LONGLEGS
Etats-Unis – 2024
Genre : Thriller, Fantastique
Réalisateur : Osgood Perkin
Acteurs : Maika Monroe, Lauren Acala, Nicolas Cage, Blair Underwood, Alicia Witt, Michelle Choi-Lee, Dakota Daulby…
Musique : Zilgi
Durée : 101 minutes
Distributeur : Metropolitan Filmexport
Date de sortie : 10 juillet 2024
LE PITCH
L’agent du FBI Lee Harker, une nouvelle recrue talentueuse, est affectée sur le cas irrésolu d’un tueur en série insaisissable. L’enquête, aux frontières de l’occulte, se complexifie encore lorsqu’elle se découvre un lien personnel avec le tueur impitoyable qu’elle doit arrêter avant qu’il ne prenne les vies d’autres familles innocentes.
The Sound of Evil
Longlegs réalisé par Osgood Perkins n’a pas fait l’unanimité. Malgré quelques clichés et des soucis de rythme, le film se distingue cependant par sa mise en scène radicale, son rapport au surnaturel et son ambiance angoissante, offrant un choc esthétique marquant.
Dans la grande tradition du thriller centré autour de la traque d’un tueur en série insaisissable, Longlegs, du réalisateur américain Osgood Perkins, est une nouvelle brique placée dans l’immense muraille souvent branlante du genre. Fils d’Anthony Perkins, l’interprète d’un des maitres-étalons de la figure du serial-killer (Norman Bates dans Psychose pour les deux du fond), Oz Perkins (pour les intimes) a décidé vaillamment de se frotter à un courant du cinéma dont les réussites éclatantes (M le Maudit, Psychose, donc, Se7en, Zodiac) ne sauraient totalement effacer la luxuriante forêt des ratages et abominations qu’il a engendré. Pourtant, c’est en s’inspirant plus directement d’un des opus les plus célébrés, Le Silence des Agneaux de Jonathan Demme, que Perkins trouve la bonne accroche, sans jamais cacher son influence.
L’agent du FBI Lee Harker, une nouvelle recrue talentueuse, est affectée sur le cas irrésolu d’un tueur en série insaisissable. L’enquête, aux frontières de l’occulte, se complexifie encore lorsqu’elle se découvre un lien personnel avec le tueur impitoyable qu’elle doit arrêter avant qu’il ne prenne les vies d’autres familles innocentes…
Un malaise bien agréable
Maika Monroe (It Follows) marche ainsi dans les pas de Jodie Foster, l’agent Clarice Starling du Silence des Agneaux, jeune recrue du FBI qui se retrouve propulsée sur une affaire infernale, même si elle se démarque de son modèle en présentant un don de profilage pas totalement maîtrisé. Ce n’est pas réellement dans son scénario que Longlegs tire son épingle du jeu, c’est même son principal point faible, puisqu’il charrie tout de même un nombre invraisemblable de tropes et autres lieux communs du genre. Ni dans la description de ses personnages, eux aussi bien trop suspendus aux archétypes dont ils peinent à s’extraire. Si le film d’Oz Perkins trouve sa nature et son identité, s’il parvient à saisir à la gorge et à se démarquer malgré tout du tout-venant, c’est autant dans ses choix de mise en scène, bien souvent radicaux, que dans son approche d’un surnaturel assumé, et surtout dans sa façon de marier des angoisses typiquement 70’s à une autre période, celle des années 90. Après une séquence d’introduction absolument glaçante, ponctuée par un jump-scare d’une efficacité diabolique, le film déploie sa toile d’araignée, infusant lentement (trop diront certains), instillant un malaise à la coloration satanique ma foi bien agréable.
Bien qu’il semble se dérouler en plein cœur de la présidence Bill Clinton, c’est pourtant vers les glorieuses années 70 que lorgne le film, pour une raison très simple : Longlegs renoue ainsi avec une peur liée au satanisme directement issue des exactions de Charles Manson et ses sbires, tout en louchant assidûment vers le Polanski de Rosemary’s Baby, et le tueur du Zodiac. Difficile de faire la fine bouche face à un film qui tracte avec lui toute cette imagerie laissée de côté depuis bien longtemps. Et Perkins s’en empare avec une belle autorité, en y adjugeant un sens du cadre (et du décadrage), du montage, du son absolument diabolique et millimétré.
Habité par le Mal
Le personnage du tueur, interprété (et ce n’est pas un spoil) par un Nicolas Cage qui parvient encore à surprendre sous des couches de maquillage, fait éclore devant nos yeux ébahis un monstre de la pire espèce absolument effrayant, qui représente à lui seul les angoisses d’une société américaine déliquescente. De la même manière, le mutisme de la fliquette brillamment campée par Maika Monroe apporte un contre-point efficace et assumé. Son rapport au tueur et le lien qui se déploie entre eux n’a, une fois encore, rien de très original, mais Perkins réussit cependant à en faire un élément suffisamment tordu et déviant pour en faire un élément moteur de son récit.
Longlegs délivre quelques images tout bonnement terrifiantes et dérangeantes, comme on n’en avait pas vu sur un écran depuis, voyons… Hérédité de Ari Aster. Et bien que ses partis-pris ne soient pas tous convaincants, que certains choix scénaristiques soient sacrifiés et ne débouchent pas sur grand-chose (les énigmes du tueur), ou que l’on sente venir certains faits un peu trop rapidement, on les balaye assez facilement du revers de la main, tant le film est incontestablement un choc esthétique qui plonge le spectateur dans un inconfort et une peur bien palpable, de celle qui hante l’esprit bien longtemps après la projection. L’impression que le Mal habite chaque photogramme du film. Comme L’Exorciste de William Friedkin ou Rosemary’s Baby à leur époque. Ce qui n’est pas rien.