PATRIARCHY T.1 : LE CHATIMENT
France – 2022
Genre : Science-Fiction
Scénariste : Sylvain Runberg, Anna Saveg
Illustrateur : Belen Ortega
Editeur : Editions Caurette
Pages : 60 pages
Date de Sortie : 08 juin 2022
LE PITCH
Europe, 2077, cinquante ans après le premier conflit nucléaire mondial. Un monde en ruine a vu l’avènement d’un nouveau régime autoritaire : « Le Protectorat », une dictature masculiniste affirmant la supériorité naturelle des hommes sur les femmes. Mais depuis un ancien parc d’attractions transformé en forteresse, le clan des valkyries lutte contre l’oppression, offrant un havre de paix et de résistance à celles qui les rejoignent. C’est là que vont s’affronter Sigrid et Kahina, autour de deux visions du monde qui les mèneront à un conflit dont l’enjeu sera l’avenir de ces femmes libres.
Vs. Matriarchy
Sylvain Runberg retrouve son illustratrice de Millenium Saga pour une nouvelle série qui, une fois encore, vient explorer les mécaniques misogynes de notre monde. Accompagné de la coscénariste Anna Saveg, ils décrivent un futur post-apocalyptique où la guerre des sexes est passée aux armes.
Imaginé au départ par le duo d’auteurs comme une proposition pour une série télévisée, Patriarchy s’est finalement transformé en BD avec un premier cycle de trois albums d’ores et déjà en confection. Le pitch initial, quelque part entre Walking Dead et La Servante écarlate se prêtait effectivement très bien à la fiction épisodique avec un thème particulièrement dans l’air du temps. Une fois encore la catastrophe nucléaire a bel et bien eu lieu, mais à la suite d’une décision belliqueuse de la première présidente des États-Unis. Au milieu des cendres du conflit généralisé avec la Chine, le raccourcis est simple et rapide, tous les torts des évènements sont reportés sur cette femme, et par ricochet sur toutes les autres. En 2077, dans une nouvelle ère d’obscurantisme, les femmes sont à nouveau réduites aux rôles de mères de famille, de bonniches à la maison et d’esclaves sexuelles dans une organisation masculine totalitaire dont se réjouirait les talibans. Un monde cruel, barbare, où l’injustice et la misère règne, en particulier pour les représentantes du sexe faible. Tout le globe est occupé. Tout ? Non, car un village d’irréductible guerrière résiste encore et toujours à l’oppresseur. Un ancien parc d’attraction reconverti en forteresse retranchée, imprenable, maintenue par les Valkyries dont finalement l’organisation s’avère aussi liberticide et meurtrière que celle qui les entoure.
Hommes Femmes : Mode d’emplois
Plutôt classique dans son anticipation voir dans son déroulé avec bien entendu trois d’entre elles qui vont tenter de retrouver le chemin de la liberté, Patriarchy se montre surtout très malin dans cette confrontation tout en parallèles entre deux dictatures qui se crachent à la figure l’une l’autre et s’étripent à l’occasion, mais finalement pratiquent aussi aisément les exécutions sommaires, les lavages de cerveau, l’endoctrinement et les replis sur soi. Loin d’être manichéen, le premier album prend effectivement son temps pour installer les personnages, en guise d’héroïne une combattante fort en gueule, sa petite sœur et sa meilleure amie enceinte, et la dynamique à venir, mais distille aussi déjà quelques indices sur des apparences trompeuses et sur des causes plus complexes qu’il n’y parait. Un peu de Mad Max (forcément), une bonne dose de survival, un décor proche des joies du Moyen Age retrouvé, parfaitement mis en image par l’illustratrice Belen Ortega, ici assez loin de ses habituels décors urbains de Millenium Saga ou de Batman. Son style marie toujours aussi joliment l’expressivité du manga avec la dynamique des comics et des détails (costumes, environnements) plus fouillés façon franco-belge. Appuyé par la colorisation sombre et atmosphérique d’Amparo Crespo, son découpage souligne aussi au passage le démarrage très efficace de cette nouvelle série, réussissant à implanter solidement sa proposition tout en délivrant une aventure sans temps morts.