BRIGITTE LAHAIE : LES FILMS DE CULTE
Je brûle de partout, Dark Mission – France, Espagne – 1978, 1988
Support : Bluray
Genre : Action, Drame, Erotique
Réalisateur : Jess Franco
Acteurs : Christopher Lee, Brigitte Lahaie, Richard Harrison, Christopher Mitchum, Susan Hemingway
Musique : Daniel White, Luis Alborado
Image : 1.66 16/9
Son : DTS-HD Master Audio 2.0 Français + Anglais et allemand (uniquement sur Dark Mission)
Sous-titres : Anglais
Durée : 167 minutes
Éditeur : Pulse Video
Date de sortie : 30 octobre 2022
LE PITCH
Lorna et Tom sont un couple de rabatteurs à la petite semaine. Dans une boite de nuit, ils séduisent la jeune et vierge Jenny pour une nuit de débauche, pour ensuite la droguent et la vendre à un réseau de traite des blanches. Lorsqu’ils découvrent qu’elle est la fille d’un milliardaire, ils décident de lui demander une énorme rançon. Mais ils doivent maintenant soustraire Jenny des mains redoutables proxénètes qui la retiennent prisonnière.
Une belle paire
Édité en 2016 par Glénat mais concocté par l’équipe de Pulse, le riche ouvrage Brigitte Lahaie : Les Films de culte avait fait sensation. Désormais disponible en anglais, il se voit aussi accompagné d’un Bluray (vendu séparément) compilant quelques curiosités autour de l’actrice et réunissant deux opus rarissimes signés par le roi de l’exploitation Jess Franco : le barbouze Dark Mission et surtout le drame érotique Je brûle de partout.
Auteur de plus de 200 cents longs métrages et grand amateur d’érotisme cinématographique, d’exploitation fricotant plus ou moins ouvertement avec la pornographie, Jess Franco se devait naturellement de croiser un jour le chemin de Brigitte Lahaie, la star du X français de l’époque, qui justement a toujours affiché l’ambition d’accéder à une carrière plus « respectable ». Si leur collaboration la plus célèbre reste bien entendu Les Prédateur de la nuit, grosse production René Château avec Helmut Berger et Telly Savalas, on retrouve l’actrice au générique de deux autres opus du monsieur, réunis ici pour votre plus grand plaisir.
A commencer par l’étonnant Je Brûle de partout, classé X en 1979 en France par la commission de censure, mais qui pourtant n’est pas un film pornographique à proprement dit, même s’il s’amuse sadiquement à jouer avec les limites. Les scènes de sexe s’avèrent ainsi plutôt crues, les corps sont montrés frontalement (vulves et pénis compris) et il semble évident que quelques actes, souvent effectués par des personnages secondaires, ne sont pas totalement simulés. Excitant ? Pas franchement car malgré son titre aguicheur, Je Brûle de partout raconte le destin sordide d’une pauvre adolescente, vierge et innocente, séduite par un couple de manipulateurs pervers qui en profitent une nuit avant de la revendre à un réseau de traite des blanches qui drogues leurs esclaves avec un étrange gaz aphrodisiaque. Pas d’humour décalé, de psychédélisme salvateur ou de fantastique pop, le récit plonge constamment dans une atmosphère trouble, gênante et glauque où les plaisirs de la chair sont salis jusqu’à terme. On reconnait ici le Jess Franco des adaptations de Sade, ou des thrillers érotiques comme Shining Sex, combinant une mise en image brute et sèche, une forme de folie contenue avec les atmosphères free jazz de l’habituel Daniel White. Touchante et fragile, la rare Susan Hemingway (Lettres d’amour d’une nonne portugaise, Deux espionnes avec un petit slip à fleurs) se fait dévorer toute crue par une Brigitte Lahaie assez convaincante en femme amorale qui finira par tomber à son tour dans le piège de ce réseau de prostitution machiavélique.
