CIVIL WAR
États-Unis, Royaume-Uni – 2024
Genre : Anticipation
Réalisateur : Alex Garland
Acteurs : Kirsten Dunst, Cailey Spaeny, Wagner Moura, Stephen McKinley Henderson, Jesse Plemons, Nick Offerman…
Musique : Geoff Barrow & Ben Salisbury
Durée : 109 minutes
Distributeur : Metropolitan Filmexport
Date de sortie : 17 avril 2024
LE PITCH
Dans un pays en plein chaos, une équipe de journalistes tente d’atteindre la Maison Blanche avant qu’il ne soit trop tard.
Voyage au bout de l’enfer
En quelques scénarios et en seulement trois films (sans oublier l’incroyable série Devs), Alex Garland a su imposer une véritable patte artistique doublée d’une impressionnante acuité politique et sociale. Un réalisateur de son temps, qui inclus dans chacune de ses œuvres de fiction une profonde réflexion sur le monde et nos sociétés d’aujourd’hui. Autant dire que ces principales qualités se retrouvent et se télescopent méchamment dans son quatrième film, véritable coup de poing au foie qui provoque une très désagréable persistance rétinienne.
Dans un futur proche, la Californie et le Texas ont fait sécession. Désormais désignées sous l’appellation « Forces de l’Ouest », leur armée s’apprête à traverser le pays pour venir déloger le président en place. Au même moment, dans un Brooklyn déjà à feu et à sang, la célèbre photographe de guerre Lee Smith (Kirsten Dunst, impériale) sauve une jeune photographe d’un attentat à la bombe. Pour cette dernière c’est très clair : elle va accompagner Lee et ses collègues dans leur voyage jusqu’à Washington, où ils comptent bien prendre quelques clichés du président et l’interviewer avant sa destitution. Lee, quant à elle, va tout faire pour protéger la jeune fille. Leur voyage promet d’être âpre et dangereux.
A la fin, il ne restera que le chaos
Soyons clair dès le départ : Civil War n’est ni un film d’action ni un film de guerre. Et il ne répond à pratiquement aucun code du genre. Et ce serait d’ailleurs bien mal connaître Garland que s’attendre à si peu de sa part. Comme dans toutes ses précédentes créations, le film n’ira donc pratiquement jamais là où on l’attend mais fera au contraire son maximum pour nous prendre constamment à contre-pied. Les ruptures de ton, les nombreux silences violemment rompus par des échanges de tirs, une bande son qui tranche presque jusqu’au grotesque avec l’image, tout sera fait pour rendre palpable le chaos de cette nouvelle guerre de sécession dans sa forme. Même chose pour le fond, qui jamais ne révélera le déroulement des évènements qui ont conduit les Etats-Unis dans un tel enfer. La première image du film se contentant de montrer un président à bout de nerf, filmé à demi dans l’obscurité, préparer un discours dont la teneur lui coûtera ou non la vie. Suit une très brève exposition des personnages principaux avant que ne débute un voyage de plusieurs centaines de kilomètres entrecoupé de mini aventures cauchemardesques leur subtilisant jour après jour un peu plus de ce qu’il leur reste de foi en l’humanité : une halte forcée suite aux assauts d’un sniper, un enlèvement d’une partie du groupe par un militaire complètement fou (Jesse Plemons, une nouvelle fois glaçant) jusqu’à un assaut de la Maison Blanche qui compte parmi les climax les plus tendus de l’année. Civil War impose un silence pesant dans la salle, fait de nous les témoins d’un monde au bord du gouffre, qui est si proche du notre qu’il nous laisse sans voix. Jusqu’à son image finale qui nous assène le coup fatal. Celui qui finira bien par arriver un jour dans ce monde obsédé par sa propre folie.