AMERICAN WARRIOR
American Ninja – États-Unis – 1985
Support : Blu-ray & DVD
Genre : Action
Réalisateur : Sam Firstenberg
Acteurs : Michael Dudikoff, Steve James, Judie Aronson, Guich Koock, Jon Fujioka, Don Stewart…
Musique : Michael Linn
Durée : 95 minutes
Image : 1.85:1, 16/9ème
Son : Français & Anglais DTS-HD Master Audio 2.0
Sous-Titres : Français
Éditeur : ESC Editions
Date de sortie : 16 mars 2023
LE PITCH
Joe Armstrong, un soldat américain, est stationné aux Philippines. Il y affronte une organisation de ninjas impliquée dans un trafic d’armes…
Le ninja blanc
Les années n’ont pas été tendres avec le premier volet de la franchise American Ninja, création emblématique de la Cannon. Forcément désuet, gentiment ringard et un peu Z sur les bords, le film de Sam Firstenberg conserve malgré tout un immense capital sympathie hérité de l’âge d’or de la VHS et des vidéoclubs et peut même être vu comme l’un des pionniers du métissage entre le cinéma d’action hollywoodien et ses concurrents asiatiques.
C’était l’une des idées fixes de feu Menahem Golan : adapter le ninja, ce guerrier furtif et mystérieux issu de la culture japonaise, au goût du public occidental. Aujourd’hui, beaucoup y verraient de l’appropriation culturelle voire une certaine forme de racisme puisque l’argument commercial revient en quelques sorte à vulgariser une icône du folklore nippon et à la rendre plus acceptable et plus attachante en remplaçant un héros asiatique par un blanc au sourire ultra-bright. Ce serait néanmoins faire fausse route et se méprendre sur le fonctionnement intrinsèque du cinéma d’exploitation, depuis toujours friand d’expérimentations et de mélanges (aussi incongrus soient-ils) dans le simple but de perpétuer une formule lucrative, de « l’épicer », afin de donner au spectateur l’illusion de la nouveauté et de lui soutirer quelques précieux billets verts au passage
Conscient du pouvoir de fascination de la culture asiatique en général, et japonaise en particulier sur le public anglo-saxon et européen (d’On ne vit que deux fois à la série Shogun en passant par Soleil Rouge, comment lui donner tort?), le ponte de la Cannon ne cherchent dans les faits qu’à exploiter un filon, potentiellement très rentable, et à maximiser ses chances. La ninjasploitation, Menahem Golan s’y colle donc dès 1981 en réalisant lui-même L’Implacable ninja, faisant de l’italien Franco Nero son premier « ninja blanc ». Ironie du sort, les retours du public s’avèrent bien plus favorables à l’encontre de Sho Kosugi tandis que la crédibilité de notre Django préférée, shurikens en main, est sérieusement mise en doute. Sans aucune volonté de continuité ou de cohérence, Ultime Violence et Ninja III, deux séquelles réalisées par Sam Firstenberg, capitalisent alors sur la popularité naissante de Kosugi en faisant un peu tout et n’importe quoi et en allant même jusqu’à faire de Lucinda Dickey, l’ancienne danseuse et star du film musical Breakin‘ (une production Cannon, évidemment), une prof d’aérobic possédée par l’esprit d’un ninja versé dans la magie noire ! Mais Golan est encore loin d’avoir renoncé à son concept du ninja blanc. Il ne lui manque plus que l’acteur idéal.
