BASIC INSTINCT
Etats-Unis – 1992
Support : UHD 4K & Bluray
Genre : Thriller
Réalisateur : Paul Verhoeven
Acteurs : Michael Douglas, Sharon Stone, Jeanne Tripplehorn, George Dzundza…
Musique : Jerry Goldsmith
Durée : 128 minutes
Image : 1.85 16/9
Son : Français et Anglais DTS HD Master Audio 5.1
Sous-titres : Français
Editeur : StudioCanal
Date de sortie : 16 juin 2021
LE PITCH
Une étrange relation, à la fois torride et sauvage, va unir l’inspecteur chargé de l’enquête et la principale suspecte d’une série de meurtres d’une rare violence, perpétrés au pic à glace…
Engrenage mortel
Provocateur, subversif, brillant. Aimé, encensé, méprisé, détesté. Basic Instinct est le film de toutes les controverses, le film à scandale par excellence. Celui qui peut faire comme défaire une carrière. Comme toute bonne polémique, il aura fait couler beaucoup d’encre et provoquer des réactions viscérales. Mais au final, une fois le souffre retombé qu’est-ce qu’il reste : un putain de bon film.
Pourtant, ce pari risqué était loin d’être gagné. Le scénario avait beau affoler Hollywood, intéresser les studios jusqu’à atteindre la somme faramineuse de 3 m$, les majors restaient frileuses pour lancer la machine. Il aura fallu les cojones du producteur Mario Kassar (Rambo, Stargate) et de feue la société Carolco pour lancer les hostilités.
Reste à trouver celui qui aura la poigne et la folie pour diriger ce projet. Kassar n’aura pas à chercher bien loin. Auréolé du succès maison Total Recall, celui que l’on appelait encore le Hollandais violent pour ses faits de guerres filmiques dans son pays natal et sa hargne bigger Than life de son Robocop s’impose sans discussion. Sexe, violence, provocation, Paul Verhoeven a le regard parfait et non perverti par l’intelligentsia locale pour réaliser le film. Il a la poigne nécessaire et sait s’entourer d’une équipe fidèle et loyale. En bon capitaine, le film allait forcément lui ressembler.
La femme est la chute de l’homme
Tout cela ne sera pas pour déplaire à Michael Douglas. Égocentrique, la star veut jeter un pavé dans la mare et secouer le cocotier californien. Pour lui, la dernière fois que les studios ont eu du courage, c’était pour Liaison fatale. Ça tombe bien, il jouait dedans ! Le coquin veut son droit de regard sur l’actrice qui le poussera dans ses retranchements. Choix crucial du film, tout le monde sait que l’erreur n’est pas permise. Aucune star établie n’acceptera de tourner topless au-delà du raisonnable. Le choix de Sharon Stone est entré dans l’histoire du cinéma. Actrice de 32 ans, elle sait que ce sera quitte ou double. Elle n’a plus l’âge pour percer en tant que jeune première et en a assez de jouer les faire-valoir, la blonde délurée reléguée en second plan sur du Allan Quaterman ou du Police Academy. C’est maintenant ou jamais. Coup de poker et main chanceuse, elle avait déjà tapé dans l’œil du réalisateur sur Total Recall face à Schwarzy. Aujourd’hui, difficile d’imaginer quelqu’un d’autre. Le duo Douglas/Stone est aussi antinomique que la braise et la glace; lui hautain et suffisant, elle froide et magnétique. Verhoeven est ravi. Il a toujours su magnifier les femmes fortes dans ses films. A l’instar d’Hitchcock et de son Sueurs Froides qu’il revendique comme inspiration première, il joue sur les faux-semblants, structure son film sur l’ambiguïté. Les interactions entre ses protagonistes sont autant de duels psychologiques où ses personnages ne peuvent en ressortir indemne. Et que dire du pouvoir de l’image ; le réalisateur sait distiller un érotisme pervers et jubilatoire. La célèbre scène de l’interrogatoire de Stone au commissariat n’en est pas surfaite. L’art du montage, de la mise en scène et des dialogues forment un grand tout anxiogène d’une maîtrise absolue. Les exemples sont nombreux, les parallèles entre les scènes apparaissent comme autant de kaléidoscopes pervers qui se répondent les uns aux autres (l’interrogatoire de Douglas, les scènes de sexe…).
