BLACK PHONE
The Black Phone – États-Unis – 2021
Support : Bluray
Genre : Horreur
Réalisateur : Scott Derrickson
Acteurs : Mason Thames, Madelein McGraw, Ethan Hawke, Jeremy Davies, E. Roger Mitchell
Musique : Mark Korven
Durée : 103 minutes
Image : 2.35 16/9
Son : DTS HD Master Audio 7.1 Anglais, DTS HD High Resolution Audio 7.1 français, italien…
Sous-titres : Français, anglais, italien, néerlandais
Éditeur : Universal
Date de sortie : 26 octobre 2022
LE PITCH
Finney Shaw, un adolescent de 13 ans, timide mais intelligent, est enlevé par un tueur sadique qui l’enferme dans un sous-sol insonorisé où s’époumoner n’est pas d’une grande utilité. Quand un téléphone accroché au mur, pourtant hors d’usage, se met à sonner, Finney va découvrir qu’il est en contact avec les voix des précédentes victimes de son ravisseur. Ils sont aussi morts que bien résolus à ce que leur triste sort ne devienne pas celui de Finney.
« Tu veux un ballon ? »
Après avoir quitté la préproduction d’un second Doctor Strange finalement confié à Sam Raimi, Scott Derrickson revient à ses premiers, et vrais amours, le thriller horrifique pesant et dérangeant avec Black Phone, porté une nouvelle fois par un Ethan Hawke impérial.
Car si Sinister était la première incursion de l’acteur dans le genre horrifique, il en a gardé un excellent souvenir et l’envie de pousser encore plus loin son implication. Exit le bon père de famille investi et courageux, Ethan Hawke incarne ici The Grabber, illusionniste raté se promenant dans les rues de la ville dans son van noir, apparaissant devant les gosses masqué et des ballons noirs à la main. Un serial killer parmi d’autre mais au look aussi sobre qu’inoubliable, habité par un comédien qui joue comme jamais de sa nouvelle corpulence (il sortait des préparatifs physiques de The Northman) et d’intonations de voix changeantes, doucereuse ou rauque s’échappant d’un masque de diable froid et impassible. Un croquemitaine inédit qui se détache totalement de l’hommage au Ça de Stephen King, que Joe Hill (le fiston donc) avait imaginé dans la nouvelle initiale. De toute façon, Scott Derrickson, accompagné de son co-scénariste habituel C. Robert Cargill, s’est totalement réapproprié le matériau le croisant directement avec son projet plus autobiographie d’évoquer ses souvenirs d’enfance, traumatiques et douloureux.
Sinistrés
On reconnait donc bien le réalisme surnaturel de Joe Hill où au cœur d’un terrible fait divers va pointer une forme de magie salvatrice (ici une petite sœur médiumnique et des victimes qui informent le héros par le biais d’un téléphone mural déconnecté), mais il est teinté d’une atmosphère beaucoup plus lourde, pesante et dérangeante. Dans Black Phone, cette Amérique de la fin des années 70 si souvent fantasmée dans nombres de fictions actuelles, retrouve ses aspects les plus ternes, brutaux, se décrivant surtout comme un décor terrible pour l’innocence de la jeunesse, devant survivre aux harcèlements divers en milieux scolaire, échapper aux ratonnades en pleines rue et aux coups de ceintures d’un paternel au bout du rouleau en rentrant à la maison. Sans une once de caricature et révélant au passage de très jeunes acteurs renversants, Mason Thales et Madeleine McGraw, le film tiendrait presque alors de la chronique désenchantée, du drame tragique et douloureux dont seul l’amour frère-sœur permet de s’échapper d’un quotidien amer. L’ambition est alors moins de faire bondir le spectateur et de livrer un film en forme de train fantôme, que de travailler une atmosphère opaque, trouble, où s’invitent de manière pernicieuse, mais rapidement évidente, les démons de la pédophilie. Dans cette omniprésence du mal, dans cette description acide d’une réalité à la dangerosité constante, Scott Derrickson ne cède pourtant jamais, comme le courageux et astucieux Finney Shaw, aux sirènes de la peur et du désespoir, donnant corps à un récit fort et émouvant, célébrant la résilience de la jeunesse et son impulsion de vie. Terrifiant parfois, mais finalement plein d’espoir et de hargne.
Image
Le film a été essentiellement tourné en numérique mais inclus aussi quelques éléments (les flashbacks) en Super 8. Le passage de l’un à l’autre se fait avec beaucoup de naturel, même si les éléments sur pellicule imposent une plus grande finesse et une matière organique plus ferme. On peut regretter tout de même que cette esthétique qui se rapproche parfaitement des teintes et des lumières des 70’s n’ait pas profité d’un traitement complet sur pellicule, les limites du numérique se ressentant parfois dans la douceur des cadres et dans les séquences les plus sombres où les noirs paquettent légèrement. Quelques menus défauts pour un master HD de très belle tenue, au meilleur de ses capacités en l’occurrence.
Son
Sacrée réussite que ce DTS HD Master Audio 7.1 qui accompagne avec ferveur la minutie des atmosphères angoissantes du film. Pas de grandes saillies attendues, mais une dynamique sinueusement enveloppante qui va venir titiller les poils de la nuque et retranscrire à merveille les sensations claustrophobiques du personnage. En dehors d’un doublage qui manque de force, la version française s’en sort presque aussi bien.
Interactivité
Annoncé comme une « édition collector », l’édition de Black Phone fait un peu penser à cette époque du DVD où la moindre présence d’un commentaire audio et d’un petit making of lui donnait des airs de produit de luxe. Ici rien de vraiment original ni de particulièrement renversant, mais une interactivité plutôt intéressante qui revient naturellement sur le tournage du film, la reconstitution historique, le travail de mise en scène et les jeunes acteurs. Ethan Hawke tient ici la place principale, venant souvent porter la parole d’un metteur en scène absent. Pour entendre Scott Derrickson en personne, il faut se tourner vers le très intéressant commentaire audio qui retrace bien entendu le travail d’adaptation, les coulisses du film et le travail avec les acteurs, mais aussi les éléments beaucoup plus personnels pour le metteur en scène.
L’édition contient aussi deux très courtes scènes coupées et le court métrage Rôdeur de l’ombre, petit exercice de style autour du Home Invasion, tourné avec les fistons.
Liste des bonus
Commentaire audio de Scott Derrickson, Scènes coupées (2’), Ethan Hawke dans un rôle de méchant (4’), « Répondre à l’appel » : dans les coulisses de Black phone (10’), « La conception du Diable » (5’), Tournage en Super 8 (2’), Court métrage : « Rôdeur de l’ombre » de Scott Derrickson (2021, 12’).