LA MAIN
Talk To Me – Australie, Royaume-Uni – 2022
Genre : Horreur
Réalisateur : Danny et Michael Philippou
Acteurs : Sophie Wilde, Joe Bird, Alexandra Jensen, Miranda Otto…
Musique : Cornel Wilczek
Durée : 95 minutes
Distributeur : SND
Date de sortie : 27 juillet 2023
LE PITCH
Lorsqu’un groupe d’amis découvre comment conjurer les esprits à l’aide d’une mystérieuse main hantée, ils deviennent accros à ce nouveau frisson, et l’expérience fait le tour des réseaux sociaux. Une seule règle à respecter : ils ne doivent pas tenir la main plus de 90 secondes. Lorsque l’un d’entre eux l’enfreint, ils vont être rattrapés par les esprits, les obligeant à choisir : à qui se fier, aux morts ou aux vivants ?
La main molle
Petit film d’horreur à sensation de l’été, La Main a pu provoquer chez certains une tendre indulgence devant les quelques errances, notamment sur le plan scénaristique, sans que cela ne gâche vraiment leur plaisir de la découverte…. Un sentiment qu’il semble bien difficile de partager, bien au contraire, face à un film d’horreur qui apparaît bien moins pertinent qu’il le souhaiterait…
Si l’Australie nous a habitué à un cinéma de genre souvent abrasif, méchant et brutal, depuis les années 70 et 80 avec des œuvres comme Fair Game de Mario Andreacchio, Long Week-end de Colin Eggleston ou encore Razorback de Russell Mulcahy et La Dernière Vague de Peter Weir, voir débarquer une série B horrifique australienne aujourd’hui reste un petit événement qui ne peut que susciter la curiosité. On pensait objectivement que ce projet des frères Philippou, distribué par A24 sur le territoire américain, pouvait s’inscrire dans cette voie. La Main semblait vouloir pervertir le genre du film d’horreur pour ados avec un peu plus d’audace que la normale. D’ailleurs, la tétanisante séquence d’ouverture, sèche, abrupte et efficace, donne à penser que ce concept d’artefact maléfique qui fait basculer ses utilisateurs dans une dimensions horrifique lors de séances de spiritisme, va proposer un traitement sans (trop de) concession. Mais on déchante vite… Vendu comme un film d’horreur méchant s’affranchissant des règles du genre, La Main ne fait guère illusion très longtemps. Entre l’intention et la concrétisation, il y a ici un écart bien trop important à combler. En termes de frissons, le film sort les rames, et justifie sa réputation radicale par deux séquences violentes comme il faut : l’introduction déjà citée, et une éprouvante scène de possession voyant un ado se fracasser littéralement la tête. Sorti de ces moments chocs : c’est le désert, on recherche la nouveauté, l’innovation promise. Nada ! Rien qu’une enfilade de scènes monotones et déjà vues mille fois, à base d’apparitions de fantômes en arrière-plan, de scènes de spiritisme et d’enchaînement de dialogues souvent abscons
Un film de petits malins
Sous couvert de proposer des personnages plus construits, moins passe-partout que la moyenne, avec un background tendu, les frangins Philippou décrivent surtout des protagonistes sans relief, déterminés par une psychologie appliquée à la truelle. Les rôles secondaires sont caractérisés par un seul trait dominant et s’avèrent uniformes et antipathiques au possible, peignant le tableau d’une jeunesse d’une crétinerie abyssale. Le plus gênant étant atteint avec Mia, le personnage principal, jeune fille plongée dans la douleur suite à la mort de sa mère, qui évite son père et a trouvé refuge dans le foyer d’une amie dont elle s’est faite une famille de substitution. Toute la noirceur, la tristesse et la fragilité du personnage est décrite sans aucune subtilité, ressassant des tas de lieux communs. Pour l’audace, on repassera ! L’écriture du film est empesée, sans originalité et dépourvue de cohérence (les actions et réactions des personnages, un carnage !). Avec sa main maléfique, le film de Michael et Danny Philippou ne fait que rejouer la participation mille fois vue de la possession et de la transmission du mal à base d’un artefact démoniaque, et prend un soin maniaque à ne jamais traiter son sujet avec une quelconque once de singularité. La volonté apparente d’aborder des thèmes générationnels comme l’addiction à la drogue ou aux réseaux sociaux n’est quant à elle que de la posture, puisque rien n’est creusé, tout est survolé. S’il faut lui reconnaître une mise en forme globalement soignée, bien que très classique, une durée resserrée appréciable et ses deux scènes chocs qui font leur effet, La Main traîne cependant trop de lacunes, en grande partie liées à son écriture maladroite et à un rythme brinquebalant, pour sortir du lot du tout-venant horrifique. Un film de petits malins bénéficiant d’une hype largement usurpée. Et on ne comprend toujours pas pourquoi A24, studio qui a pour habitude de produire des œuvres pour le moins audacieuses, voire risquées (The Lighthouse, Midsommar, The Green Knight…), s’est engagé dans ce projet mainstream au possible. Dont suite et préquelle sont déjà annoncés… Misère !