Dans les royaumes fantastiques, les histoires de familles sont toujours bien compliquées, bourrées de secrets bien gardés, de trahisons en rafales et de manigances sordides pour préserver le trône d’une engeance que l’on aura dument désignée au préalable. Il n’y a pas que Game of Thrones dans la vie et le genre manie depuis longtemps ce type de feuilletons alternant les longues discussions à la cour, les réunions stratégiques dans des salles bien gardées et les batailles plus ou moins épiques, mais toujours relativement sanglantes. Créateur des séries Borderline ou Vinifera, Alexis Robin s’essaye pour la première fois à l’Heroic Fantasy et semble bien décidé à s’emparer de tous les codes et tous les clichés. Car s’il y a effectivement un arrière-plan plutôt complexe avec un fils banni qui tente de reprendre le trône à une régente aux excès plutôt totalitaires, si on sent plusieurs fois poindre des origines magiques ou quelques sortilèges à l’origine d’une crise qui pourrait bien plonger tous les royaumes dans la guerre, Mo se concentre dans ce premier album surtout sur les atermoiements de la jeune princesse Irinelle que sa mère aimerait voir reprendre sa succession, se contenir en société et surtout se plier à son devoir.

Une place à prendre

Peine perdue, cette dernière préfère chasser le styrèle, s’en prendre méchamment à son prétendant et partir seule à l’aventure afin de découvrir par elle-même la réelle teneur des évènements qui se mettent en place. Une héroïne plus capricieuse que courageuse, plus plantureuse qu’athlétique qui agace un peu et n’arrive jamais totalement à faire oublier qu’on a un peu l’impression d’avoir déjà lu toute cette histoire quelque part. Pas déplaisant, mais pas vraiment passionnant non plus, les éléments les plus intéressants de l’histoire (les véritables origines du prince félon Mo) restent pour l’instant hors d’atteinte, et les petites fioritures de cet univers de Fantasy (premiers affrontements contre l’ennemi, créatures diverses…) ne sont pas assez nombreux pour dynamiser tout ça. Rompu par contre à ce type d’univers, le duo d’artistes formé par Lucio Alberto Leoni, Emanuela Negrin (autrefois son encreuse et assistante), retrouve plaisamment des décors proches des séries Templiers ou Les Maitres inquisiteurs et s’en sortent sobrement, le coup de crayon plutôt arrondi et les arrière-plans un peu rapides, n’étant cependant pas toujours aidés par une colorisation numérique trop basique qui en souligne les imperfections. Le grand souffle de la fresque guerrière et ensorcelée est passé un peu à côté.