BASTARD SWORDSMAN & RETURN OF THE BASTARD SWORDSMAN
天蚕变 / 布衣神相 – Hong-Kong – 1983, 1984
Support : Bluray
Genre : Arts-martiaux, Action
Réalisateur : Tony Liu Jun-Guk
Acteurs : Norman Chu, Anthony Lau Wing, Jung Wang, Yeung Jing Jing, Leanne Lau, Kuan Tai Chen, Lo Lieh…
Musique : Chin-Yung Shing ; Chen-Hou Su
Durée : 180 minutes
Image : 2.35 16/9
Son : Cantonnais DTS HD Master Audio 2.0 mono
Sous-Titres : Français
Editeur : Spectrum Films
Date de sortie : 01 octobre 2021
LE PITCH
Le chef de l’Invincible Clan se plaît, décennie après décennie, à humilier le groupe rival, le Wu-Tang Clan. La prochaine fois, le clan perdant sera obligé de plier l’échine pour de bon et de se dissoudre. Les membres du Wu-Tang sont désespérés, leur dernier espoir reste la légendaire technique du ver à soie que seuls les héritiers des maîtres fondateurs peuvent maîtriser. En secret, leur serviteur bâtard, dont ils se moquent allègrement, suit un entraînement secret depuis des années avec un guide mystérieux.
La Shaw sort de sa crysalide
Dépassé par l’énergie et la modernité de la nouvelle génération, la vénérable Shaw Brothers offre les clefs de la maison à Tony Liu Jun-Guk (Angel Terminator 2, The Dragon Fighter…) qui revampe les habituels récits de héros tragiques et de clans ennemis avec une démesure et une énergie réjouissantes dans Bastard Swordsman et sa suite directe.
Autrefois célébré pour l’inspiration débordante et la qualité constante de ces productions kung fu ou wu xia, la Shaw Brothers est tombée de son piédestal lorsque leur acteur Tony Liu réussit à faire sa voie vers la réalisation. Ouverte à toutes les propositions, l’ancien empire du divertissement chinois s’engouffre enfin dans la voie tracée par la Nouvelle Vague et décide de moderniser ses grands films en costumes. Une dynamique poussée justement par Tony Liu qui écarte les anciennes chorégraphies réalistes, voir historiques, les installations dramaturgiques théâtrales, et construit ses films essentiellement autour d’une action totalement débridée mêlant mouvements plus qu’improbables et effets spéciaux novateurs. Mine de rien, depuis 1977 le cinéma de divertissement mondial n’est plus le même et Tony Liu l’a parfaitement compris. Adaptation d’un célèbre roman de Ying Wong (Mr Vampire), Bastard Swordsman repose ainsi à la base sur un canevas classique pour le studio, mêlant un gigantesque feuilleton de guerre des clans intergénérationnelle, d’affrontements d’écoles, de traîtrises en pagailles et la révélation d’un jeune héros brimé par ses camarades du Wu-Tang Clan (oui celui-là même). Rapidement le réalisateur y impose sa marque par des mouvements de caméra et des effets de montage qui électrisent le récit et accélèrent considérablement son déroulé. Les personnages secondaires s’éloignent à l’horizon, les enjeux sont résumés en quelques brefs dialogues, les sentiments installés en un ou deux plans, et les rebondissements (parfois difficilement compréhensibles) s’enchaînent dans un déluge de combats spectaculaires et généreusement invraisemblables.
Cousu de fil blanc
Au programme des guerriers qui volent dans tous les câbles, des épées qui brillent comme des sabres lasers, un maître qui s’envole sur son trône, des pirouettes interminables la tête en bas, des jets de lumière et d’électricité, des dédoublements dans tous les sens et bien entendu, clou du spectacle, une technique du ver à soie qui balance de la toile sur les ennemis et les enferme dans un cocon. Avec un univers fantastique totalement assumé, Bastard Swordsman enthousiasme autant par son chaos vif et lumineux, que par son enchaînement de trouvailles scéniques et techniques, son inventivité constante. Connu surtout pour ses grands rôles de méchant, Norman Chu (Histoire de Cannibales, Duel To The Death, The Sword), campe ici pour une fois un vrai héros, à la limite du super-héros, qui se verra transfiguré tel Gandalf en incarnation purifiée et blanche.
On peine un peu cependant à retrouver la même superbe dans le suivant Return of the Bastard Swordsman, tourné l’année suivante avec une équipe identique (et des acteurs dans de nouveaux rôles). Parti découvrir le monde aux côtés de sa dulcinée, Yun Fei Yang est absent pendant tout le premier tiers du film et passera le second blessé et évanouis après un terrible combat. S’il ajoute au programme un clan de vilains japonais (pléonasme), le second film traîne cependant un peu plus la patte, comblant le vide par quelques scènes de comédie et des successions de joutes martiales sans doute légèrement plus mécaniques. Jusqu’au grand final où, succédant à deux ninjas échappés d’un anime, le méchant en titre, à la poitrine extensible et spécialiste des expulsions à cœur ouvert, doit faire face aux fameux fils dansants et aux rythmes des tambours.
Pas forcément aussi ambitieux et artistiquement marqué que les essais révolutionnaires de Tsui Hark, Chin Siu-Tung ou Patrick Tam, les deux Bastards Swordsman ressemblent à s’y méprendre aux concepts Marvel d’aujourd’hui : explorations jusqu’à la lie d’une formule archiconnue mais baignée dans un déluge d’effets spéciaux quasiment hypnotique. Mais le tout dans les sublimes décors, et avec le savoir-faire, de la Shaw Brothers.
Image
Il y a déjà de longues années Celestial Pictures, détendeur du catalogue de la Shaw Brothers avait entamé un large travail de restauration de ces nombreux trésors. Des efforts appréciés en France dans la belle collection DVD de Wild Side Vidéo, et aujourd’hui dans les titres plus tardifs édités en Bluray par Spectrum. Un travail de nettoyage tout à fait admirable (surtout quand on connaît la préservation à la chinoise) qui délivre des cadres d’une grande propreté et d’une stabilité certaines, tout en appuyant des couleurs parfaitement vives et pimpantes. La définition se montre bien performante elle aussi, avec un piqué fermement dessiné dans les séquences lumineuses… On notera cependant l’apparition récurrente de petits fourmillement numériques dans les zones sombres.
Son
Les monos d’origine nous reviennent avec une clarté très agréable. Quelques petits effets de saturation d’époque se font entendre, mais l’ensemble est des plus confortables, mettant généreusement en avant les effets spéciaux sonores presque cosmiques des films.
Interactivité
Double programme pour cette nouvelle sortie Shaw Brothers par Spectrum. Un diptyque presque inconnu en France proposé avec fourreau cartonné, et numéroté, jaquette réversible et deux Bluray distincts. Les suppléments se répartissent sur les deux avec une présentation globale idéale toujours servie par Arnaud Lanuque, qu’il complète par un travelling en deux parties consacré aux dernières années du studio, leur difficulté à prendre le train en marche et les dernières belles productions maison. On trouve ici aussi un désormais récurrent essai vidéo venant analyser les outils stylistiques de modernisation du style du wu xia façon Shaw Brother et un vaste portrait audio de la célèbre productrice Mona Fong, alias Lady Shaw.
Liste des bonus
Présentation du film par Arnaud Lanuque (13’), Portrait de Mona Fong (27’), Le déclin de la SB par Arnaud Lanuque (25’), Essai vidéo (17’), jaquette réversible et bande-annonce.