THE CROW II PAR JAMES O’BARR
The Crow : Dead Time #1-3 – Etats-Unis – 1996
Genre : Fantastique
Dessinateur : Alex Maleev
Scénariste : John Wagner
Nombre de pages : 104 pages
Éditeur : Vestron
Date de sortie : 21 avril 2023
LE PITCH
En 1860, Joshua et sa famille sont assassinés par des rebelles sudistes. En 1995, il est ramené à la vie par le Corbeau pour exercer sa vengeance : un gang de criminels sévit en ville, et tous ses membres sont les réincarnations de ses meurtriers…
Outre-tombe
Première mini-série dérivée de la BD culte de James O’Barr, Dead Time annonçait clairement une longue aventure éditoriale et une mythologie gothique qui ne demandait qu’à grandir. Mais c’était aussi une mini-série au destin particulier puisqu’elle reposait sur le scénario rejeté de James O’Barr pour un nouveau The Crow sur grand écran.
Si le comics originel est rapidement devenu culte, il était cependant resté assez confidentiel jusqu’à la mise en branle de la superbe adaptation signée Alex Proyas. Un film évènement, définitivement marqué par la disparition de Brandon Lee, et à laquelle James O’Barr apporta tout son soutien. Tellement emballé par le métrage même qu’il accepta rapidement de rédiger lui-même une seconde histoire sous la forme d’un scénario qui deviendrait un très attendu The Crow II. Malheureusement, l’auteur ne s’y contenta pas d’une simple variation mécanique comme le sera le bien triste The Crow City of Angels (avec Vincent Perez the international star), préférant creuser les effluves oniriques de sa BD, de développer sa figure totémique du corbeau et de les croiser avec une certaine mystique amérindienne. Quitte même à transposer son récit dans un aller-retour constant, et souvent déstabilisant, entre un drame survenu dans l’Amérique de 1860 et un monde contemporain où la violence est toujours aussi présente. Joshua voit ainsi sa femme et son fils assassinés devant ses yeux par des renégats sudistes, mais ne pourra perpétrer sa vengeance que plus d’un siècle plus tard en poursuivant les réincarnations de ces anciens tortionnaires qui n’ont manifestement pas vraiment trouvé la voie de la rédemption.
Renaissance fantôme
Perdu, tout comme le lecteur parfois, ce héros d’origine indienne vient alors autant questionner sa propre voie sauvage, quêter le repos de son âme, que questionner la barbarie d’un pays toujours autant fasciné par la destruction des innocents. Tableaux bien sombre et plus désenchanté encore que The Crow, Dead Time fut ainsi poliment écarté par les producteurs de Dimension Films qui lui préfèreront le script plus policé de David S. Goyer… qu’il feront considérablement alléger et réduire avant la sortie en salle de City of Angels au grand dam du réalisateur Tim Pope. Heureusement le scénario non exploité ne sera pas totalement perdu puisque l’éditeur Kitchen Sink Press (Zap Comix) en récupère les droits et en confie l’adaptation en BD au très solide John Wagner, cocréateur de Judge Dredd, qui en préserve toute l’étrangeté, accentuant même peut-être légèrement la décadence urbaine décrite, et réussit à inscrire cette première extension officielle dans la droite lignée du The Crow originel. Il faut reconnaitre qu’il est bien aidé par la prestation du jeune Alex Maleev (Daredevil, Moon Knight, Sam & Twitch), déjà imposant dans ses détails fouillés et réalistes et une utilisation proche de la gravure du noir et blanc. Un style qui là aussi plutôt que de rester figé dans une posture cinématographique, privilégie nettement, tout comme l’œuvre de James O’Barr, la puissance impressionniste du récit et l’onirisme de certaines visions au bord de la folie.
Si cette suite n’aura pas trouvé d’écho au cinéma, elle va cependant ouvrir la voie à de nouveaux projets éditoriaux comme Flesh and Blood (de nouveau illustré par Alex Maleev), Wild Justice, Curare et même The French Crow ! Un mal pour un bien.