À COUPS DE CROSSE
Fanny Pelopaja – France, Espagne – 1984
Support : Bluray
Genre : Policier
Réalisateur : Vicente Aranda
Acteurs : Bruno Cremer, Fanny Cottençon, Francisco Algora, Berta Cabré, Ian Sera
Musique : Manel Camp
Image : 1.85 16/9
Son : Français DTS HD Master Audio 2.0 (inserts espagnols sur version longue)
Sous-titre : Français (partiels)
Durée : 91 minutes
Distributeur : Le Chat qui fume
Date de sortie : 31 décembre 2022
LE PITCH
À Barcelone, l’inspecteur Andrés Gattino cherche par tous les moyens à récupérer un important stock d’armes dissimulé par Manuel, détenu en prison et qui refuse de parler. Cependant, lorsque le policier arrête une jeune femme coupable de vol dans un magasin, il pense parvenir enfin à son but, celle-ci n’étant autre que Fanny Pelopaja, la maîtresse de Manuel. Si, dans un premier temps, elle accepte de collaborer, Fanny semble néanmoins avoir d’autres projets en tête…
Dans les dents !
Coproduction franco-espagnole, A coup de crosse est un nouveau film coup de poing de Vicente Aranda (Amants), polar nihiliste et nauséeux où l’habituel affrontement entre le flic et la braqueuse tourne aux jeux ambiguë et malsain.
Cinéaste espagnol assez peu connu en France, Vicente Aranda a toujours mis en avant dans ses long métrages un regard franc et acérée sur la société espagnol, souvent mêlé de violence et de sexe. Une vision intensément politique qui l’obligea naturellement souvent à biaiser pour continuer à exister quitte à se livrer à quelques séries B plus commerciales comme La Marié Sanglante. Mais les choses se délient enfin depuis la fin des années 70 et la mort de Franco, et après avoir exploré de manière très avant-gardiste la question de la transsexualité dans Je Veux être une femme avec une toute jeune Victoria Abril, il semble trouver dans le roman Prótesis d’Andreu Martín matière à exorciser les années de plombs et à vomir sans vergogne sur un monde puant incapable de tirer un trait sur ses pires années. A coup de crosse est donc un polar typique des années 80 avec sa photo granuleuse, sa morale grisâtre, son scénario au ras du bitume et de sa dureté qui vient rejouer l’affrontement fanatique d’un flic droit dans ses bottes et d’une jeune truande, spécialiste des braquages, sauf qu’ici leur opposition se trouble d’une relation d’attirance-répulsion des plus déstabilisante. Le flic est un pire ripoux de la pire espèce (Bruno Cremer massif et animal) qui n’hésite pas à la brutaliser, à la violer, et à exécuter son amants avant de la massacrer à coup de crosse et l’envoyer en prison.
Jusqu’à la garde
Récit d’une vengeance plus que méritée donc, sauf que Fanny (Fanny Cottençon pas toujours si à l’aise dans sa défroque de bad-ass en cuir) souffre tout autant d’un désir purement physique, d’un besoin de domination sous la coupe de ce monstre ordinaire. Une relation déviante, une passion auto-destructrice partagée où, connaissant les ambitions idéologiques du cinéaste, on ne peut s’empêcher d’y voir une métaphore des rapports inavouables entre la population espagnoles et son passé fasciste. Car Andrés Gattino n’est pas qu’infâme avec la protagoniste, mais se montre tout aussi enclins à hurler sur sa famille, à humilier ses proches et amis où à exécuter sommairement les témoins, après avoir violé la pauvre dame avec son arme. L’incarnation du petit capot, sadique, machiste et puant. Une sorte de fantôme d’un monde qui aurait dû disparaître mais qui persiste sans doute parce-que l’Espagne n’a justement jamais fait le procès des années Franco. Une œuvre forcément mal aimable et désespérément jusqu’au-boutiste, toujours plus attirée par la description d’un décors décadent et crade (Barcelone dans ses environnements les moins touristiques), de situations sordides, que dans la mise en place plus carrée et musclée d’un polar simplement divertissant.
Hard Boiled et douloureux, mais pas forcément aidé par une post-synchronisation française assez mal mixée et à la direction très inégale venant trop souvent amenuiser l’efficacité et la crédibilité des scènes. Le jeu de la coproduction plaçant deux acteurs français, un immuable, l’autre plus fragile, au milieu d’un environnement et d’un casting totalement ibérique n’a pas été une opération vraiment payante ici.
Image
Nouvelle restauration inédite pour Le Chat qui fume avec A Coups de crosse, manifestement effectuée à la source et, comme toujours, avec beaucoup de soin. Le travail est évident sur la tenue des cadres, propres et stables, mais aussi sur des teintes certes toujours sombres, mais solidement contrastées et un respect immuable de la nature de pellicule. Il faut dire que celle-ci met en avant une esthétique sale, rugueuse, voir floconneuse, qui correspond parfaitement à l’identité du film. Brut et pas lisse pour un sou donc.
Son
On ne trouve ici que la version française, post-synchronisée donc, disposé dans un DTS HD master Audio 2.0 inédit. Le rafraîchissement ne suffit malheureusement pas à rattraper les soucis de mixages initiaux avec un son sourd et des voix qui semblent toujours détachées. Appréciable uniquement dans les quelques scènes exclusives, la piste espagnole parait nettement plus naturelle et énergique.
Interactivité
Digipack trois volets, fourreau cartonné du meilleur effet et sur le disque, une rencontre avec Fanny Cottençon enregistrée pour l’occasion par l’éditeur. L’actrice se remémore quelques souvenirs de tournage, sa rencontre avec l’impressionnant Cremer et plus généralement un métrage qui tranche plutôt avec le reste de sa filmographie. Elle regrette ainsi sa sortie peu reconnue et note une œuvre qui se tient toujours aussi bien.
L’autre supplément de l’édition est la possibilité de voir le film dans son montage intégral, soit espagnol, doté de quelques détails plus crus et brutaux, et de quelques détails dialogues supplémentaires. Étrangement l’éditeur a fait le choix de ne le proposer qu’avec une version française entrecoupée d’inserts espagnols pourtant beaucoup plus maîtrisés dans le jeu, la où une version originale complète aurait largement été apprécié. Dommage.
Liste des bonus
Dans les dents, avec Fanny Cottençon (13′), Montage espagnol du film en français (certaines parties sont en espagnole sous-titrées français) (101′).