LA GARÇONNIÈRE
The Apartment – Etats-Unis – 1960
Genre : Comédie
Réalisateur : Billy Wilder
Acteurs : Jack Lemmon, Shirley MacLaine, Fred MacMurray, Ray Walston
Musique : Adolph Deutsch
Durée : 125 min
Distributeur : Les Acacias
Date de sortie : 28 août 2024
LE PITCH
C.C. Baxter, anonyme employé d’une gigantesque société d’assurances, prête son appartement comme garçonnière à son supérieur. Ce geste lui vaut une promotion mais aussi des ennuis. En effet, le soir de Noël, il découvre chez lui la charmante liftière d’ascenseur de la comédie qui a tenté de se suicider par désespoir…
When C.C. Met Franny
Ressortie dans une nouvelle copie 4K pour l’autre chef d’œuvre de Billy Wilder, signé dans la foulée de l’inoubliable et absolument réjouissant Certains l’aiment chaud avec toujours le compère Jack Lemmon. Une nouvelle comédie romantique relevée, mais La Garçonnière et son chassé croisé amoureux est cependant un divertissement moins léger qu’il n’y parait.
Pourtant, renouant avec son scénariste fétiche I.A.L Diamond – le même qui a coécrit Certains l’aiment chaud, et que l’on retrouvera aussi sur Irma La douce, La Vie Privée de Sherlock Holmes ou Avanti ! – Billy Wilder ne déstabilise pas d’emblée ses nouveaux spectateurs, préservant déjà une même esthétique noir et blanc superbe et tranchée – à l’heure où le technicolor est partout – et surtout installant à nouveaux l’immense, l’improbable, le clown triste par excellence Jack Lemmon dans la défroque d’un homme-victime. Loin des figures viriles, séduisantes et paternalistes d’Hollywood, ce dernier dépeint encore une fois le brave mec, sympas mais comme tout le monde, qui menace à chaque instant de passer totalement à coté de sa vie. Sous la rigueur drolatique des dialogues, la rythmique d’un montage montrant l’entreprise moderne comme une jolie machine un peu trop huilée, et la succession de situations qui ne cessent de venir compliquer sa petite vie de célibataire, une certaine mélancolie pointe son nez.
Un homme et une femme
Au travers du regard de Lemmon, qui semble parfois porter, avec finesse et humanité, tout le poids du monde, ou dans le triangle amoureux pathétique qu’il va jouer avec son grand patron (Fred MacMurray) qui présente bien et la charmante liftière incarnée par Shirley MacLaine. S’il envisagea un temps de reprendre la plantureuse Marilyn Monroe, il lui préféra finalement, et à raison, la frimousse adorable et le charme moderne, d’une « girl next door ». Entre les deux acteurs, dépassés, fatigués par leur solitude, presque errant parfois dans le cadre, l’alchimie est évidente, résumant par cette alternance d’énergie comique, de regard espiègle et de spleen désarmant, tout l’identité du film. Une comédie satyrique qui critique les mœurs d’une société patriarcale, une analyse brillante des mécanismes de l’industrie florissante américaine (certaines scènes font vraiment penser à Mad Men), La Garçonnière tient autant d’un drame social sur fond de lutte des classes et réussit même à traiter du suicide. Des thèmes graves mais toujours abordés en préservant, par les trouvailles de mises en scène, l’intelligence des détails et la maitrise constante du rythme, une authentique comédie, drôle, touchante et bien sentie. Un équilibre habile, presque miraculeux, entre sucrerie délicate et piquant acide, qui résonne aujourd’hui comme l’un des sommets de la carrière de Billy Wilder.
Et si 7 ans de réflexion à laissé dans les mémoires une Marilyn à la robe relevée, Certains l’aiment chaud un final « Nobody’s Perfect », La Garçonnière restera forcément présent par l’image d’un Jack Lemmon sifflotant et essorant ses pattes avec une raquette de tennis en guise de passoire. Une vision enchantée du quotidien.