Comme l’indique parfaitement son titre, Ouverture, se premier album de la série Sphère est essentiellement là pour poser l’univers imaginé par l’auteur. La première page est ainsi une simple frise décrivant en quelques dates les avancées de la conquête spatiale de 1961 à…. 2494. En cours de route, des explorations qui permettent l’installation de colonies sur la Lune et sur Mars, des guerres planétaires manquant de dévaster totalement la terre, l’installation d’un nouvelle ordre théocratique universel dévoué à « l’ultime » et un évènement, désormais oublié de beaucoup, survenu en 2203 aux abords de Jupiter : l’apparition fugace et inexpliquée de trois sphères d’origines extraterrestres. Trois cents ans en plus tard lorsque débute l’action proprement dite, seul le colonel Praxx, réveillé de force de sa cryogénie, se pose toujours des questions sur cette rencontre et s’efforce de rejoindre la station d’observation de Jupiter pour en reprendre le commandement. Il va croiser sur son chemin (ou l’inverse) Nell’o, navigatrice obligée de partir elle aussi en direction de la station Europe afin de capturer sur place d’étranges créatures capables d’exsuder une drogue très demandée et sauver sa sœur retenue en otage.

Les secrets de Jupiter

Le monde futur est toujours aussi brutal, injuste et désespéré, et l’implication de sectes d’état ou terroristes, ne semble pas arranger les choses. Brion plante admirablement son décor, maniant une écriture parallèle entre ces deux personnages, et quelques autres, tout à fait équilibrée et creusée, installe déjà quelques enjeux à venir, mais se montre surtout particulièrement habile dans sa manière de donner corps à cette civilisation lointaine, à la fois bien plus avancée que la notre mais aussi bien plus décadente. On reconnait de-ci de-là des inspirations kubrickiennes, des notes crépusculaires proches d’Alien ou Blade Runner et un mélange constant de technologie et de religion que n’aurait pas renier le Frank Herbert de Dune, Brion y trouve aussi sa propre voie corsant le tout avec des accents de polar âpre et surtout le met impeccablement en image. Travaillant manifestement toujours à la palette graphique dans un mélange de graphismes classiques et de retouches numérique façon Photoshop, il développe quelques visions cosmiques dantesques, des environnements urbains ou désertiques puissants, des bases ou véhicules solides et crédibles, mais n’oublie certainement pas en cours de route l’aspect humain du récit. Avec des textures proches de la peinture, en gardant des contours fébriles et s’appuyant sur une colorisation élégamment dégradée, il met brillamment en valeur son trait pointu et les attraits physiques de ses protagonistes.

Un premier album visuellement très impressionnant et à la trame aussi ambitieuse que prometteuse.