ÇA : IL EST REVENU
It – États-Unis, Canada – 1990
Genre : Horreur
Réalisateur : Tommy Lee Wallace
Acteurs : Annette O’Toole, Tim Curry, Dennis Christopher, Seth Green, Harry Anderson, Richard Masur, Tim Reid, William B. Davis
Musique : Richard Bellis
Durée : 187 minutes
Distributeur : M6 / Warner
Date de sortie : 16 octobre 1993
LE PITCH
Un groupe d’amis revient dans leur ville natale trente ans après avoir affronté : ÇA, une terrifiante créature qui apparait sous plusieurs formes, et notamment celle de “Grippe-sou”, un clown qui vit, chasse et tue dans les égouts de la ville…
Tu veux un ballon ?
Bien avant le diptyque d’Andrès Muschietti sorti en 2017, ÇA l’une des œuvres majeurs du maître de l’épouvante avait eu droit à une première adaptation au début des 90’s. Bien connue des fans de la première heure mais relayée au second plan par celles et ceux ayant découvert la bête à travers l’interprétation de Bill Skarsgård il est temps de (re)découvrir cette autre facette des égouts de Derry.
Après le succès de Carrie, Shining et du terrifiant Simetierre, c’est en 1986 que Stephen King publie son treizième ouvrage : ÇA. Une œuvre en deux volumes comprenant au total 1700 pages et qui à travers son adaptation à la télévision traumatisera toute une génération d’enfants, propageant par la même occasion une vague de coulrophobie.
Tout commence dans la petite ville de Derry, Maine (une ville fictive inventée par Stephen King que nous retrouvons dans certains de ses romans) un jour de pluie. Tandis qu’elle décroche son linge, la maman de la petite Laurie-Anne invite sa fille à rentrer avant l’arrivée de l’orage. Des rires d’enfants se font entendre, un clown dissimulé entre les draps lui fait un petit signe de la main afin de lui ôter la vie. Ambulance et voitures de police arrivent alors sur les lieux et découvrent le corps. Nouvelle victime d’un tueur sévissant en ville, il n’en restera pas grand-chose comme toujours, selon l’un des agents envoyés sur place qui échange avec un citoyen assez curieux : Mike Hanlon. Mais cette fois-ci, il y a quelque chose de différent. Quelque chose qui ne devrait pas être là : la photo d’un jeune garçon décédé il y a 27 ans. Cette découverte ne laisse plus de place au doute : ÇA est revenu !
Ainsi débute donc cette œuvre cauchemardesque de 3h12 diffusée en France sur M6 (1993) et qui est scindée en deux parties se déroulant en 1957-58 puis en 1984-85.
Ayant fait ses armes sur le petit écran en réalisant deux séries TV, c’est à Tommy Lee Wallace (Halloween 3, Vampire, vous avez dit vampire ? 2) qu’est confiée la tâche d’adapter ce mastodonte de la littérature fantastique qui, années après années, est devenu l’un des livres les plus vendus du maître de l’épouvante. Et pourtant, il fait le choix audacieux de ne pas lire le roman au préalable, se basant uniquement sur le script de Lawrence D. Cohen qui a déjà œuvré sur d’autres adaptations comme Carrie au bal du diable ou encore Les Tommyknockers.
Prenant également en compte les contraintes de la télévision, il est conscient du fait que des concessions seront à faire, certains passages du livre (comme le rituel de Chüd, le serment des enfants dans lequel ils s’ouvrent la paume de la main avec un tesson de bouteille ou encore le meurtre homophobe d’Adrian Mellon qui aurait pu choquer le public mais aussi être censuré ce qui sera cependant ajouté dans la nouvelle adaptation) ne seront pas au montage mais tout ce qui fait la force de cette œuvre se retrouve à l’écran, amenant le fantastique dans le quotidien d’une petite ville de façon crédible comme Stephen King sait si bien le faire.
