Si on peut y reconnaitre certaines caractéristiques de parcs animaliers, et non pas de zoos ( !!), français bien connus comme celui de la Palmyre près de Royan, celui imaginé ici dans la commune toute aussi imaginaire de Brussanne est certainement ce qui se fait de mieux dans le genre. Des parcs aux dimensionnements généreux, avec une surveillance vétérinaire constante, une véritable prise en compte du bien être des pensionnaires et une multiplication des opérations de sauvegardes et de réimplantations des espèces menacées. L’aboutissement en sommes pour cette grande entreprise familiale, les Best, qui ont véritablement le métier dans le sang. Mais effectivement l’affaiblissement du père et surtout le décès soudain de la mère, vont tout chambouler et bouleverser des équilibres qui ne tenaient finalement déjà pas à grand-chose. Inscrit dans une longue tradition française, aussi bien littéraire que télévisuelle (comme ne pas penser ici à certaines sagas de l’été ?), Sauvages présente un arbre généalogique étendu, façonné d’autant de personnalités que d’opinions… en particulier sur la manière de gérer les lieux.  

Chacun sa cage

Christian Lachenal et Bruno Lecigne font solidement reposer leur récit sur leurs personnages, leurs confrontations, leurs liens indéfectibles, leurs vieilles rancunes ou leurs amours de jeunesse mal cicatrisés, pour donner corps à un large tableau où viennent se mêler très naturellement quelques questions sur la préservation animale, l’opposition aux braconniers et plus généralement à l’économie difficile et la remise en question de ce type de sites. Le contexte se veut des plus réalistes et crédibles comme en atteste d’ailleurs l’approche visuelle de Federico Pietrobon (Un Homme comme les autres) toujours très proche de ce rendu un peu figé du photoréalisme poussé. Mais Sauvages n’aurait certainement pas attiré l’œil des Humanoïdes Associés s’il ne poussait pas légèrement le curseur vers le thriller plus tendu en mettant en place un jeu de domino particulièrement destructeur où le décès premiers va entrainer une succession d’évènements tragiques et intriguants, qui bien entendu révèleront peu à peu leurs liens et leurs causes : le gendre vétérinaire qui se fait mortellement attaquer par une panthère, l’adolescente rebelle qui se fait kidnapper, des investisseurs mystérieux, une prise d’otage en Afrique…  Certes les habitués du polar traceront les lignes assez rapidement, mais la lecture s’avère tout de même assez efficace et bien menée, et même parsemée de quelques vraies traces de noirceurs.  

Un album solide qui effectivement se plierait aisément à une adaptation en fiction télévisée. Peut-être bientôt ?