BLACK CHRISTMAS
Etats-Unis – 1974
Support : Bluray & DVD
Genre : Horreur
Réalisateur : Bob Clark
Acteurs : Olivia Hussey, Margot Kidder, John Saxon, Keir Dullea, Art Hindle…
Musique : Carl Zittrer
Durée : 98 minutes
Image : 1.85 16/9
Son : Anglais DTS HD Master Audio 2.0 et 5.1, Français DTS HD Master Audio 2.0
Sous-titres : Français
Éditeur : The Exctasy of Films
Date de sortie : 10 février 2022
LE PITCH
Pendant la période de Noël, dans une résidence étudiante de filles, quelques-unes des pensionnaires ne partent pas rejoindre leurs familles respectives pour les fêtes et restent sur place. Lors d’une soirée, de sordides appels téléphoniques anonymes troublent leur quiétude. Si elles préfèrent ne pas les prendre au sérieux dans un premier temps, une des leurs disparaît mystérieusement, et le corps d’une adolescente est retrouvée non loin de là par la police. Certaines des pensionnaires se mettent à la recherche de leur amie, mais pendant ce temps, dans la résidence, les cadavres s’empilent, et la police demeure extrêmement incompétente.
Joyeuses fêtes
Longtemps resté inédit en France avant une première et inespérée sortie vidéo il y a seulement 10 ans, Black Christmas de Bob Clark est pourtant souvent considéré comme le premier vrai slasher du cinéma américain, quatre ans avant le choc Halloween. Un film précurseur certainement et toujours aussi angoissant quarante ans après.
Si la filiation entre le chef d’œuvre de John Carpenter et ce Black Christmas existe bien (Bob Clark aurait même soufflé le titre à son collègue), le premier ayant été profondément marqué par le travail du second, il n’y eu pas d’effet de mode et de copiage systématique de cette petite production canadienne de 1974. Un joli succès dans son pays, mais une sortie timide aux USA sous le titre Silent Night Evil Night, qui effectivement ne provoque par alors d’énorme remous dans l’industrie. Sa reconnaissance sera plus tardive, sur le long court, permettant à de nombreux curieux de découvrir une prestation qui certes préfigure Vendredi 13 & co, mais qui aussi les devance surtout d’une tête. Toujours un pied dans la stylisation propre au giallo, Black Christmas s’empare dès l’ouverture d’une caméra qui peut se faire subjective, embrassant temporairement le point de vue du tueur pour mieux déstabiliser et impliquer le spectateur. Celui-ci n’est d’ailleurs pas un homme masqué, mais une menace sans visage dont on ne percevra jamais la totalité. Un œil en très gros plans, une main, une silhouette et surtout une voix qui ne passe que par le combiné du téléphone du pensionnat ou, annonçant clairement les futurs Terreur sur la ligne et par rebond Scream, elle déverse menaces et insanités avec une voix multiple, changeante, comme si une autre histoire, une trame plus barbare se déroulait en parallèle ou revenait hanter les lieux. Pas d’explication concluante d’ailleurs, les motivations et la nature du serial killer restera presque insaisissable, comme une abstraction totale, un mal qui attend à l’intérieur pour détruire.
Ladies best friend
Déjà auteur d’un Le Mort-vivant où la monstruosité s’extrayait des séquelles traumatiques de la guerre du Vietnam, Bob Clark ferait presque de cette traque étouffante entre quatre murs, une réflexion politique sur la misogynie basique de la société américaine. Ses héroïnes ne sont ainsi pas des gentillette bimbos fourvoyées ou à l’opposée totalement frigides, mais bien des jeunes femmes modernes, affirmées, indépendantes, jamais caricaturales, qui semblent se heurter constamment au cadre patriarcal qu’on leur a laissé. La plupart des représentant de la loi (excepté John Saxon) sont totalement à la masse et minimalisent totalement leurs inquiétudes, les petites milices nocturnes reluques ce qu’elless peuvent tandis que les représentantes du corps féminins, d’une pauvre petite fille à la matrone de la demeure victorienne, tombent sous les coups d’un mystérieux assassins dont on ne peut être sûr que du sexe. Il n’est pas innocent que l’excellente Margot Kidder (Sœurs de sang, Amytiville, Superman…) y interprète une citadine délurée et aussi portée sur la bouteille que la provocation ou que la réservée et douce Oliva Hussey (Roméo et Juliette, Mort sur le Nil) doivent faire face à un petit ami incapable de supporter sa décision d’avorter. Eternel cosmonaute de 2001 L’Odyssée de l’espace, Keir Dullea campe d’ailleurs un jeune artiste manifestement torturé et dont le besoin de contrôle sur sa compagne va peu à peu le confondre avec le meurtrier et sa métaphore féministe.
