THE BLUE FLAME
The Blue Flame #1-10 – États-Unis – 2021 / 2022
Genre : Super-héros, Science-Fiction
Dessinateur : Adam Gorham
Scénariste : Christopher Cantwell
Nombre de pages : 280 pages
Éditeur : 404 Comics
Date de sortie : 25 mai 2023
LE PITCH
Sam Brausam est un héros cosmique. Sam Brausam est un justicier des rues du Milwaukee. Sam Brausam est un réparateur de chaudière. Sam Brausam est l’avocat de l’humanité. Sam Brausam est The Blue Flame. À la suite d’une horrible tragédie, les frontières de l’identité de Sam Brausam s’effritent et avant un procès universel, il doit prouver que l’humanité vaut la peine d’être sauvée. Pour ce faire, Sam Brausam doit d’abord se sauver lui-même mais, le peut-il ?
Porteur de flambeau
Éditeur spécialisé dans le comic, 404 n’avait, aussi comme un acte de résistance, pas encore répondu aux sirènes des fameux super-héros préférant explorer d’autres territoires de la BD américaine. Et si avec The Blue Flame ce dernier franchit le fameux cap c’est que bien évidement cette maxi-série n’est pas une histoire de super-héros de plus.
Qui est un Blue Flame ? Un super héros real-life combattant le crime aux cotés de ses camarades de La Brigade nocturne ? Un aventurier traversant le cosmos et devenant l’avocat de l’humanité auprès du Consensus, fédération de planète et d’espèce menaçant de détruire la planète ? Ou simplement Sam Brausam, réparateur de chaudière raccordant difficilement le lien avec sa petite sœur bientôt maman et peinant tout simplement à trouver un sens à sa vie ? Pas de grands affrontements épiques ou d’extension du cheptel d’hommes en lycra, la minisérie va totalement se concentrer sur le personnage, sa famille, ses responsabilités, et scruter les conséquences dévastatrices sur lui d’une terrible fusillade dont il sortira seul survivant de ses camarades vigilantes. Affublé désormais de béquilles, mais surtout d’une douleur tout autant physique que psychologique, Sam hésite entre se laisser emporter, ou redresser la barre et reconstruire sa vie. Ce procès de l’espèce humaine qui se déroule à l’autre bout de l’univers, c’est aussi avant tout le sien, celui de ses ambiguïtés, de ses doutes, de ses petites lâchetés et de sa difficulté à se confronter à la réalité de son être.
Un homme dans la foule
Jouer avec le visage multiple de la figure héroïque et surtout la confronter avec la faillibilité des plus humaines de l’homme sous le masque n’est pas forcément une nouveauté, mais Christopher Cantwell (Everything, Doctor Doom, Iron Man) le fait avec énormément de sensibilité et d’humanité (justement), ne détournant jamais le regard autant sur les profonds défauts du personnage, que sur sa bonté, sa gentillesse et une force de survie nourrie par sa petite sœur Dee qui, avec son compagnon Mateo (un clandestin en situation irrégulière) a choisi de s’investir dans le concret. Il accompagne véritablement le personnage tout au long de sa quête d’explication (pourquoi ce jeune homme a tiré dans cette foule ?), de sens, de reconnaissance et d’amour (une histoire est-elle possible avec cette journaliste qui rédige en secret un article sur lui ?), tandis que son « double » se débat avec un procureur alien adepte des grandes tirades. Voulant parfois appuyer trop lourdement sur une mise en abime de la trame et la confrontation entre les codes classiques du comics de super-héros et le drame plus psychologique, l’écriture n’échappe pas à quelques dialogues qui tendent vers la démonstration, mais heureusement le dernier chapitre sait justement s’effacer progressivement, avec beaucoup de délicatesse, laissant volontairement le décor en suspens, s’achevant sur l’image tendre d’une naissance et d’une famille apaisée. Simple, modeste mais plein de justesse, c’est d’ailleurs ce vers quoi tendent constamment les planches d’Adam Gorham (New Mutants : Dead Souls, Jughead, Rocket), qui certes ne livre pas forcément la performance de l’année et se montre parfois un peu fluctuant dans le rendu et la précision de son trait, mais sait toujours comment se rapprocher au plus près des personnages, de leur environnement et de leurs émotions pour crédibiliser le récit. Même les épisodes se déroulant sur des planètes lointaines préservent ce réalisme épuré plutôt que d’opter (comme beaucoup avant cet album) dans un décorum et une esthétique rétro pour souligner trop évidemment le propos.
Plébiscité lors de sa publication l’année dernière aux USA chez US Vault Comics (là aussi une petite maison d’édition), The Blue Flame est une nouvelle jolie découverte de 404 comics qui a en plus l’excellente idée de le proposer dès sa première édition en un seul volume afin de faire le voyage d’une seule traite.