THE UNNAMED : JUNKYARD JOE
Junkyard Joe #1-6 – États-Unis, France – 2022
Genre : Fantastique
Dessinateur : Gary Frank
Scénariste : Geoff Johns
Nombre de pages : 176 pages
Éditeur : Urban Comics
Date de sortie : 1er septembre 2023
LE PITCH
Le dessinateur Muddy DAVIS vient de prendre sa retraite après avoir finalisé son comic strip Junkyard Joe. Héros de papier sorti de sa plume, le robot Joe puise ses racines dans ces souvenirs ramenés de la guerre du Vietnam qui hantent le vieux Muddy. Un passé qui reprend vie lorsque Joe se présente un soir sur le pas de sa porte. Avec sa réapparition se profile l’ombre d’une nouvelle guerre imminente.
Machine de guerre
Il y a un an, Geoff Johns ouvra la porte de la création indépendante et lançait un nouvel univers, The Unnamed, avec la première mini-série Giger. Dans cette longue histoire américaine revisitée et transformée par l’apparition d’étranges surhommes, il faut désormais compter sur Junkyard Joe, héros du Vietnam et robot de son état.
Pas besoin d’avoir ouvert le précédent volume pour adhérer, presque immédiatement, à la proposition de Geoff Johns. Les liens avec Giger sont plus que ténus, car ce nouvel album se consacre pleinement et chaleureusement à son personnage étonnant. Junyard Joe donc, homme mécanique envoyé sur le front par le gouvernement des États-Unis mais qui confronté à la terrible réalité des affrontements, la mort de ses compagnons d’armes et son meurtre involontaire d’un enfant, par déposer les armes. Ou plutôt par s’éteindre définitivement. Junkyard Joe s’est aussi le héros d’un strip-comics ultra populaire auxquels met fin le dessinateur Muddy Davis, seul survivant du marasme. Des années après tout deux se retrouvent, chacun hantés par leurs fantômes, et rapidement poursuivis par des agents militaires. La traque va rapidement embarquer aussi les nouveaux voisins de Muddy, soit trois adolescents et leur père toujours pas remis de la mort de sa femme, et finalement toute la communauté d’une charmante ville qui avait adopté l’image de Junkyard Joe comme la mascotte locale. Il n’y a pas forcément grand-chose à attendre ici des atours SF ou du background proprement dit puisqu’il est évident que le scénariste se passionne surtout pour l’émotion que peuvent véhiculer ses personnages.
Platoon
Les ados en pleine reconstruction dans un patelin paumé, le vieil artiste qui se perd dans sa solitude, et bien entendu Junkyard Joe héros charismatique par son expressivité (malgré son silence) et particulièrement touchant pour ses fragilités. Car le comic Junkyard Joe est un vibrant et sincère hommage aux vétérans de guerre, à ceux qui se sont perdus au front ou qui en son revenu, et Junkyard porte sur les épaules comme beaucoup le poids des morts dont il a été témoin. Un robot atteint de trouble du stress post-traumatique, il fallait oser et pourtant la démarche n’est jamais ridicule ou lourdement symbolique. Malgré la dureté de certains thèmes abordés, Geoff Johns offre une histoire pleine d’espoir et de compassion et prend plaisir au passage à s’adonner à quelques clins d’œil aux grands classiques du strip comics comme Snoopy & The Peanuts ou Calvin & Hobbs. Le dessinateur Gary Frank (Batman Terre-Un, Doomsday Clock), surtout connu bien entendu pour son approche assez réaliste, la finesse de ses détails, sorte de Steve Dillon maniaque, fait preuve d’un sens de l’économique et de la rondeur qu’on ne lui connaissait pas dans ces quelques pages ou cases volées à la BD de Muddy Davis. Sa réussite étant de transporter la petite mélancolie et la légère naïveté dans ses pages plus classiques, accompagnant à la perfection le récit jusqu’à son final aux airs de récit de Noël.
Une belle rencontre donc, avec ce faux super-héros, homme mécanique militaire et désormais définitivement pacifiste et qui, s’il ne donne pas de véritable clef pour comprendre l’univers The Unnamed, donne tout de même envie d’y découvrir les prochaines propositions de ses deux auteurs.