LA NUIT DES MORTS-VIVANTS
Night of the Living Dead – États-Unis – 1968
Genre : Horreur
Réalisateur : George A. Romero
Acteurs : Duane Jones, Judith O’Dea, Karl Hardman, Russell W.Streiner, Marilyn Eastman, Keith Wayne, Judith Ridley, Kyra Schon…
Musique : George Hormel
Durée : 96 minutes
Distributeur : Les Acacias
Date de sortie : 22 février 2023
LE PITCH
Un soir, alors que Barbara et Johnny fleurissent la tombe de leur père, un homme étrange les attaque et tue Johnny. Barbara, terrorisée, s’enfuit et se réfugie dans une maison de campagne. Elle y trouve Ben et d’autres fugitifs. La radio leur apprend alors la terrible nouvelle : des morts s’attaquent aux vivants…
Horreur moderne
C’est dans une nouvelle version restaurée 4K qu’est ressorti sur nos écrans l’un des plus grands monuments du cinéma d’horreur, La Nuit des morts-vivants, un demi-siècle après sa sortie. Cauchemar intemporel et indépassable, le premier film de George A. Romero n’a (presque) pas pris une ride et demeure toujours aussi percutant.
Art mercantile s’il en est, où la loi de l’argent et des producteurs règne, le cinéma a également su consacrer des films indépendants au budget minuscule, tel ce véritable miracle cinématographique qu’est La Nuit des morts-vivants. Tourné durant les week-ends par une équipe d’amateurs avec un budget d’une centaine de milliers de dollars (dont les propres deniers de l’équipe), le film aurait sans doute été l’un des plus rentables de l’Histoire du cinéma… S’il n’était pas automatiquement tombé dans le domaine public suite à un problème de Copyright (Romero produira d’ailleurs l’excellent remake réalisé par son ami Tom Savini en 1990 pour « rattraper » le coup…).
Apprenti réalisateur pour la télévision locale de Pittsburgh, Romero décide de suivre « l’air du temps » en réalisant un film d’horreur, espérant pouvoir rentabiliser le film dans les Drive-In en cas d’échec en salles. S’inspirant plus du Je suis une légende, sorti en 1963 avec Vincent Price, que des films de zombies « sauce Vaudou » de Jacques Tourneur, le cinéaste « invente » le mort-vivant moderne et du même coup ringardise tout un pan du cinéma de genre, dont les films en costumes de la Hammer. Avec son Noir et Blanc, ses personnages lambda et authentiques ainsi que ses monstres terriblement humains, Night of the Living Dead s’éloigne au contraire du surnaturel via une approche naturaliste et réaliste.
Plus vivant que jamais
Dans un contexte politique américain particulièrement électrique, le film d’horreur de Romero inspira les analystes divers et variés, voyant en cette invasion de zombies une métaphore de la Guerre du Vietnam dans laquelle s’enlisait le pays. Sorti en 1968, quelques mois après l’assassinat de Martin Luther King, c’est de plus un afro-américain, le convainquant Duane Jones, qui tient le rôle-titre, chose rarissime à l’époque. Bien qu’ayant toujours balayé d’un revers de la main ces « analogies », le cinéaste a toujours été étiqueté à gauche et la suite de sa Saga, six fims au total, continuera de dépeindre une société américaine malade et morbide, s’en prenant au consumérisme dans Zombie (1979), puis à l’Armée et la Science dans Le Jour des morts-vivants (1986).
A la lisière du western (on songera à Rio Bravo où les protagonistes défendent un poste contre une invasion de malfrats), confinant au Huis-clos, clin d’œil à l’expressionnisme allemand via le jeu notamment de Judith O’Drea, le film dévoile aussi une réalisation soignée ponctuée d’images mémorables et une tension parfaitement transmise par une troupe de comédiens amateurs, dont aucun ne fera vraiment « carrière » dans le métier… Et un final toujours aussi glaçant, ambigu et révoltant.
Devenu un genre à part entière, le film de zombies n’est toujours pas mort et enterré 55 ans après la sortie du chef d’œuvre de Romero, comme le prouve la longévité et succès des séries spécialisées comme Walking Dead qui continuent de réactualiser le mythe. Cerise sur le gâteau, l’œuvre entière du cinéaste visionnaire est désormais réhabilitée comme le prouve l’édition récente de Bruiser, l’exhumation du marquant Amusement Park et donc cette ressortie de son premier film chapeautée par Les Acacias.