RED GUN T.1 : LA VOIE DE SANG
France – 2024
Genre : Western
Dessinateur : Giulia Francesca Massaglia
Scénariste : Jean-Charles Gaudin
Nombre de pages : 56 pages
Éditeur : Soleil
Date de sortie : 6 mars 2024
LE PITCH
1866, sur le chantier du Transcontinental, plus grand tracé ferroviaire des États-Unis, est à nouveau découvert le corps d’une prostituée. Décision est prise de faire appel à Terence Nichols, surnommé Red Gun, pour la couleur de son colt, persuadé que ces meurtres sont liés à la guerre de Sécession. Il va mener l’enquête et se confronter aux fantômes de son passé.
Le colt et le scalpel
Les serial killer sont partout ! Même dans le western. Et pour le lancement des « aventures » du Red Gun du titre, mercenaire hanté par la Guerre de Sécession, les auteurs le mettent sur le chemin d’un Jack l’éventreur américain sévissant autour du chantier du Transcontinental.
La construction de cette immense ligne de chemin de fer traversant le continent américain d’Ouest en Est, c’est un peu celle de la modernisation des Etats-Unis. Le passage du fameux Ouest sauvage et mythologique à une culture qui va peu à peu apprendre à se domestiquer (au grand désespoir de John Wayne). Et c’est le cadre parfait pour découvrir un nouveau héros de BD, le mercenaire Terence Nichols, vétéran héroïque, engagé par son ancien gradé pour veiller à la sécurité des abords des nombreux chantiers qui jalonnent le tracé. Vaste programme qui va ainsi jouer à la fois sur des albums unitaires, à la trame auto-contenue, et la construction d’un personnage dont on ne découvre pour l’instant qu’une toute petite part des mystères. Un survivant en tout cas, traumatisé par les champs de batailles, réveillé par ses cauchemars emprunts de souvenirs des extrêmités qui lui ont permet de survivre, et qui a la fâcheuse habitude de se scarifier pour évacuer la douleur et les angoisses. Un personnage classieux mais torturé, et qui pour sa première affaire ne va pas courir après un voleur de bétails ou un bandit de grand chemin, mais bien un assassin qui s’en prend aux femmes de petites vertues, leur crevant les yeux et les éventrant.
Horizons rouges
Un cousin éloigné du célèbre tueur de Whitechapel mais bien implanté au cœur du décorum du western qui aboutit à un mélange des genres plutôt original et qui réussit à maintenir l’équilibre entre ses deux versants. Décors, costumes, personnages et atmosphère générale sont bien ceux d’un western sombre et violent, mais l’enquête proprement dite est efficacement menée, plongeant autant dans les fibres de l’Histoire américaine que dans les vieux secrets des grandes familles, comme dans un vrai roman noir. Red Guns ne se refuse d’ailleurs pas ni exécutions colts en main et castagnes aux poings, ni quelques visions plus brutales voir gores qui mettent autant en évidence l’animalité de l’époque que le sadisme des meurtres. Certes certaines articulations sont assez prévisibles et les personnages n’échappent pas à leurs stéréotypes, mais les aspects les plus classiques du texte de Jean-Charles Gaudin (Les Arcanes du Midi-Minuit, Au Nom du pain…) ne sont pas désagréables non plus, à l’ancienne mais assez solide et s’accordent avec la prestation de la dessinatrice Giulia Francesca Massaglia. Une artiste italienne encore inconnue chez nous, qui pour son premier album apporte un réalisme resserré, assez expressif même si quelques postures semblent parfois un peu rigides, mais qui surtout capture l’essence de ce western conventionnel mais toujours à cheval avec des effusions plus proches de l’horreur graphique (soft).