SUPERMAN : SPACE AGE

Superman : Space Age #1-3- Etats-Unis – 2022 / 2023
Genre : Super-héros
Dessinateur : Mike Allred
Scénariste : Mark Russell
Nombre de pages : 256
Éditeur : Urban Comics
Date de sortie : 4 avril 2025
LE PITCH
4 octobre 1957. Le lancement du satellite Spoutnik inaugure une nouvelle ère pour l’humanité, basée sur l’exploration spatiale, l’avancée technologique et… Superman. Fraîchement arrivé à Metropolis, ce dernier découvre un monde rempli de promesses mais aussi d’injustices. Accompagné de ses futurs coéquipiers de la Ligue de Justice, Superman va tout faire pour apporter la paix et l’espoir dans une époque où les événements politiques et sociaux s’entremêlent aux grandes menaces cosmiques !
Whatever Happened to the Man of Tomorrow ?
Superman, le vrai, est censé revenir en salles en juillet prochain, mais il revient déjà en librairie avec Space Age, vibrant hommage au Kal-El originel, figure d’espoir et de positivité traversant ici trois décennies de l’histoire américaine et de menaces planétaires. Vaste programme proposé par Mark Russell (Not All Robots, Prez, The Flinstones…) et idéalement dessiné par le trop rare Mike Allred (Madman, iZombie, X-Statix…).
Au gré des relectures, réinventions, reboot et autres « Elseworld », une figure comme Superman n’a jamais cessé d’interroger les notions d’héroïsme, du symbolisme positif et d’une certaine façon la relation des américains avec leurs propres modèle mythologique. En débutant réellement en 1964, montrant comment l’assassinat de JFK a pavé le chemin d’un certain Clark Kent pour devenir le fameux Superman et ainsi reprendre le flambeau, Space Age ressemble effectivement plus à une longue conversation avec le lecteur qu’à un grand space opera bourré d’action. Découpé en trois grands chapitres avec pour chacun une décennie de l’histoire américaine (les 60’s, les 70’s et les 80’s), la mini-série tisse donc constamment des liens entre les remous de la civilisation américaine, sa lente chute de la belle ère de l’exploration spatiale, mais aussi de la Guerre froide et de la menace nucléaire, à celle d’une société entièrement circonscrite aux notions de pouvoir et d’argent. Pour une fois totalement débarrassé de ses apparats de vilains, Lex Luthor en devient d’autant plus dangereux et crédible, magna de la finance n’hésitant pas à atomiser une ville entière pour assurer sa propre préservation, génie des nouvelles technologies (suivez notre regard) dont la quête de contrôle et de gloire se heurtera à une apocalypse bien plus grande que lui (suivez notre regard). Alors que l’un gravit peu à peu le chemin vers son humanité et surtout sa compréhension de celle-ci, l’autre s’effondre dans la stupidité et l’égoïsme.
Muliple Crisis
Deux trajectoires inversées qui suffisaient pleinement à faire de Superman Space Age une excellente étude de caractère et une allégorie sensible de la condition humaine et d’une existence constamment menacée, où cependant Mark Russell se sent un peu trop obligé de jouer avec le reste du panthéon DC. Si la présence de Brainiac et de l’Anti-monitor viennent ajouter effectivement une instance cosmique et réduire l’échelle de notre pauvre planète, les allers-retours avec un Batman plus terre-à-terre et empêtré dans les coulisses de son entreprise, et particulièrement les apparitions plutôt rigolotes, mais franchement anecdotiques, de la JLA n’apportent pas grand-chose aux grands tableaux. Surtout, ils dispersent la narration et font perdre de l’évidence aux séquences « humaines » de Superman, les apprentissages au près de ses parents d’adoptions, sa rencontre avec Lois Lane, leur romance et la naissance de leur enfant. Une très jolie chronique, touchante, poétique et qui célèbre véritablement l’essence morale et symbolique de Superman mais qui aurait finalement mérité plus d’économie, plus de simplicité. A l’instar du travail de Mike Allred justement, qui avec son mélange d’épure à l’ancienne et d’attentions plus moderne (voir underground), souligne véritablement l’intemporalité de cette tragédie du surhomme. Les couleurs pop proposées par son épouse, Laura Allred, le maniérisme des poses, les petites réinterprétations des costumes de l’âge d’or permettent ainsi de croiser avec décontraction les grands élans comics avec une légèreté presque rétro, mais néanmoins douce-amère.
Une proposition hors chronologie tout à fait attachante et intéressante même si inaboutie, qui permet tout de même de rappeler une fois encore que Superman n’est jamais aussi lumineux que lorsqu’il reste fidèle à ses premières incarnations. Un héritage magnifiquement mis en image par un Mike Allred toujours très inspiré.