BRISBY ET LE SECRET DE NIMH
The Secret of NIMH – Etats-Unis – 1982
Support : Bluray & DVD
Genre : Fantastique, Animation
Réalisateur : Don Bluth
Acteurs : Elizabeth Hartman, Derek Jacobi, Dom DeLuise, John Carradine, Shannen Doherty, Arthur Malet, Will Wheaton…
Musique : Jerry Goldsmith
Image : 1.85 16/9
Son : Anglais et français DTS HD Master Audio 2.0
Sous-titres : Français
Durée : 83 minutes
Editeur : Rimini Éditions
Date de sortie : 24 juillet 2024
LE PITCH
L’histoire de Madame Brisby, une gentille maman souris qui décide de remuer ciel et terre pour sauver sa famille de la charrue du fermier Fitzgibbon. En chemin, elle reçoit l’aide d’un corbeau en mal d’amour, d’une souris voisine et d’un grand hibou peureux. Malheureusement, Mme Brisby aurait besoin d’un miracle mécanique pour déplacer sa maison. Pour cela, elle doit affronter un mystérieux rat, se débarrasser d’un chat féroce et récupérer une amulette magique…
Le seigneur des rats
C’est tout simplement l’un des plus grands films d’animation des années 80. Un classique du genre mêlant spectacle familial et noirceur franche qui marquait les grands débuts de Don Bluth, auteur émancipé tout droit sorti des studio Disney et futur créateur de Fievel et le nouveau monde, Le Petit dinosaure et la vallée des merveilles ou Anastasia. Une grande aventure à hauteur de souris.
Comme beaucoup d’artistes de sa génération, Don Bluth aura été marqué par sa découverte première de Blanche Neige et les sept nains et restera fasciné toute son enfance par les prouesses du studio Disney. Mais lorsqu’il réussit enfin à y entrer, à peine âgé de 18 ans, la maison n’a plus le faste qu’elle avait et même s’il participera à La Belle au bois dormant, Merlin l’enchanteur, Robin des bois ou Les Aventures de Bernard et Bianca, ce dernier n’y trouve pas vraiment son compte et se voit d’ailleurs constamment refusé ses propres aspirations. A l’instar de Banjo le chat malicieux, joli moyen métrage produit avec quelques camarades sur leur temps libre et que Disney refusera de diffuser ou justement cette adaptation de Madame Frisby et les Rats de NIMH de Robert C. Obrien, roman jeunesse, que le patron de l’époque refusera pour sa noirceur mais aussi pour cet argument devenu aujourd’hui aussi célèbre que fallacieux : « il n’y a qu’une seule souris chez Disney ! ». Accompagné de sept amis animateurs et dessinateurs, Don Bluth claque la porte de la maison historique et fonde Don Bluth Productions avec en ligne de mire la volonté de concurrencer Disney sur son propre terrain (l’anthropomorphisme est autant une tradition qu’un pied-de-nez) mais aussi d’ouvrir une nouvelle voie avec une approche moins naïve et surtout une direction artistique à nouveau extrêmement ambitieuse.
Une grande petite souris
Produit pour 7 millions de dollar soit quasiment la moitié de Rox et Rouky sorti quelques temps plutôt, Brisby et le secret de Nimh lui tient aisément la dragée haute avec une animation extrêmement fluide, inspirée et enlevée, accompagnée de designs mémorables et de décors champêtres ou plus inquiétants particulièrement riches et fouillés. Associés à des effets de lumières, divers effets « électriques », et l’utilisation de la caméra multiplan, le film est inattaquable, mais surtout cette maitrise technique est entièrement au service d’une superbe direction artistique, composée de plans admirablement cadrés venant creuser une atmosphère sombre, parfois inquiétante, souvent crépusculaire, qui habille une histoire dotée d’une maturité presque inédite. On reconnait là sans doute l’influence d’une œuvre comme Watership Down de Martin Rosen, dans la vision d’un monde animal où le danger, la maladie, la mort et les maltraitances humaine ne sont certainement pas gommées. Il y est bien question des efforts d’une brave maman souris pour protégé l’un de ses enfants atteint de pneumonie grave, découvrant que son mari décédé était un allié d’une cité de rats hautement intelligents échappés d’un laboratoire d’expérimentation. Un voyage quasiment épique, aux accents d’Heroic Fantasy (le duel à l’épée final renvoit directement au Robin des bois avec Errol Flynn) où l’omniprésence d’une certaine violence et surtout de la mort, teinte l’ensemble d’un mysticisme unique. Des éléments « magiques » et symboliques ajoutés à l’histoire par Don Bluth qui transforment la rencontre terrifiante avec un grand hiboux en épreuve de geste, ou le vilain matou dévoreur de rongeurs en dragon (c’est son nom) biblique. A ce titre le génial compositeur Jerry Goldsmith était forcément l’homme de la situation, plongeant aussi aisément dans les accents horrifiques, dans l’intensité de l’action, que dans les instants de comédie, et assurant une orchestration vive et mélancolique qui multiplie les thèmes inoubliables, achevant de faire de Brisby un vrai petit bijou de cinéma… d’animation.
