une des références absolues de la fameuse comédie du remariage.
Un sous-genre très populaire dans ces années 30/40 (mais on en trouve des traces jusqu’à aujourd’hui) entièrement basé sur la déconstruction et la reconstruction prévisible d’un couple déjà existant, par la loi ou par l’évidence cinématographique. Difficile de faire mieux en ce sens que Cette sacrée vérité, qui justement s’inscrit dans les 90 jours qui sépare un couple marié de leur divorce proclamé. Un divorce survenu uniquement pour de mauvaises raisons, par suspicions (à priori en partie fondées) d’adultères, par fiertés mal placées et par incompréhensions partagés. Bien entendu les deux parties ne peuvent réellement vivre sans l’autre et ne vont cesser de tenter de se rendre jaloux, de s’immiscer dans les nouvelles aventures de leurs ex et de provoquer de multiples quiproquos et catastrophes. Véritable génie du slapstick à qui l’on doit les meilleurs courts métrages de Laurel & Hardy (déjà un couple difficile) et le fabuleux Soupe au canard des Marx Brothers, Leo McCarey n’a absolument rien perdu de son sens visuel au passage du parlant. Là aussi tout est une question de tempo, souvent de contre-rythme (on appelle ça le slow-burn), et de gags extrêmement visuels.
Vite divorçons !
Bien entendu Cary Grant manie la chute et le ridicule comme personne, mais le cinéaste l’utilise au meilleur de ses capacités, doublant cette élasticité flegmatique d’un mélange d’élégance séductrice et de sur-expressivité. Un peu trop oubliée aujourd’hui, Irène Dunne fait tout aussi bien avec ses mimiques charmantes et espiègles, voir frivoles. Cette sacrée vérité en passe énormément donc par les regards et les expressions appuyées qui viennent souligner la drôlerie communicative des situations autant qu’explorer de manière pertinente la manière dont fonctionne (ou dysfonctionne) leur couple. McCarey laisse fer l’art visuel (comme ce repas à quatre ou les regards passent de l’un à l’autre, de l’autre à l’un), appuie l’humour de répétition et étire les situations avec brio (toutes la dernière partie qui ne repose que sur une porte qui ne ferme pas), mais jamais uniquement pour le simple effet, toujours pour décortiquer cette relation chaotique, gentiment bordélique et aristocratiquement chaotique des deux époux. Du burlesque réfléchi et réflectif qui se double de dialogues toujours pointus, bourrés d’allusions et d’ironies, où l’on reconnait autant l’impertinence du théâtre de l’époque que le sens économique idéal dont McCarey avait déjà fait preuve sur les précédents L’extravagant Mr Ruggles et Place aux jeunes.
Une sacrée réussite, vive et inspirée, impeccablement rythmée où les petits désaccords de nos chers mariés sont d’autant plus attachants que leurs deux interprètes sont constamment au diapason. Vive les remariés !
Image
On retrouve ici manifestement la même restauration que pour l’éditeur américain Criterion. Soit un nouveau master conçu à partir d’un scan 4K d’un double nitrate et de différentes sources positives (les négatifs du film sont considérés comme définitivement perdus). L’ensemble a été nettoyé de fond en comble débarrassant l’image du moindre tremblement, segments manquants ou taches et autres griffures. Le résultat est forcément admirable, pointu avec une remise en avant des matières, du grain et des argentiques. On note cependant toujours quelques fluctuations des enchainements de transition et d’autres photogrammes plus flous ou neigeux. De menus défauts à cotés du petit miracle environnant.
Son
Performance équivalente pour les deux monos en présences. Là aussi un vrai rafraichissement a été effectué avec pour la version originale une restitution étonnement claire et ferme, et pour le doublage une distance plus marquée mais un écho typique de l’époque.
Interactivité
Retour du Mediabook pour un film du patrimoine mondial chez Wild Side Video. L’objet est magnifique avec un superbe visuel de couverture et toujours le livret piqué dans la reliure avec ici un ouvrage sur les coulisses signé Frédéric Albert Lévy.
Sur le disque bluray proprement dit, on découvre aussi deux suppléments vidéos enregistrés par Charlotte Garson de l’équipe des Cahier du cinéma. Dans le premier elle prend à cœur de redonner plus de visibilité à l’œuvre de Leo McCarey en revenant sur sa carrière et son style, alors que dans le second elle se consacre directement à Cette sacrée vérité. Une analyse de sa mécanique de la comédie, de sa vision du couple et de sa construction sémantique qui souligne une fois encore la richesse du ce petit bijou de drôlerie.
Liste des bonus
Le livret inédit « Je te quitte… Moi non plus » rédigé par Frédéric Albert Lévy (50 pages), « Leo McCarey ou le timing parfait » par Charlotte Garson, rédactrice en chef adjointe des Cahiers du Cinéma (22’), « Qui gardera le chien ? » : analyse du film par Charlotte Garson (32’).