Que reste-t-il de nos amours ?
De sa gestation à son accouchement, le film s’est fait dans la douleur. Les ligues LGBT voulurent empêcher le tournage trouvant le film injurieux envers la communauté lesbienne, sabotant les plateaux dès que possible. Malheur faisant, Verhoeven s’en amuse, rappelant qu’en tant qu’européen, les homos ne sont pas un problème, ils sont le quotidien. Mais il ne concède rien exceptée la fin qu’il voulait changer en happy-end ou presque. Joe Eszterhas, l’auteur a tenu bon, bien lui en a pris. Ils se retrouveront avec nettement moins de bonheur quelques années plus tard pour le film Showgirl. Le scénariste remettra également le couvert en essayant de reproduire sans succès sa formule magique pour Sharon Stone avec le thriller érotique Sliver de Phillip Noyce. Le revers de la médaille pour une actrice qui n’arrivera désespérément pas à se débarrasser de ce rôle marquant.
La reconnaissance absolue arrivera bientôt avec la montée sulfureuse des marches du Festival de Cannes où le film est sélectionné en compétition officielle. Les paillettes et le glamour propulsent instantanément Sharon Stone en icône du septième art. Celui que l’on appelait encore par un sobriquet a pris du galon. On pourrait comparer son film à un croisement entre le travail d’Hitchcock et de De Palma. Ce serait réducteur. Désormais, lorsque l’on s’adresse à lui, on l’appelle Monsieur Verhoeven, tout simplement.
Image
Particulièrement attendue, cette ressortie de Basic Instinct, cette fois ci sur format UHD, ne déçoit sur rien. La restauration, effectuée à partir d’un nouveau scan 4K du négatif original (et quelques bribes de l’internégatif pour les scènes censurées aux USA), a été on ne peut plus rigoureuse offrant des cadres d’une propreté et d’une stabilité immuable. Outre une image virginale, le film perd surtout ce grain fluctuant et disgracieux qui le suivant méchamment depuis sa première exploitation vidéo, remplacé par un vrai grain de pellicule, fin et naturel. De son coté le traitement des couleurs HDR, rehausse largement le spectacle, montrant quelques subtilités inédites dans la photo pas si glacée.
Son
Même si on pourra regretter la présence d’une piste Dolby Atmos, le DTS HD Master Audio 5.1 inédit se montre suffisamment savoureux, fluide et dynamique pour satisfaire tout le monde. Clair bien entendu, savamment équilibré cela va de soi, mais surtout terriblement tendu aussi bien dans les séquences langoureuses que dans les passages les plus angoissant. La longue poursuite en voiture, so Hitchcock, en met plein les oreilles, et la sublime BO de Jerry Goldsmith nous a rarement parue aussi belle. Profitant d’un mix équivalent, le doublage français lui est malheureusement toujours aussi bêtement excessif, voir vulgaire.
Interactivité
Une édition bien garnie même si de nombreux bonus proviennent de l’édition précédente. A savoir making of et interview divers. A regretter la disparition d’un entretien d’une heure du réalisateur. Néanmoins cette édition nous gratifie d’un excellent retour réalisé récemment avec les principaux intervenants du film (réalisateur, acteurs, scénariste) où la langue de bois est mise au placard, bourré d’anecdotes sur le tournage et où nous retrouvons un Paul Verhoeven visiblement heureux de son film, un Michael Douglas très satisfait de lui-même et une Sharon Stone touchante. Enfin, un module spécialement dédié à la musique du cultissime Jerry Goldsmith est présent où l’accent est particulièrement axé sur les parallèles de sa collaboration avec Verhoeven et celle du célèbre tandem Herman/Hitchcock.
Liste des bonus
Basic Instinct Sex, Death and Stone (53’), Basic Instinct une bande originale intemporelle (16’), « Blonde Poison » : making of (24’), Interview de l’équipe du film (6’), Comparaison storyboard/film (11’), Essais des actrices (9’), Bande-annonce (1’), Commentaire audio de Paul Verhoeven et Jan de Bont, Commentaire audio de Camille Paglia.