Tout comme le livre, le film est scindé en deux parties présentant le club des ratés enfants et adultes. La première se focalisera sur leur rencontre avec Ça lors de leur enfance retraçant leur première rencontre avec ce dernier mais aussi l’affrontement avec la bête. Tandis que la seconde sera axée sur les adultes qu’ils sont devenus et qui même s’ils ont perdu la mémoire devront tenter de tenir leur promesse, se remémorer leurs souvenirs d’enfance et renvoyer la créature dans les égouts pour de bon.
Ils flottent tous!
A travers ce conte macabre, King avait articulé son roman sur la métaphore du passage à l’âge adulte, la perte de l’innocence mais aussi sur l’amitié, avec pour toile de fond la nostalgie, tout en distillant une horreur insondable que le réalisateur a su transposer à l’écran. A l’époque, on ne pouvait qu’être saisi par la qualité des effets spéciaux, notamment avec la main de grippe-sou jaillissant d’un album photo s’animant soudainement, à la scène de la douche qui en aura marqué un bon nombre, sans oublier la créature de l’affrontement finale qui accuse désormais le poids des années. On peut d’ailleurs, au fil des visionnages, se rendre compte du manque de budget auquel Tommy Lee Wallace avait dû faire face, réussissant malgré tout à nous offrir un film de monstres qui avait le mérite de tenir la route, soulevé par la mémorable bande originale de Richard Bellis.
Difficile de ne pas s’attacher aux sept membres du club mis à l’écart à cause de leurs « différences ». Bégaiement, surpoids, lunettes, autre religion ou encore hypocondriaque,… Chacun d’entre eux à son petit talon d’Achille qui face à l’horreur aux mille visages sauront en faire une force. A travers les yeux d’un enfant de dix ans, chacun d’entre nous est en mesure de s’identifier à l’un d’entre eux ou se remémorera un ancien camarade qui aura été victime de moqueries car il ne rentrait pas dans les standards. King nous offre ici une galerie de personnages haut en couleurs issus de son imagination débordante.
Mais l’une des plus grands atouts de cette version, reste indéniablement la performance de Tim Curry (The Rocky Horror Picture Show). Après Legend, ce dernier revêt à nouveau le masque d’un monstre particulièrement terrifiant. Gardant en tête les nombreuses heures de maquillage lors de son interprétation de Darkness, il optera ici pour un make-up plus simple mais qui restera glaçant. Bien décidé à ne pas nous offrir un simple croque-mitaine, Stephen King puise ici dans nos peurs les plus profondes pour nous confronter à une horreur aux multiples visages. Loup-garou, lépreux et autres atrocités tenteront de terrifier cette bande de gosses qui malgré les apparences représentent une véritable menace. Côté casting, on retiendra aussi la prestation de certains acteurs sans doute moins célèbres dont celle de Emily Perkins (Beverly Adolescente), Richard Masur (Eddy à l’âge adulte) ou encore l’excellent Seth Green. Là où certains faisaient leurs premiers pas, d’autres auront fini par percer au cinéma et à jouer dans de grandes réalisations (La main qui tue, Django Unchained) mais aussi dans des séries assez connues pour certains (Buffy contre les vampires, Scrubs mais aussi The X Files ou William B. Davis interprètera l’homme à la cigarette de 1993 à 2002). On retiendra également le destin tragique de Jonathan Brandis (Bill enfant) qui se donnera la mort en novembre 2003.
Calibrée à l’époque pour la télévision (qui se découvrait alors un nouveau format de luxe), l’œuvre de Tommy Lee Wallace fait partie de ces classiques ayant pris un sacré coup de vieux. Malgré tout, cette dernière se veut honnête et aura su conserver avec l’arrivée de la HD un charme intemporel, qui n’a pas fini de faire trembler les fans de cette pépite désormais culte du maître de l’épouvante… Attention cependant, de gros changements ont été faits dans le doublage français lors la sortie du DVD en 2003 tout comme pour celle du Blu-Ray en 2016. En effet, les fans de la version d’origine relèveront des variantes dans les dialogues mais aussi un changement radical du côté du doublage de Tim Curry qui s’avèrera alors moins effrayant.