ADIEU POULET
France – 1975
Support : UHD 4K & Bluray
Genre : Policier
Réalisateur : Pierre Granier-Deferre
Acteurs : Lino Ventura, Patrick Dewaere, Victor Lanoux, Julien Guiomar, Pierre Tornade, Claude Rich, Claude Brosset…
Musique : Philippe Sarde
Image : 1.66 16/9
Son : Français DTS HD Master Audio 2.0
Sous-titres : Français pour sourds et malentendants
Durée : 92 minutes
Editeur : Rimini Editions
Date de sortie : 5 juin 2024
LE PITCH
Le commissaire Verjeat, aidé de son adjoint Lefèvre se bat contre la corruption de sa ville, à la veille de nouvelles élections. Mis sous pression, il partira en donnant un coup de pied dans la fourmilière…
The French Detectives
Carton plein en salle et imparable classique des grandes soirées télé de TF1, Adieu Poulet est définitivement un vrai classique du polar à la française. Un film carré, efficace, sans trop de frivolité, mais aux dialogues souvent pointus, à la trame accrocheuse et doté d’un duo inédit mais imparable : Lino Ventura et Patrick Dewaere.
Rabroué par l’insuccès de son précédent La Cage qui tentait de montrer des contours plus faillibles de son personnage dans une curieuse histoire de couple séparé et de séquestration maladive, Lino Ventura décide de vite revenir à ses fondamentaux pour garder l’attention du grand public. Retour donc à un personnage de flic à l’ancienne, bourru, froid, direct et toujours prompte à se mettre dans les emmerdes pour assouvir son devoir, dans une nouvelle adaptation d’un ouvrage de Jean Laborde (Le Pacha, Peur sur la ville, Mort d’un pourri…) servi cette fois-ci par le scénariste Francis Weber à l’adaptation. Sous les directives de l’acteur, le futur réalisateur du Diner de con attendrit légèrement cette nouvelle plongée dans la dure vie des flics lambdas confrontés aux petits mondes des politiques corrompus et des petites manœuvres hiérarchiques, et il ne peut s’empêcher de délivrer deux scènes très gagesques (un lancé de Hare Krishna mémorable, un patient malchanceux en plein milieu de la seule poursuite du film) et surtout d’expérimenter les contours du buddy movie hexagonal. C’est que Ventura, certes personnage centrale et tête d’affiche, n’est pas seul à l’écran et partage la lumière avec le jeune Patrick Dewaere, tout juste révélé par le révolutionnaire Les Valseuses, idéal dans la défroque d’un jeune flic plus blasé, tête brulée et grande gueule, dans les yeux duquel on va voir naitre une véritable admiration pour son collègue et mentor.
« Vergeat, il est à Montpellier, Vergeat »
Toutes proportions gardées, on descelle déjà dans les précisions de quelques échanges dialogués, dans l’équilibre construit autour du binôme et leurs sourires souvent complices, les premières pierres des futurs La Chèvre, Les Compère et Les Fugitifs. Il faut reconnaitre que si les deux acteurs restent déjà bien installés dans leurs personnages respectifs, ils forment effectivement une émulsion particulièrement réussie, symbole de deux générations (de flics et d’acteurs) collaborant avec plaisir et offrant justement une légère distance avec une trame policière typique de son époque (les flics seuls contre tous) que certains auraient traité avec plus de noirceur et de sérieux, mais qui vire là au divertissement franc et populaire. Pari réussi tant Adieu Poulet est un modèle de ce très attachant savoir-faire français de l’époque, admirablement habité par un casting de seconds couteaux imparables (de Claude Rich en procureur tenace à Victor Lanoux en politicard cynique), porté par une partition ferme signée Philippe Sarde et surtout emballé avec efficacité par Pierre Granier-Deferre. Un réalisateur longtemps conspué pour son appartenance justement à une vieille garde de la réalisation, très loin des ambitions formelles de la Nouvelle vague, mais qui a abordé tous ses films avec la modestie de l’artisan et une discrétion éprouvée. Aujourd’hui ses adaptations de Simenon (Le Chat, La Veuve Couderc, Le Train…) sont considérées à juste titre comme les plus réussies, et l’ensemble de sa filmographie parait d’une solidité admirable, à l’image de cet Adieu Poulet, rythmé, sans trop de gras, capturant admirablement son époque et offrant systématiquement un plateau idéal pour ses acteurs.
Non Adieu Poulet n’est pas un chef d’œuvre du genre et n’est pas fondamentalement novateur, mais on ne s’en lasse pas et le plaisir reste intact jusqu’à ce petit final à l’ironie mordante mais asséné avec une sécheresse bien sentie.
Image
Sorti en 2018 en édition Bluray limitée chez TF1 Vidéo mais rapidement épuisé et revendu à prix prohibitif, Adieu Poulet revient cette fois-ci chez Rimini Éditions et avec un disque UHD en prime. Idéal pour véritablement profiter de cette restauration 4K déjà très appréciée sur le Bluray précédent, mais bien mieux mise en valeur ici par une définition bien plus ferme et creusée et un traitement encore plus riche des couleurs et de leurs dégradés. Un rendu extrêmement naturel, élégamment cinématographique avec son grain harmonieux et ses argentiques éclatants pour une source de toute façon irréprochable.
Son
La piste sonore est toujours agréable, joliment nettoyée et s’inscrit avec clarté au sein d’un DTS HD Master Audio 2.0 clair et sobrement dynamique sans aucun (ou presque) signe de l’âge.
Interactivité
Fourreau cartonné, double boitier scanavo classique, Rimini réédite donc ce classique du polar français avec son sérieux habituel reprenant les suppléments des sorties précédentes. A commencer par la présentation du film par Clélia Ventura qui délivre quelques souvenirs de son père autour de la production de ce film, entre son implication dans l’écriture et la production, sa relation tendre avec le réalisateur et les équipes, sa rencontre plus explosive avec Dewaere et son appréciation du résultat final. Suis une interview de Francis Veber, revenant sur cette première partie de carrière en tant que scénariste, son expérience parfois difficile sur Adieu Poulet en partie à cause d’un Ventura maniaque sur sa propre image, et dérive très volontiers sur le statut de scénariste et d’auteur, sa volonté déjà marquée de passer à la réalisation, laissant affleurer un égo toujours très présent qui l’incite à égratigner ses collaborateurs réalisateurs au passage.
Rimini y ajoute (comme toujours) deux items de son cru avec en premier lieu une longue analyse du film par Luc Arriba qui s’efforce de redorer le blason de Pierre Granier-Deferre en évoquant l’ensemble de sa carrière et une certaine vision de son époque que l’on retrouve de films en films question justement de dépasser le label « qualité française ». Il délivre aussi quelques anecdotes connues sur le tournage, revient sur les acteurs ou le producteur Alexandre Mnouchkine.
Mais le petit trésor de l’édition provient des archives belges avec une interview décontractée de Lino Ventura et Pierre Granier-Deferre pour la télévision dans laquelle ils discutent bien entendu du film, des personnages, du monde policier mais aussi du statut d’acteur et de « vedette ». On sent Ventura parfois un peu agacé par la bêtise de certaine question mais cela rajoute beaucoup de charme au moment.
Liste des bonus
Interview d’époque Lino Ventura et Pierre Granier-Deferre (archives RTBF, 1976, 11’), Interview de Luc Arriba, auteur journaliste (30’), Présentation du film par Clélia Ventura (8’), Présentation du film par Francis Veber (21’), Bande-annonce originale.