TEXAS BLOOD T.1
That Texas Blood #1-6 – Etats-Unis – 2020
Genre : Policier
Scénariste : Chris Condon
Illustrateur : Jacob Phillips
Éditeur : Delcourt
Pages : 168 pages
Date de Sortie : 23 juin 2021
LE PITCH
Joe Bob Coates est le shérif vieillissant du compté d’Ambrose au Texas. Il n’est pas loin de raccrocher quand le chaos se déchaîne autour de lui, à la suite de la mort mystérieuse d’un petit voyou local. La tension monte encore d’un cran lorsque le frère du défunt refait irruption en ville après bien des années…
Boys are back in town
Voici un nouveau polar graphique pour cet été publié par Delcourt. Une virée dans un bled paumé du Texas où y retourner oblige à faire face à de vieux démons… Et non, ce n’est pas signé Brubaker / Phillips. Quoi que.
Car il y a bien un Phillips ici. Jacob Phillips jusque-là coloriste de talent, qui avait d’ailleurs fait ses premières armes avec Sean Phillips… Son père. C’est ici son premier passage à la planche intégrale en somme, mais avec une approche beaucoup plus réaliste, moins anguleuse, brute et épurée que son paternel. Un style différent mais on ressent inévitablement une proximité constante entre les deux identités, par le travail des couleurs forcément, souvent délavées et atmosphériques, et l’atmosphère générale qui scrute sans détour une frange modeste de la société américaine, trouvant dans sa délinquance un révélateur d’humanité. Ici c’est Ambrose, petite ville du Texas où Randy s’oblige à mettre les pieds à la suite de la découverte du corps de son frère, assassiné. Deux frangins connus autrefois pour leurs frasques, l’un s’étant enfoncé toujours plus loin dans la truanderie, l’autre ayant préféré fuir. Il est bien entendu question de rédemption dans Texas Blood, comic aux allures de western moderne, mais de celles qui sont impossibles, où le passé et une réalité écrasante, viennent rattraper les évadés.
Ring of fire
Jeune scénarise, presque débutant lui aussi Chris Condon compose une chronique désenchantée où la découverte du meurtrier passe rapidement au second plan derrière la description de la mécanique implacable qui se met en place : regard en biais et jugement des habitants, retours de l’ancienne petite amie délaissée, dettes de sang à rembourser au caïd local… Une structure bien menée mais au final assez classique, dont le petit final ne risque pas de surprendre beaucoup les amateurs du genre. Là où ce premier album se montre le plus efficace, c’est dans l’installation de Joe Bob Coates comme repère moral d’Ambrose. Un shérif en fin de carrière, pas loin de la retraite, qui tente de maintenir sa communauté à flot et d’enquêter sur le dernier crime en date avant que certains se fassent justice eux-mêmes. Personnage secondaire (pour l’instant) tout au long du récit, les auteurs lui offrent tout de même un chapitre inaugural parfaitement écrit, évoquant avec justesse le temps qui passe, les vieux souvenirs et la tristesse récurrente du banal fait-divers. Une brillante introduction au niveau de laquelle la suite n’arrive plus à se hisser que par intermittence. A voir si par la suite, ce brave Marshal continuera à veiller sur ses voisins avec autant de bienveillance et de pertinence.