La gueule de l’emploi
Ayant essuyé plusieurs refus de Chuck Norris, peu enthousiaste à l’idée de dissimuler ses traits virils derrière le masque et la cagoule du ninja, Menahem Golan renonce à employer une star et jette son dévolu sur un inconnu nommé Michael Dudikoff, ancien mannequin et natif de Californie, fraîchement reconverti au cinéma (on peut l’apercevoir, à condition de ne pas cligner des yeux, dans Tron et Retour vers l’enfer de Ted Kotcheff). Blond aux yeux bleus et athlétique, un physique de surfeur, charismatique, Dudikoff est en effet taillé sur mesure pour le rôle de Joe Armstrong, troufion taiseux et solitaire et initié aux techniques ninja dans son enfance (bien qu’il n’en garde pas le moindre souvenir). Écrit à plusieurs mains par des mercenaires plus ou moins anonymes, le scénario entoure notre héros d’un sidekick noir et baraqué (l’atypique Steve James), d’un bouffon (Phil Brock) et d’un mentor (John Fujioka), lui paie une romance cucul à base de ballades en moto et de couchers de soleil avec la fille du général (la toute mimi Judie Aronson, vue dans Vendredi 13 – Chapitre Final et chez John Hughes dans Une Créature de rêve) et le lance aux trousses d’un duo de salopards, un trafiquant d’armes très très méchant (il a des lunettes de soleil, des putes, une grande piscine et un accent ridicule) et son bras droit, un ninja maléfique avec une étoile noire (!) tatouée sur la joue et tout plein de gadgets cachés dans son kimono.
Collaborateur fidèle de Menahem Golan et de Yoran Globus, Sam Firstenberg ne se soucie guère du réalisme des péripéties qu’il met en image et enfile comme des perles les clichés les plus éculés qui soient avec un enthousiasme communicatif. D’une naïveté à toute épreuve, American Ninja se calque sur le cahier des charges d’un double épisode de L’Agence tous risques et anticipe avec un an d’avance sur le patriotisme cinoque des dessins animés M.A.S.K. et Rambo : The Force of Freedom. Malgré un budget d’1 million de dollars tout juste, il y a de l’action à revendre et peu importe que les doublures soient bien visibles (surtout avec une copie haute-définition!), que les combats soient mous du slip ou que chaque pirouette de ninja soit étirée à l’infini par des ralentis en contre-plongée au parfum de sentai au rabais. Quant à la direction artistique, impossible de passer sous silence le zèle du décorateur qui s’est employé à recouvrir chaque mur de la caserne militaire où évoluent les protagonistes de portraits de Ronald Reagan et de John Wayne et de posters avec des blondes peroxydées à forte poitrine ! Une certaine idée du bonheur.
Avec American Ninja, on en a donc pour son argent et tant pis si la date limite de consommation d’un tel divertissement semble dépassée depuis belle lurette. Ce sera toujours plus drôle et beaucoup moins prétentieux que l’entraînement ninja de Bruce Wayne dans Batman Begins !
Image
Comme les anglais de 88 Films et les américains d’Olive Films, les petits français d’ESC Éditions ont fait le choix d’exploiter le très beau master restauré fourni par la MGM. Ce qui nous donne une image absolument irréprochable, débarrassée du moindre défaut, propre, colorée et très bien définie, surtout lors des scènes en pleine jungle ou de l’attaque nocturne de la caserne militaire. Seul souci, corrigé depuis par un échange de disques organisé par l’éditeur, l’image se fige brièvement à chaque passage à un nouveau chapitre.
Son
Un très léger souffle sur les deux mixages proposés, lesquels se retrouvent au coude à coude en terme de dynamique et de clarté. La piste originale, moins encombrée par le doublage, donne sans doute une plus grande impression d’ouverture mais sa concurrente franchouillarde a du répondant sur les scènes d’action et un bonus nostalgie avec une tradition qui accentue encore un peu plus le côté bis de l’entreprise.
Interactivité
Simple mais efficace et exhaustive. Un entretien avec Laurent Aknin revient en détail sur la mode du ninja américain dans les années 80 en ciblant la Cannon et les franchises menées par Sho Kosugi et Michael Dudikoff mais n’oublie pas au passage les inoubliables arnaques sur pellicule de Godfrey Ho et ses nombreux films de ninjas montés autour d’une poignée de scènes tournées par ce pauvre Richard Harrison. Récupéré du blu-ray US, un making-of rétrospectif avec le réalisateur Sam Firstenberg, Michael Dudikoff, Judie Aronson, le responsable des cascades et des scènes d’action Steve Lambert ainsi que l’un des scénaristes, étanche notre soif d’anecdotes et d’infos précieuses sur la fabrication très artisanale du film.
Liste des bonus
« Le ninja américain des années 1980 » : entretien avec Laurent Aknin, critique de cinéma, « La jungle de tous les dangers » : Making-of, Bande-annonce d’époque.