MONARCH : LEGACY OF MONSTERS
Etats-Unis – 2023
Genre : Fantastique, Aventures
Réalisateurs : Mairzee Almas, Julian Holmes, Hiromi Kamata, Matt Shakman, Andy Goddard
Acteurs : Anna Sawai,Kiersey Clemons, Ren Watabe, Mari Yamamoto, Anders Holm, John Goodman, Joe Tippett, Kurt Russell, Wyatt Russell, Elisa Lasowski…
Musique : Leopold Ross
Durée : 10 x 50 minutes
Distributeur : Apple TV+
Date de sortie : 12 janvier 2024
LE PITCH
Alors que San Francisco a été ravagé par l’affrontement entre Godzilla et les Titans, et que le monde a découvert l’existence concrète des monstres, « Monarch: Legacy of Monsters » suit l’histoire d’un frère et d’une sœur sur les traces de leur père qui découvriront les liens unissant leur famille à une organisation secrète nommée Monarch. Une suite d’indices les mènera dans le monde des monstres, jusqu’à retrouver un officier de l’armée, Lee Shaw.
Stranger Monsters
2023 : année de Godzilla ? Alors que Shin Godzilla débarquait enfin en vidéo en France et que Godzilla Minus One terrassait les spectateurs par deux fois dans les salles entre la fin d’année et le début de la suivante, le gros lézard traumatique japonais refait surface sur les petits écrans d’Apple TV+, avec Monarch : Legacy of Monsters, une série de dix épisodes, sous bannière américano/japonaise, dans le sillage des adaptations américaines cornaquées par la boîte de production Legendary, sous la houlette de la Toho.
La série créée par Chris Black et Matt Fraction est la nouvelle pierre à l’édifice brinquebalant du Monsterverse créé de toutes pièces par Legendary Pictures, univers étendu jetant des passerelles entre Godzilla et King Kong, dans des opus ciné d’assez triste mémoire que sont Kong : Skull Island de Jordan Vogt-Roberts (2017), Godzilla 2 : Roi des Monstres de Michael Dougherty (2019), Godzilla vs Kong d’Adam Wingard (2021), le futur Godzilla x Kong : The New Empire toujours signé Wingard (2024) et enfin la série Skull Island de Brian Duffield sur Netflix (2023). On sortira du lot l’excellent Godzilla de Gareth Edwards (2014), seul vrai film à la hauteur du phénomène. Un héritage au final assez peu glorieux à bien y regarder, que Monarch : Legacy of Monsters souhaiterait à la fois consolider, tout en ouvrant des perspectives… La série dévoile les contours de l’organisation « Monarch », un groupe secret qui travaille en sous-marin sur les monstres et autres Titans qui déferlent sur la Terre à intervalles irréguliers. A la manière du déjà tristounet Agents of Shield, qui proposait une approche différente de l’univers des Avengers, la série entend broder sur sa mythologie, apportant quelques réponses tout en posant de nouvelles questions. Pour cela, les auteurs mettent les petits plats dans les grands : une narration en parallèle sur plusieurs époques (des années 50 à nos jours), des personnages que l’on suit sur plusieurs générations, de (légers) mystères, des (mini) jeux de pouvoir, et évidemment, des (très) grosses bestioles belliqueuses. Abordons déjà les (quelques) points forts de la série, à commencer par une réalisation très « cinématographique », quand bien même le terme signifie quelque chose. Il faut lui reconnaître une touche visuelle assez classe avec son format scope plutôt bien exploité. Les créatures sont par ailleurs bien mises en avant, grâce à des SFX globalement assez réussis, ce qui ne gâche rien. Si leurs apparitions restent, certes, assez éparses, force est de constater qu’elles sont plutôt impressionnantes et chaque passage les mettant en scène leur rend justice de manière spectaculaire. Si on pourra toujours arguer qu’elles demeurent rares à l’écran, il faut se rappeler que l’intention, louable, des showrunners était de développer le côté humain de la série. Et c’est bien là que le bât blesse, car les personnages et leurs caractérisations s’avèrent terriblement décevantes.
Merveilleuses créatures, laborieux humains
Clairement, la série s’avère très inégale suivant les temporalités qu’elle décline. Si l’arc se déroulant dans les années 50 s’avère le plus intéressant et séduisant dans ce qu’il convoque de l’imagerie du film d’aventure à l’ancienne, les scènes contemporaines sont beaucoup moins emballantes. Dès son prologue, la série raccroche avec les films précédents, notamment par le biais du personnage de Bill Randa, incarné à la fois par John Goodman dans le prologue du premier épisode, en référence à Kong : Skull Island, et par Anders Holm ensuite. Mais cette histoire de famille recomposée cherchant à retrouver un père disparu ne fonctionne pas bien longtemps à cause d’une écriture laborieuse et des personnages mal dégrossis et dont on se fiche assez considérablement (mention à la hackeuse limitée à un simple personnage fonction). Face aux impondérables d’un scénario bourré de rebondissements assez peu convaincants, de raccourcis problématiques et la description d’un organisme secret se révélant pour le moins cheap et peu crédible au fur et à mesure des épisodes, difficile d’être embarqué dans cette aventure. A titre d’exemple, il faut voir comment les personnages principaux, sortes de pieds nickelés enrôlés dans une aventure qui les dépasse, sont lancés en première ligne par Monarch dans une opération militaire délicate, sans que cela ne pose un problème à qui que ce soit. Niveau effort de suspension d’incrédulité, ça se pose là. C’est d’autant plus dommage que le personnage de militaire incarné sur deux époques par les Russel père et fils est quant à lui plutôt réussi. Dans ses ultimes épisodes, la série sombre dans ce que l’on nommera de manière téméraire le « syndrome Stranger Things », avec ses jeunes héros lancés dans une quête fantastique, à base de portails vers des mondes parallèles. Des enjeux et une manière de les défendre à la portée extrêmement limitée, qui prêterait à la série une visée public essentiellement destinée à une cible adolescente et peu regardante quant à la logique de l’action.
Si on peut souligner l’ambition initiale des showrunners, qui semblent vouloir apporter une ampleur certaine à leur histoire, le résultat, tiédasse, ne tient malheureusement pas ses promesses. Extrêmement léger, Monarch : Legacy of Monsters ne saura contenter les spectateurs les plus exigeants. Quant aux adorateurs de Godzilla et autres bébêtes géantes, difficile d’être complètement sous le charme.