OKANIKAA
France – 2024
Genre : Fantastique
Dessinateur : Magenta King
Scénariste : Hirodjee
Nombre de pages : 96 pages
Éditeur : Les Humanoïdes Associés
Date de sortie : 5 juin 2024
LE PITCH
Au XVIIe siècle, dans le Nouveau Monde, le Baron de Sentenac, un Wiindigo démoniaque, cherche désespérément son fils François, alias Okanikaa. François, héritier condamné au sacrifice pour la survie de son père, fuit sa terrible destinée en se réfugiant parmi les indigènes et les trappeurs. Armé d’une équipe d’explorateurs, le Baron traverse alors le pays, déterminé à retrouver François, surmontant tous les obstacles pour sauvegarder le sombre leg de la famille.
Démons blancs
Après Naissance du tigre, le romancier Feldrik Rivat (ici dissimulé sous le pseudonyme Hirodjee) revient à la BD avec un nouveau voyage dans le temps, mais cette fois-ci en terres indiennes. Un lieu plein de mythes, de dangers où il ne manquait plus qu’un vieux démon français.
Auteur maniant souvent un mélange sombre entre le vieux polar et l’épouvante, Feldrik Rivat délaisse ici l’aspect enquête pour offrir un récit à la ligne directrice clairement plus proche de la traque sauvage. Celle d’un vieux Baron français ayant traversé les océans pour retrouver son fils, réfugié dans les forêts indiennes du Canada du XVIIe siècle. François, répondant désormais au nom de Okanikaa, profondément marqué par un étrange épisode qui serait survenu dix ans plus tôt dans la demeure familiale. Comme une messe noire, une incantation démoniaque qui aurait mal tournée mais dont le lecteur n’aura toute la porté uniquement que par le biais de flashbacks disséminés tout au long de l’album. A cette magie maléfique semble répondre celle plus animiste et mystique des ojibwés, veillant à réparer l’esprit d’Okanikaa et de le protéger contre un paternel qui n’essaye pas vraiment de reprendre contact pour renouer de tendres liens père-fils. C’est que tout au long de cette expédition dans une nature recouverte de neige et de classe, les hommes disparaissent ou s’écroulent comme victimes d’une malédiction. Pas de grandes surprises, vieux vampire à la gueule béante ou ersatz européens des wendigo, le baron se nourrit de l’énergie vital de ses victimes.
Purification
Un mélange plutôt réussi entre les deux courants avec une belle emphase portée sur les croyances et les coutumes indiennes qui donnent de prime abord à l’album un cachet certain et auraient pu donner naissance à une atmosphère étrange et envoutante. Cependant le style graphique de Magenta King ne semble pas toujours des plus adéquate pour en retranscrire les aspects les plus flottants et indéfinissables. Avec des planches aux traits très simple, aux décors naïfs voir limités, aux couleurs en aplats trop lisses et une confection générale en numérique qui manque de caractère, l’œil n’est pas forcément attiré par la grande beauté de la fresque. Quelques choix purement esthétiques, comme ces chiens rouges en collet S&M, laissent un peu dubitatif, tandis que même l’histoire proprement dites multiplie les personnages à peine esquissés et avance de manière machinale vers un grand final annoncé depuis longtemps. Difficile alors de s’attacher aux protagonistes, que ce soit Okanikaa qui fait surtout figure d’éternelle victime, sa femme indienne qui guide, on ne sait pas trop pourquoi, sur les eaux gelées, cette créature damnée, lui-même méchant théâtral et grotesque qui aurait certainement mérité un peu plus de nuances. Dommage.