Un spectacle somptueux, un peu éprouvant parfois pour les plus jeunes, mais qui laisse des marques dans la mémoire, accompagné comme il se doit par de nombreux personnages charismatiques et hauts en couleurs, allant d’un grand sorcier rat à la Tolkien à un corbeau gaffeur (pour ne pas dire abruti) qui apporte toute la légèreté nécessaire à une histoire pas si joyeuse. Si Don Bluth signera d’autres grands films d’animation par la suite, et connaitra surtout quelques succès commerciaux plus important, celui-ci garde une place toute particulière.
Image
Brisby était déjà sorti en Bluray en 2011 directement par la MGM, mais ceux qui avaient pu le visionner se souviennent forcément d’une image particulièrement indigente, proposée sans aucun nettoyage (taches, griffures, instabilités diverses…) et un grain neigeux aussi envahissant que disgracieux. Heureusement c’est désormais Rimini Edition qui édite ce classique de l’animation et entend bien rattraper le coup. La source est nettement plus propre (quelques points blanc persistent) et surtout les cadres ont profité d’un travail considérable de restauration permettant de gommer le bruit vidéo pour faire réapparaitre tous les détails des couleurs, les finesses des contours, sans jamais gommer la texture des cellulos et des peintures. Les couleurs retrouvent leurs éclats et la finesse de leurs dégradés et les noirs gardent leur force sans tomber dans le grisâtre. Même si quelques plans sont un poil plus fluctuants ou plus doux dans leur piqué et que les génériques bavent un peu, le fossé entre les deux éditions est frappant.
Son
Rien à redire concernant les deux pistes originales proposées en DTS HD Master Audio 2.0 qui accompagnent assez sobrement mais très efficacement les ambiances du film et parfois même la puissance déployée par les musiques et les effets sonores, spectaculaires. La version originale est de très grandes qualités avec de grandes voix comme Derek Jacobi, Dom DeLuise ou John Carradine, mais le doublage ne démérite pas, loin de là.
Interactivité
Poursuivant son excellente collection dédiée à l’œuvre de Don Bluth, Rimini Editions y inclut enfin le superbe Brisby en ajoutant bien entendu les 5 cartes postales tirés du film.
Surtout il fait encore une fois nettement mieux que la MGM qui s’était contenté de balancer une petite featurette sans aucun sous-titres. Ici on retrouve une nouvelle présentation très complète de Xavier Kawa-Topor, auteur de « Le cinéma d’animation en 100 films », qui revient sur les premières années chez Disney, la scission avec le grand studio et les immenses ambitions de cette première réalisation, ses particularités techniques et esthétiques, et sa sortie en demi-teinte.
L’intervention est parfaitement complétée par le véritable making of d’époque de près d’une heure dans lequel Don Bluth prend un grand plaisir à présenter son projet naturellement mais aussi à expliquer avec un grand didactisme toutes les étapes de créations d’un film d’animation traditionnel de l’histoire proprement dite aux storyboard en passant par les premiers designs, les choix des couleurs, l’animation, la caméra multiplan… C’est passionnant et bourré d’images des couleurs ou de documents rarissimes, avec en prime un petit moment de doublage où l’on observe Dom DeLuise aider deux tous jeunes acteurs à faire leurs, quasi, premiers pas : Will Wheton et Shannen Doherty, alors âgés respectivement de 8 et 10 ans.
Liste des bonus
Interview de Xavier Kawa-Topor, spécialiste du cinéma d’animation (27’), Making of d’époque (52’), Bande-annonce (2’).