SOU BOU TEI T.1

双亡亭壊すべし – Japon – 2016
Genre : Horreur
Dessinateur : Kazuhiro Fujita
Scénariste : Kazuhiro Fujita
Nombre de pages : 192 pages
Éditeur : Mangetsu
Date de sortie : 13 mars 2023
LE PITCH
Ce manoir légendaire se dresse avec orgueil dans le bourg de Numanakarai, à Tokyo… À l’intérieur, des ténèbres insondables attendent les visiteurs les plus imprudents… Et si par malheur vous vous y aventurez, vous risquez de disparaître à tout jamais. Quelle solution face à cette bâtisse maudite ? La détruire, à tout prix !
Péril en la demeure
Éditeur privilégié de Junji Ito et de très bons titres d’horreurs, Mangetsu se lance dans la traduction de Sou Bou Tei, saga en 25 tomes signée par l’artiste Kazuhiro Fujita, l’auteur de Karakuri Circus et Moonlight Act. Et pour qui a déjà ouvert un de ses mangas, il est évident que cette histoire de maison fantôme sera aussi timbrée qu’originale.
De toute façon Kazuhiro Fujita détonne un peu dans les grands horizons du manga. Son style graphique tout d’abord très décalé, pas vraiment réaliste, jamais très loin du cartoon ou de la caricature, met constamment en avant des personnages agités, presque toujours en mouvements et régulièrement dans des poses ultra dynamiques et pas des plus naturelles. Approche étonnante effectivement pour un auteur qui balade son crayon le plus souvent du côté des séries ésotériques avec une bonne touche d’horreur. C’est plus que jamais le cas dans Sou Bou Tei, l’un de ses plus gros succès éditoriaux au Japon, dont le sujet central est une vaste demeure maudite dévorant les visiteurs et hantant les survivants jusqu’à la fin de leurs jours. On peut alors s’imaginer que le récit va jouer avec mystère sur les ambiances inquiétantes, sur la montée en tension et les apparitions de plus en plus frappantes, voir glauques et terrifiantes… Et pourtant ce premier volume s’ouvre sur un premier ministre qui lance une opération de bombardement en plein Tokyo pour éradiquer ce lieu dont il garde depuis sa jeunesse un terrible souvenir.
Quatuor à cordes et à percussions
De la grosse artillerie qui sera sans grands effets, mais qui tranche clairement avec les échelles d’habitude utilisées dans ce genre de manga. Les pouvoirs de la demeure semblent d’ailleurs tout aussi disproportionnés puisque son aura semble envahir toutes les rues environnantes et qu’un avion disparu depuis 45 ans va s’échapper des volutes de fumées qui la surplombe ! Un sacré boxon donc où l’on trouve bien quelques épisodes d’épouvante plus « classique » avec yeux en sang, tentacules qui bouffent les victimes, lycéenne dont les bras s’allongent de manière dérangeante, mais où Kazuhiro Fujita passe son temps à multiplier les ruptures de ton, entre délires comiques et hystériques, poursuites et action digne d’un shonen et arrière-plan presque épique croisant une secte de femmes exorcistes traditionnelles et une branche gouvernementale façon X-Files. Détonnant pour le moins, parfois pas encore tout à fait au bon point d’équilibre (en même temps, c’est acrobatique), mais constamment surprenant Sou Bou Tei déverse un flop d’idée et de concepts plus délirants les uns que les autres et balance avec énergie ses héros malgré eux au milieu du chaos.
C’est là, l’une des principales qualités de cet auteur qui malgré ses univers baroques et ses mythologie déglinguée, sait toujours soigner ses personnages, excessifs et hauts en couleurs, névrosés pourquoi pas, mais aussi drôles qu’attachants et curieux. Ici donc un nouveau quatuor dont le crédo est « le Sou Bou Tei doit être détruit » composé par un jeune garçon traumatisé par la disparition de son père, sa sœurs exorciste de son état mais totalement lunatique, un mangaka sans succès mais toujours joyeux et un jeune homme sans âge capable de transformer ses bras en spirales qui absorbent les mauvais esprits. La série commence à peine, qu’on est déjà obligé de reprendre notre souffle.