LE CHÂTEAU SOLITAIRE DERRIÈRE LE MIROIR
かがみの孤城 – Japon – 2022
Genre : Fantastique, Animation
Réalisateur : Keiichi Hara, Takakazu Nagatomo
Acteurs : Shingo Fujimori, Rihito Itagaki, Yûki Kaji
Musique : Harumi Fuuki
Durée : 116 minutes
Distributeur : EuroZoom
Date de sortie : 06 septembre 2023
LE PITCH
Un beau jour, le miroir dans la chambre de Kokoro se met à scintiller. À peine la jeune fille l’a-t-elle effleuré qu’elle se retrouve dans un formidable château digne d’un conte de fées. Là, une mystérieuse fillette affublée d’un masque de loup lui soumet un défi. Elle a un an pour l’accomplir et ainsi réaliser un souhait. Seulement Kokoro n’est pas seule : six autres adolescents ont le même objectif qu’elle.
La Recluse
Le réalisateur d’Un été avec Coo, Miss Hokusai et Wonderland le royaume sans pluie, Keiichi Hara revient sur nos écrans pour un nouveau conte fantastique. Mais comme souvent, derrière le mystère de conte de fée se cache un sujet bien plus profond et douloureux.
Le Château solitaire derrière le miroir est donc une nouvelle aventure fantastique dont le cinéma d’animation japonais est si friand. Une jeune collégienne découvre qu’elle peut traverser le miroir de sa chambre pour se rendre dans un lointain château mystérieux où l’attendent six autres jeunes gens. Sur place, il y est question d’une clef dissimulée dans les pièces de la demeure, de vœux à exaucer, d’une enfant au masque de loup et d’un monstre qui hanterait les couloirs pour peu qu’on ne les quitte pas avant l’heure fatidique. Cependant les héros, tout comme le récit lui-même, se désintéressent presque totalement de décorum de conte de fée (entre Le Petit Chaperon rouge et Alice au pays des merveilles). A l’instar du roman à succès de Mizuki Tsujimura (édité en France chez Milan), le film use surtout de ce point de départ pour accompagner le chemin reconstructeur de Kokoro, gamine souffrant de phobie scolaire depuis qu’une autre élève, elle appréciée par tous, l’ai humilié et terrorisée jusque chez elle. Le fameux château est donc moins un lieu de rêverie qu’un safe-space où les adolescents en question vont peu à peu reprendre goût à l’échange, au dialogue, à la camaraderie et ainsi pouvoir reprendre confiance en eux.
Thérapie de groupe
Un recentrage encore plus marqué dans l’anime qui réduit effectivement les détails visuels fantastiques au minimum et recentre presque totalement l’objet sur Kokoro et ne laissant affleurer les autres que par bribes, au grès de certains dialogues et surtout de révélations finales (non sans noirceurs) ménageant efficacement le petit twist émotionnel. On peut alors regretter que Keichi Hara ne se laisse pas aller à quelques envolées plus légères, à la découverte d’un imaginaire plus pictural et donc à quelques prouesses d’animation plus spectaculaires, mais clairement la force du métrage est cette approche délicate, pleine de pudeur et de réalisme des mécanismes du harcèlement (sous diverses formes), du cadre parfois destructeur du milieu scolaires, qui pousse certains gamins à perdre le fil, à prendre distance, souffrir et s’isoler. Des détails anodins en grande détresses décrites avec véracité qui se montrent aussi très réussi lorsque le métrage s’attarde sur les confrontations ardues et la difficultée de recréer un dialogue avec le monde adulte. La mère qui s’efforce d’être patience et cherche un nouvel établissement plus à l’écoute, le père très absent, le professeur principal à coté de la plaque qui fait plus de mal que de bien, la directrice de « l’école du cœur » qui refuse d’abandonner … Tous les personnages, même secondaires ont leur importance et le film refuse joliment les habituels clichés sur le sujet.
Avec beaucoup de tendresse et une légère poésie (plus que de fantaisie), Le Château solitaire derrière le miroir, s’empare de sujets complexes et difficiles pour en faire le sujet d’une fable moderne et humaine…. Et sans doute aussi ouvrir la discussion entre adultes et adolescents que ce soit dans le cercle familial ou éducatif.