SHAUN OF THE DEAD
Royaume-Uni – 2004
Genre : Comédie, Horreur
Réalisateur : Edgar Wright
Acteurs : Simon Pegg, Nick Frost, Kate Ashfield, Lucy Davis, Dylan Moran, Bill Nighy…
Musique : Daniel Mudford, Pete Woodhead
Durée : 99 minutes
Distributeur : Carlotta Films
Date de sortie : 30 octobre 2024
LE PITCH
Shaun mène une existence sans relief. Ce vendeur sans réelle ambition passe ses journées avec son colocataire Ed dans leur pub habituel, le Winchester. Lassée par son manque de sérieux, Liz, sa petite amie, choisit de le quitter. Shaun décide alors de reprendre sa vie en main. Mais une invasion de zombies frappe Londres, plongeant la ville dans la panique. C’est l’opportunité pour Shaun de prouver sa valeur et de tenter de reconquérir Liz.
Zombie, vous avez dit zombie ?
Sorti il y a vingt ans, Shaun of the Dead d’Edgar Wright reste un monument de la comédie horrifique. Mêlant humour britannique et hommage appuyé aux classiques de l’horreur, le film continue de conquérir de plus en plus de fans année après année, consolidant ainsi son statut de référence incontournable du genre. Bref, une œuvre culte !
Si le film d’Edgar Wright a débarqué la même année que L’Armée des Morts de Zack Snyder un peu partout dans le monde, marquant ainsi le revival des zombie flicks, il est arrivé sur les écrans français avec une petite année de retard, à l’été 2005. Ce décalage l’a d’ailleurs amené à se retrouver face au nouvel opus de George A. Romero, Land of the Dead, dans lequel Wright et Simon Pegg apparaissent dans un caméo. Et dans cette décennie où le zombie allait être décliné sous toutes les coutures (Bienvenue à Zombieland, The Walking Dead, Warm Bodies… attention à l’indigestion !), cette proposition d’outre-Manche surplombe largement cette marée de morts-vivants.
Shaun of the Dead réussit le pari d’être une vraie comédie sans trahir les codes du film de zombies. Simon Pegg, également co-scénariste, incarne Shaun, un trentenaire sans perspectives dont la vie monotone est soudain chamboulée par une épidémie jusqu’alors inconnue. Poussé à protéger ses proches, il embarque sa petite amie Liz (Kate Ashfield) et son vieux pote Ed (Nick Frost) dans une lutte pour leur survie. Sous la direction de Wright, le film n’hésite pas à pousser le gore sans perdre son humour acide, avec des moments de tension où transparaît tout le respect du réalisateur pour Romero, mais aussi Lucio Fulci (regardez bien le nom de la pizzeria !) ou encore le jeune Sam Raimi des Evil Dead. C’est cette cinéphilie ludique qui fait la force de Wright, laquelle s’illustre à nouveau lorsqu’il introduit le fameux concept du « Fusil de Tchekhov » qui, dans son récit, se révèle être… un fusil.
The Wright place
Là où Shaun of the Dead se distingue des comédies de son époque, c’est dans la mise en scène inventive de Wright, qui laisse déjà entrevoir un talent hors norme. En regardant la suite de sa carrière avec des films comme Scott Pilgrim ou Last Night in Soho, on mesure la finesse de ce coup d’essai. Le plan-séquence où Shaun, insouciant, traverse les rues pour chercher son petit-déjeuner sans réaliser que tout autour de lui a basculé, est un bijou d’humour visuel en plus d’être fort de sens. La minutie du cinéaste est digne d’un horloger !
L’humour réside aussi en grande partie dans l’alchimie entre Simon Pegg et Nick Frost, déjà rôdés par leur collaboration dans la série Spaced (intégralement réalisée par… Edgar Wright !). Le duo fait mouche et peut compter sur le répondant d’une belle galerie de visages connus des grandes sitcom anglaises des années 90/2000 comme Dylan Moran (l’excellent Black Books), Lucy Davis (The Office UK) ou encore le désormais omniprésent Bill Nighy. Le film introduit également des gags récurrents, comme les fameux sauts de clôture, qui reviendront dans les autres volets de la trilogie Cornetto (complétée par Hot Fuzz et Le Dernier Pub avant la fin du monde). Et si on gratte un peu le vernis, on voit comment Wright explore en arrière-plan des thèmes plus sérieux, tels que la maturité et l’engagement dans une relation amoureuse, sans casser le timing comique pour imposer une moralité lourdingue.
« Ça va trancher, chérie ! »
Visuellement, Shaun of the Dead revendique une violence graphique soignée, avec des effets spéciaux qui rendent hommage aux classiques des années 70-80. Les scènes d’attaques de zombies sont saisissantes sans jamais sacrifier l’équilibre délicat entre l’horreur et le rire. Les scènes d’action, jamais trop sérieuses pour devenir purement terrifiantes ni trop comiques pour perdre en intensité, trouvent une fluidité parfaite ! La musique joue elle aussi un rôle central, comme Don’t Stop Me Now de Queen qui accompagne une scène mémorable de bagarre au Winchester, le pub emblématique du film. Cet usage malin de la bande-son est devenu une signature de Wright (coucou, Baby Driver !), amplifiant l’ambiance décalée tout en rehaussant le plaisir visuel.
Deux décennies plus tard, Shaun of the Dead demeure un sommet de comédie horrifique. Sans jamais tomber dans la caricature, Edgar Wright livre un récit sincère de fin d’« adulescence » sur fond d’apocalypse zombie, tout en insufflant un humour mordant et un style visuel jubilatoire. Aujourd’hui encore, on se laisse entraîner avec un réel plaisir dans l’univers de Shaun et ses amis, où rires, drame et terreur s’allient dans un grand « petit film » qui traverse les âges sans prendre une ride.