TEDDY
France – 2020
Genre : Horreur, Comédie
Réalisateur : Ludovic Boukherma, Zoran Boukherma
Acteurs : Anthony Bajon, Christine Gautier, Noémie Lvovsky, Ludovic Torrent, Guillaume Mattera…
Musique : Amaury Chabauty
Durée : 88 minutes
Distributeur : The Joker Films
Date de sortie : 03 novembre 2021 (VOD)
LE PITCH
Dans les Pyrénées, un loup attise la colère des villageois. Teddy, 19 ans, sans diplôme, vit avec son oncle adoptif et travaille dans un salon de massage. C’est un été ordinaire qui s’annonce. Mais un soir de pleine lune, Teddy est griffé par une bête inconnue.
I’m a teenage werewolf
2021, belle année pour le cinéma fantastique à la française (comme quoi !) où l’on aura même vu apparaître un loup-garou bien de chez nous, hurlant à lune dans un patelin paumé des Pyrénées. Fièrement présenté à Cannes ou à l’étrange festival, sorti timidement dans les salles, la bête devrait se refaire en VOD et Bluray.
Déjà à l’œuvre sur Willy 1er, les jumeaux Ludovic et Zoran Boukherma ont une vraie passion pour les figures de marginaux, les personnages à-côté qui peinent tristement à exister aux abords du reste du troupeau. Ado sans diplôme, sans avenir (même s’il y croit) et pas forcément fute-fute, Teddy est brillamment présenté comme le mouton noir du coin dès la première séquence : une belle cérémonie devant le monument au mort, solennelle, où Teddy ricane bêtement dans son coin avant de faire scandale croyant à une mauvaise orthographe du nom de son grand-père. Expédié manu militari, Teddy fait tache. Mais les réalisateurs aiment Teddy à qui ils offrent une poésie rurale un peu tragique, pathique, souvent drôle, voir même une place de vrai héros candide soit, inculte certainement, mais terriblement romantique, survivant dans un monde hostile grâce à son amour inconditionnel envers la belle (?) Rebecca. Seule lumière dans une vie bien triste. Toujours sur le fil, ne tombant jamais dans la caricature, préférant une tonalité acide et cruelle, Teddy (le film) ne distille finalement ses atours fantastiques qu’avec beaucoup de parcimonie et de hors-champs. Pour des questions économiques certainement puisqu’un loup-garou crédible sur grand écran n’est aujourd’hui pas chose si aisé, mais aussi pour préserver cet étrange équilibre entre la description d’un quotidien enchanté à la Bruno Dumont, une esthétique lumineuse à la NWR et une mythologie horrifique accompagnée de ses propres codes indécrottables et de sa longue métaphore filée.
Teddy au loto du diable
La transformation, naturellement progressive et essentiellement à base de pilosité envahissante, est certes moquée par les autres, mais souligne chez Teddy une métamorphose plus profonde, celle de la découverte violente de sa place dans le monde, et de la dure réalité de celui-ci. Quitte d’ailleurs à faire douter subtilement sur la certitude de cette lycanthropie. Pas étonnant alors que le film déraille totalement lorsqu’il découvre sa belle dans les bras du beau-gosse winner du coin (et fils de notable bien entendu), se dirigeant alors vers un massacre en règle lors d’un loto de toutes façons ennuyeux. Un peu comme une version franchouillarde et totalement assumée du Carrie de Brian De Palma (dont il reprend une partie de la structure), mais où apparaît tout de même les petites limites du film. Souvent bien vu, élégamment mis en scène, pertinent dans sa réinterprétation de la chronique adolescente, Teddy manque peut-être d’un peu plus de hargne refusant de s’engouffrer dans le brûlot social plus enflammé, dans l’humour plus viscéral (on est à la limite de Dupontel parfois) et surtout dans une exposition horrifico-gore plus rentre-dedans. Une petite timidité qui n’entame en rien la singularité réjouissante, voir salvatrice, de Teddy venant confirmer au passage les talents indéniables du jeune Anthony Bajon (La Prière, La Troisième guerre) parfait en sacrifié du terroir, en Teen Wolf aux fêlures béantes.