Pour ceux qui suivent l’actualité de l’éditeur Tabou, Oni : Plaisir intimes n’est pas un titre qui leur est totalement inconnu puisque c’était celui du premier recueil de nouvelles de Cyril Corti. Un « roi de la night » à La Cadière-d’Azur, organisateur de soirées, qui en 2024 racontait ou imaginait (sans doute un peu des deux) quelque unes de ses rencontres amoureuses et libertines, explorant les corps, les fantasmes et les pratiques diverses et variées.  Trois de ses histoires ont été reprises et manifestement réarrangées par le scénario signant Chaytan, pour mieux conter l’histoire d’un couple qui ne se sait pas, et qui va apprendre en étapes, à marier les corps et les sentiments. Leur rencontre se fait en 2000 durant une journée bien chaude, et tel un coup de foudre, les deux amants vont se jauger, jouer l’un avec l’autre dans et autour d’une voiture, en toute liberté. Dix ans plus tard, elle devenu artiste invite cet amant occasionnel à l’inauguration de son expo et leur rapprochement va s’achever en triolisme échevelé. Dix ans encore à attendre, et après un essayage de lingerie qui dérape dans la cabine, tous deux s’affirment enfin totalement dans leurs désirs profonds et un amour qui ne demandait qu’à être nommé… donnant lieu forcément à une étreinte des plus passionnées.

Laisser le temps faire son office

Reprenant quelques bribes des textes littéraires de Cyril Corti, associés à des dialogues forcément plus naturel, Oni réussit vraiment à installer ses deux personnages dans le temps, prenant de la bouteille comme on dit, mais aussi de l’assurance et une conscience de plus en plus évidente de leurs corps. Sans vulgarité mais avec une crudité on ne peut plus naturelle, leurs ébats hésitent joliment entre la poésie érotique et la touchante simplicité, échauffant les esprits et les sens. Faut-il vraiment préciser que cet effet est largement décuplé par les planches d’Elena Ominetti ? Elle amène les situations avec beaucoup de finesses, mettant parfaitement en images les attendues scènes d’amour, y ajoutant toujours une petite touche de malice, insufflant surtout une ambiance romantique et torride. Ses deux amoureux sont d’ailleurs très beaux, et elle réussit parfaitement à leur faire passer le temps, affermissant les corps et les traits. Belle trouvaille au passage de donner à chacune des trois histoires une teinte monochrome particulière (bleu à 20 ans, sépia à 30 et rosé à 40) affirmant visuellement les changements opérés entre Oni et Cyril, tout autant que l’évolution logique de leur histoire. Décidément une bien belle rencontre.