THE GORGE
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Etats-Unis – 2025
Genres : Comédie romantique, Horreur
Réalisateur : Scott Derrickson
Acteurs : Miles Teller, Anya Taylor-Joy, Sigourney Weaver, William Houston, Sope Dirisu…
Musique : Trent Reznor et Atticus Ross
Durée : 127 minutes
Distributeur : Apple TV+
Date de sortie : 14 février 2025
LE PITCH
Deux agents surentraînés sont affectés à des postes de garde dans des tours situées des deux côtés d’un vaste gouffre secret, afin de protéger le monde du mal mystérieux qu’il renferme. Nouant des liens malgré la distance, les deux agents doivent rester vigilants face à cet ennemi invisible. Mais lorsque la menace cataclysmique pour l’humanité leur est révélée, ils devront faire équipe pour maintenir le secret à l’intérieur du gouffre avant qu’il ne soit trop tard.
L’Appel des profondeurs
Sorti en pleine Saint-Valentin sur Apple TV+, The Gorge de Scott Derrickson est une proposition de film hybride qui jongle avec les genres et constitue autant une vitrine qu’un terrain de jeu idéal pour ses deux comédiens principaux.
Toujours se méfier des High Concept. L’annonce de The Gorge, réalisé par Scott Derrickson et porté par Apple TV+, sentait bon le traquenard. En dépit des qualités généralement inhérentes aux production de la plateforme à la pomme, il faut bien le reconnaître, ce film volontairement insaisissable en termes de genres et de catégories semblait bien partie pour figurer dans les tops des initiatives foireuses. Force est de constater que sans tutoyer les sommets de la plateforme de streaming, The Gorge n’est pas déplaisant et parvient à équilibrer in-extremis sa drôle de promesse initiale. Le film suit deux snipers de très haut niveau, interprétés par Anya Taylor-Joy et Miles Teller, engagés pour surveiller les deux côtés opposés d’un gouffre mystérieux. Les deux agents se rapprochent progressivement et très étroitement, en dépit des injonctions de leurs supérieurs de ne jamais entrer en contact. Jusqu’à ce que le Mal tapi dans les profondeurs du gouffre refasse surface… On le voit à ce simple pitch, ce film événement, mis en ligne le jour de la Saint-Valentin 2025, brasse les genres et les tons. Débutant et s’achevant comme un récit d’action et d’espionnage, le scénario bifurque dans plus de légèreté et s’empare des codes de la comédie romantique. On y sourit pas mal et l’alchimie évidente entre Miles Teller et Anya Taylor-Joy fait le job, condition sine qua non d’une rom-com réussie. Le cadre singulier et les contraintes environnementales qui s’imposent aux deux tourtereaux constituent un terreau assez intéressant pour le scénariste Zach Dean et le réalisateur Scott Derrickson. Voir à ce titre les échanges par messages interposés, qui ouvrent à une partie du film totalement muette. Bonne idée. D’autant que se joue en filigrane une menace sourde et inconnue, provenant des profondeurs de ce gouffre embrumé, dissimulant un mystère bien palpable et qui assure une véritable attente pour le spectateur. Tout au long de sa première partie, The Gorge fonctionne plutôt bien et remplit son contrat.
Un pur produit de plateforme
A mi-chemin, le film bascule et s’engage frontalement vers le genre horrifique, lorsque les deux personnages se retrouvent coincés au cœur de la faille, plongeant la tête la première vers les emmerdes et sont confrontés à des créatures monstrueuses. Le film pivote alors vers le survival-horror pur jus aux forts accents vidéoludiques. Un rapprochement vers le jeu vidéo assez évident puisque les gamers sauront y trouver des influences piochant allègrement vers une imagerie tirée de Resident Evil ou The Last of Us. Et là, le film s’avère beaucoup moins convaincant, proposant un univers déjà vu, visuellement assez peu audacieux et s’embourbant dans des péripéties mécaniques un peu vaines, éjectant du même coup toute implication du spectateur. Une parenthèse horrifique traitée comme une récréation à la cool. Bref, les raisons du chaos ici-bas sont bien moins passionnantes que ce que le mystère semblait enclin à laisser entrevoir. L’aspect complotiste d’un final précipité achève de laisser un goût amer dans la bouche et c’est donc un sentiment mitigé qui préside à l’issue de la vision de The Gorge. Entre l’abus de CGI et le tournage sur fond vert apportant une touche artificielle et peu esthétique (notamment dans la seconde partie), le film semble cocher toutes les cases du film de plateforme, tout en sous-employant totalement Sigourney Weaver venue toucher son chèque. C’est dommage, mais on peut aussi retenir l’investissement des deux comédiens, le savoir-faire de Scott Derrickson, auteur rappelons-le de l’excellent Sinister (même si ça date un peu), ou la superbe composition musicale de Trent Reznor et Atticus Ros.
The Gorge demeure donc un produit de plateforme qui se voudrait audacieux et malin, mais qui s’avère finalement prisonnier de son concept et un peu trop scolaire, jouant toutes ses cartes sur son casting et ses quelques bonnes idées de mise en scène. Ce qui n’est déjà pas mal si on se donne la peine de voir le verre à moitié plein et qu’on laisse ses exigences de côté.