Brigitte prend les armes
Si l’actrice ne gardera pas forcément qu’un bon souvenir du tournage, ne gouttant que peu à la frénésie de tournage de Franco et sa tentative d’enquiller avec les jours restant au compteur un second film avec la même équipe (ah quel filou ce Jess !), elle va pourtant rempiler avec celui-ci dix ans plus tard pour Dark Mission, re-titré parfois bizarrement Les Fleurs du mal. Un projet un peu plus friqué et qui se permet de transformer l’immense Christopher Lee (qui avait besoin d’argent) en vieux révolutionnaire et fidèle de Castro dans un pseudo film d’action et d’espionnage, et de placer Christopher Mitchum, second fils de et même pas avec un quart de son talent ou de son charisme, à ses trousses. Un vilain qui a de la gueule mais qui s’ennuie face à un héros mollasson et pataud dans une aventure mou du genou filmé dans une jungle étriquée avec quelques hélicoptères en stock-shot (et même pas au même format d’image). Aucun doute on est ici dans une fière production Eurociné ! On a connu Jess Franco plus inspiré (mais moins aussi) mais on peut au moins s’y amuser à profiter d’une Brigitte Lahaie toute habillée, apparaissant dans l’ombre, dirigeant la résistance locale et maniant fièrement la mitraillette contre armada de militaires et trafiquants de drogue à moustache. On se satisfait comme on peut, tant il est vrai que ce pauvre Dark Mission, Eurospy sur le tard, tient plus du nanar que du grand Bis méconnu.
Image
Film central de l’édition Je brûle de partout nous parvient tel un miraculé après des années et des années d’une distribution dans des conditions d’autant plus difficiles que le négatif semblait avoir subits quelques altérations irrémédiables. Grace à un tout nouveau scan 2K et un travail de restauration impressionnant, le film retrouve une certaine stabilité, des couleurs maitrisées et, cadeau bonus, une définition toute en finesse. Taches et griffures sont toujours présentes mais c’est là une partie prise qui préserve en même temps grain et matières de pellicules. Un peu moins luxueuse, la remasterisation de Dark Mission ne s’est manifestement faite que par des biais numériques sur une source déjà connue. Un peu trop lisse et terne parfois, mais le rendu général est plutôt agréable avec des cadres bien propres et des teintes rehaussées.
Son
Uniquement disponible en français, Je brûle de partout, offre un DTS HD Master Audio dans son jus avec une clarté nouvelle, mais une captation d’origine prise un peu sur le vif. Dark Mission est beaucoup plus généreux en langues (si j’ose dire) avec en plus d’un doublage français bien bisseux (et très en avant), l’éditeur propose la version originale anglaise (question de profiter de la voix de Christopher Lee) et même le doublage allemand pour les sadiques.
Interactivité
Complément de l’excellent ouvrage Brigitte Lahaie Les films de culte signé Cédric Grand Guillot et Guillaume Le Disez, le présent Bluray reprend en partie les éléments déjà proposés alors sur le DVD bonus à l’instar du moyen métrage Les Volets bleus, d’Haydée Caillot (1988), récit sentimental et mélancolique qui permet d’observer Brigitte Lahaie dans un rôle plus sensible qu’à l’accoutumé, mais aussi les 30 minutes inédites du conte fantastique inachevé A.D.N. d’Ali Borgini (1983). Des petites raretés auxquels vient désormais s’ajouter le documentaire French Love produit en 98 pour Canal + et diffusé dans le prolongement du Journal du Hard. Réalisé par François Cognard et Frédéric Fiol, ce dernier retrace l’âge d’or du cinéma érotique et porno français, essentiellement durant la parenthèse enchantée du milieu des années 70 aux cotés de José Bénazéraf, Roger Vadim, Jean Rollin, Just Jaeckin, Gérad Kikoïne, Francis Mischkind et beaucoup d’autres dont bien naturellement notre Brigitte. Presque trop court, mais au final assez complet, il avait initié toute une génération gavée aux bourgeoisies de Marc Dorcel à un cinéma X plus sensuel, plus libre, plus artistique et plus libertaire.
Liste des bonus
Le film Les Volets bleus réalisé par Haydée Caillot avec Brigitte Lahaie (40′), Le documentaire French Love (1998) réalisé par François Cognard et François Fiol (52′), Les images inédites du film perdu A.D.N., le dernier homme d’Ali Borgini (30′)