BURNING PARADISE
火燒紅蓮寺 , aka Le Temple du lotus rouge – Hong-Kong – 1994
Support : Bluray & DVD
Genre : Action, Aventure, Arts martiaux
Réalisateur : Ringo Lam
Acteurs : Willie Chi, John Ching, Carman Lee, Wong Kam Kong, John Ching Tung, Yuen Fai…
Musique : Brother Hung
Durée : 104 minutes
Image : 1.77 16/9
Son : Cantonnais et français DTS HD Master Audio 2.0
Sous-titres : Français
Éditeur : Spectrum Films
Date de sortie : 04 février 2022
LE PITCH
Le temple Shaolin a été détruit par les Mandchus de la secte du Lotus Rouge. Les moines survivants tentent de s’échapper à travers le pays. Combattant intrépide, le jeune Fong Sai- Yuk est capturé puis envoyé comme esclave dans le temple du Lotus rouge. Décidé à organiser la révolte des prisonniers, il devra d’abord échapper aux innombrables pièges de cet immense dédale dirigé par un fou sanguinaire.
Shaolin on Fire
Grand maître du polar Hard Boiled et fournisseur officiel des meilleures pelloches de Jean-Claude Van Damme, Ringo Lam n’était certainement pas le cinéaste attendu sur un kung fu pian historique comme Le Temple du lotus rouge. Pourtant l’efficacité de sa mise en scène et son esprit torturé y font des merveilles… de cruauté.
Essentiellement connu par chez nous par le biais du film en question, la légende qui entoure le terrible Temple du lotus rouge fait partie véritablement de la culture populaire chinoise. Une série de romans célèbres apparus dans les années 20 et déjà adaptée à l’écran à l’époque du muet sous la forme d’un gigantesque serial (malheureusement totalement disparu aujourd’hui) avant d’être repris en 1965 par la célèbre Shaw Brothers avec Wang Yu en tête d’affiche. Si on y ajoute la présence de la figure héroïque du bondissant Fong Sai- Yuk, lui-même en avant dans des centaines de fictions cinéma ou autre, on se retrouve ici avec une production qui s’efforce de s’engouffrer directement dans le revival du genre inauguré par la saga des Il était une fois en Chine trois ans plus tôt. Pas étonnant d’ailleurs que la Golden Harvest se soit tournée en priorité vers le réalisateur Tsui Hark, avant que celui-ci, restant producteur, les convainc d’embaucher Ringo Lam, ne refusant jamais de sortir de sa zone de confort. Sur le papier dès lors, Burning Paradise ressemble à s’y méprendre à la tonne de kung fu pian câblés et pseudo-historiques qui a envahi les écrans chinois ces quelques années-là, avec son héros fringuant à la romance facile, se lançant dans la courageuse mission de délivrer ses confrères disciples de Shaolin. Le film de 1994 reprend d’ailleurs à son compte, et très généreusement, la construction d’un temple aux airs de labyrinthe géant, lardé de pièges et de chausse-trapes en tous genres qui était déjà présent dans les films originaux.
In Hell
Un petit côté Indiana Jones et le Temple Maudit totalement assumé, souligné par les petites notes d’humour débonnaires qui émaillent le récit, une construction calquée sur la monté en niveau d’un jeu vidéo d’action, mais où l’on retrouve de manière subversive la personnalité dure et noire de Ringo Lam. Loin du clinquant d’autrefois, Le Temple du Lotus rouge se révèle un véritable château gothique, aux dangers meurtriers, aux décors dignes d’une salle des tortures particulièrement glauque que le maître des lieux à recouvert de peintures grotesques (mais splendides) dépeignant l’antichambre des enfers. Incarné par l’excellent Wong Kam-Kong (Bon Baiser de Pékin, One Arm Hero), c’est ce dernier qui est véritablement la star du film, dictateur oublié dans son tombeau, sadique pervers prostituant les femmes avant de les embaumer et les préserver dans une cave, qui se révèle un fabuleux boss de fin projetant feuilles et gouttes de peintures comme autant de projectiles perforants. Dans cette atmosphère totalement décadente et morbide, les lames tranchent véritablement les chairs, les pièges provoquent une mort sanglante, la fosse est remplie de cadavres pourrissants et ceux qui se rebellent finissent brûlés vifs. A la lisière du gore, la dureté du réel dans les polarq de Ringo Lam se transforme ici en cruauté horrifique, venant appuyer la sensation constante d’oppression et de persécution subie par les prisonniers poursuivis par la dynastie Mandchoue. Engagé contre la répression du gouvernement chinois, et comme un écho aux évènements de la place Tian’anmen, avec bien entendu la rétrocession en ligne de mire, Burning Paradise dépasse le statut d’excellent et spectaculaire divertissement martial, pour laisser un goût âpre en bouche, une sensation de fin du monde et de décrépitude.
Pas vraiment étonnant que le film ait été un four au box-office. On imagine aisément les spectateurs venus se divertir naïvement et découvrant un tel tableau eschatologique. L’année suivante The Blade de Tsui Hark viendra définitivement enfoncer le clou.
Image
Sorti l’année dernière en HD en Chine, le nouveau transfert de Burning Paradise nous parvient très rapidement grâce au travail de Spectrum Film. Pour qui se souvient de l’ancien master vidéo présenté en DVD, le visionnage peut s’apparenter à un petit choc : l’image est étonnamment propre, toujours stable, les noirs maîtrisés et aucun effet de pixellisation n’est visible sur les zones d’ombres. Un travail de restauration remarquable a été apporté au film qui délivre désormais un piqué d’excellente qualité avec des séquences extérieurs dotées d’un très joli relief et des intérieurs, sans doute plus doux, mais la plupart du temps très agréables. Quelques plans cependant laissent apparaître une utilisation poussée de logiciel réducteur de bruit et quelques effets de ralenti grossissent le grain, mais on ne va pas se laisser abattre pour ça.
Son
Bonne nouvelle pour les nostalgiques du doublage automatique, la version française proposée autrefois par HK Vidéo est de retour avec, forcément, une restitution un peu sèche et centrale, mais un rendu assez propre. La version originale cantonaise s’en sort bien mieux avec un DTS HD Master Audio 2.0 certes axés sur les avants mais assez dynamique, et aussi équilibré qu’un film chinois des 90’s puisse l’être dans la restitution des dialogues et des musiques.
Interactivité
Vingt ans après le DVD de HK vidéo, alors uniquement disponible en double programme avec le Blade of Fury de Sammo Hung, revoici Burning Paradise en Bluray. Cette édition reprend d’ailleurs la petite intervention, en SD, de Tsui Hark qui revient justement sur sa place de producteur sur le film, sa collaboration avec Ringo Lam et clarifie son impact sur celui-ci, puisque tel Spielberg sur Poltergeist, il n’était pas rare que la rumeur lui en offre la paternité.
Coté nouveauté, on retrouve bien entendu Arnaud Lanuque qui signe une nouvelle présentation des plus précises et pertinentes. Particulièrement intéressant d’ailleurs lorsqu’il remonte aux origines du récit et du personnage de Fong Sai- Yuk ou lorsqu’il évoque la teneur politique du film. Ces derniers propos sont d’ailleurs contredits par Alex Rallo dans son intervention aux airs d’analyse de séquence. Deux sons de cloche, qui peuvent être complémentaires puisque le second y voit une évocation beaucoup plus métaphysique sur l’affrontement entre la civilisation chinoise et le concept de l’individualisme. Intéressant forcément.
Liste des bonus
Présentation de Arnaud Lanuque (17′), Essai vidéo de Alex Rallo (15′), Présentation de Tsui Hark (5′).