Malin dans sa manière de mêler une trame volontairement vaporeuse et un sous-texte plus complexe, Black Christmas réussit aussi en resserrant peu à peu les cadres, en jouant sur une palette de plus en plus sombre et une atmosphère oppressante à pervertir peu à peu, mais irrémédiablement, les atours autrefois joyeux et chaleureux de la sacro-sainte Fête de noël et du flot de bonnes volontés et de bons sentiments qui animent les semaines la précédant dans la culture américaine. Sans excès d’hémoglobine, sans répondre à la tentation du gore, Bob Clark impose une atmosphère mélancolique et malsaine et une efficacité des plus brutales.
Image
Reprenant le travail effectué par Shout Factory en 2016, notre petit éditeur français nous offre un superbe master HD restauré à partir d’un scan 2K du négatif. Le choix a été de ne pas modifier la nature même du film et de préserver à la fois le grain de pellicule très marqué (voir un peu neigeux parfois) et les plans légèrement vaporeux d’origine. On note aussi quelques restes de griffures, gommées mais pas effacées. Pas une trace de lissage ou autre logiciel disgracieux à l’horizon. Car cette esthétique cinématographique et purement organique sied parfaitement à un film comme Black Christmas, plus rugueux que jamais, désormais généreusement rehaussé de teintes chaudes et contrastées et d’une définition puissante et admirable. A noter que pour la première fois en France, le film est visible dans son format d’origine en 1.85 et non 1.78 comme ce fut le cas en DVD.
Son
On passera rapidement sur la version française assez mauvaise et veillotte malgré un DTS HD Master Audio 2.0 de qualité pour profiter pleinement de la version originale disponible à la fois dans un DTS Master Audio 2.0 équilibré, clair et stable et dans un étonnant DTS HD Master Audio 5.1. Ce dernier réussi sans jamais dénaturer l’atmosphère du film et son âge vénérable à ajouter à l’ensemble des atmosphère plus pénétrantes et quelques effets de spatialisation bien flippants.
Interactivité
Encore un superbe Mediabook signé The Ecstasy of Films reprenant l’affiche la plus éloquente tout en disposant dans sa reliure un livret très complet sur la gestation du film (rédigé par l’incontournable Marc Toullec), agrémenté de nombreuses photos d’exploitations.
A l’intérieur les disques Bluray et DVDS qui se répartissent, sans doute pour des questions de stockage, les nombreux bonus de l’édition. L’essentiel se tient bien entendu sur le premier disque avec le film dans son format plus large (mais non voulu) en 1.78 mais dans sa copie précédente, mains pointilleuse et lissée, question de satisfaire les collectionneurs. Suivent deux making of rétrospectifs, Les 12 jours de Black Christmas et Black Christmas revisité, survivant d’anciennes sorties DVD, qui retracent à grand renforts d’interviews et témoignages aussi bien un tournage à l’opposé de l’atmosphère du film (joyeux donc), revient sur les trouvailles visuelles du film, ses personnages, sa sortie américaine difficile et son impact sur le genre autant que son statut culte gagné au cours des années. Les interviews d’Olivia Hussey et Art Hindle qui suivent sont d’ailleurs des versions complètes de leurs interventions croisées dans le second item, plus complet. Les scènes supplémentaires annoncées ne sont en fait que des scènes déjà connues mais avec un mixage audio différents permettant d’entendre des bribes de dialogues inaudibles dans la version finale.
Passage ensuite à la galette SD (qui contient bien entendu aussi une copie du film) pour profiter d’une rencontre passionnante avec une Margot Kidder toujours aussi rentre-dedans et percutante qui certes discute du film en question mais aussi de ses débuts d’actrices, ses allers-retours Los Angeles / Canada, le Sœurs de sang de Brian de Palma, Superman et la liberté dont pouvait profiter un film comme Black Christmas dans les années 70. Le programme s’achève par une rencontre publique avec Bob Clark, John Saxon et Carl Zittrer à l’issu d’une projection du film. Beaucoup de questions déjà abordées dans les segments précédents mais aussi un bon moyen d’observer la personnalité assez particulière du réalisateur.
Liste des bonus
Livret par Marc Toullec, Black Christmas (Format 1:78.1 – 98min – VF + VOSTFR – Mix audio VO différent), Les 12 jours de Black Christmas (20′), Black Christmas revisité (36′), Interviews de Olivia Hussey (17′), Interview de Art Hindle (24′), Scènes supplémentaires (3′), Questions & Réponses avec Bob Clark, John Saxon et Carl Zittrer (20′), Interview avec Margot Kidder (21′), Bandes-annonces.