THE SADNESS
哭悲 – Taiwan – 2021
Genre : Horreur
Réalisateur : Rob Jabbaz
Acteurs : Berant Zhu, Regina Lei, Tzu-Chiang Wang, Emerson Tsa, Wei-Hua Lan, Ralf Chiu
Musique : TZECHAR
Distributeur : ESC Distribution
Date de sortie : 06 juillet 2022
LE PITCH
Après un an de lutte contre une pandémie aux symptômes relativement bénins, une nation frustrée finit par baisser sa garde. C’est alors que le virus mute spontanément, donnant naissance à un fléau qui altère l’esprit. Les rues se déchaînent dans la violence et la dépravation, les personnes infectées étant poussées à commettre les actes les plus cruels et les plus horribles qu’elles n’auraient jamais pu imaginer…
Rape Me Again !
A l’heure d’un cinéma aseptisé et sans grande aspérité, la promesse d’un film assumant son statut d’œuvre mal élevée, ouvertement gore et décomplexée bénéficiant d’une sortie salle est une opportunité qui ne se manque pas. D’autant plus lorsque le film en question tient un bon paquet de ses promesses.
Au demeurant, l’hypothèse d’avoir à découvrir un énième film de contaminés peut refroidir au premier abord. Mais The Sadness balaie bon nombre d’à priori très rapidement tant le film de Rob Jabbaz impose d’emblée un ton premier degré totalement séduisant. De fait, The Sadness progresse continuellement sur une ligne de crête entre les références, les passages obligés du genre d’un côté et une volonté de proposer quelques alternatives de l’autre. Alors que le film débute dans le calme et l’intimité de la chambre à coucher d’un jeune couple, de brefs signaux semblent indiquer un dysfonctionnement, une réalité/un quotidien qui déraille. La principale singularité du film de Rob Jabbaz réside dans la « motivation » de ses infectés, le mal qui les ronge et les rend violents et incontrôlables. Mais surtout qui les conduit à répondre à des instincts primaires autres que le cannibalisme puisqu’ils agressent sexuellement, violent et torturent pour assouvir leur soif de sang et de sexe. C’est ce qui différencie en premier lieu The Sadness des autres films d’infectés, ce qui ressemble à une forme de conscience qui leur dicte leurs actes, et les fait prendre un véritable plaisir à semer le chaos autour d’eux. Partant, The Sadness remplit largement son contrat de film d’horreur graphique et (très) sanglant. A ce titre, le réalisateur assure quelques séquences d’une efficacité totale qui ne devraient pas tarder à devenir culte : le massacre dans le métro, d’une sauvagerie inouïe, l’agression brutale dans le fast-food et l’orgie de l’hôpital sont autant de morceaux de bravoure pas avares en débordement de barbaque et d’hémoglobine.
Eat Me Too !
Le film brode par ailleurs un discours bien dans l’air du temps, puisqu’entre les lignes, et à l’heure de MeeToo, on peut y lire des attaques à peine dissimulées et plus ou moins subtiles sur le patriarcat, le machisme, avec des symboles sexuels explicites : les représentations phalliques, les allusions au sexe féminin sont légion. Comme si tous les frustrés sexuels prenaient le pouvoir et pouvaient agir en toute impunité. Quelques charges contre le pouvoir en place et l’inefficacité d’intervention des autorités sanitaires sont également au programme, ça ne mange pas de pain. Tout cela confirme une belle générosité de ton et de forme de la part de Rob Jabbaz, même si The Sadness s’essouffle malheureusement au bout d’une bonne heure de métrage. L’efficacité et la modestie de l’entreprise s’étiolent progressivement dans la deuxième partie du film. Alors que le réalisateur apporte un éclairage sur les faits et exactions des infectés, qui ne répondent qu’à des instincts déréglés mais bel et bien humains, l’explication ne convainc guère et surtout, donne lieu à un dernier acte bavard au possible, donnant la sensation que Jabbaz ne sait pas vraiment comment boucler son film. Rien de dramatique néanmoins, car The Sadness déborde de générosité et de savoir-faire. Classique, simple et efficace. Sur grand écran qui plus est !