MJÖLLNIR : INTÉGRALE

Mjöllnir T.1-3 – France – 2013 / 2016
Genre : Fantasy
Dessinateur : Pierre-Denis Goux
Scénariste : Olivier Peru
Nombre de pages : 176 pages
Éditeur : Editions Soleil
Date de sortie : 14 mai 2025
LE PITCH
Combien d’histoires du Nord devenues légendes chantent la vérité ? Combien racontent que des petits hommes ont défait des grands ? Même au sommet d’une montagne, un nain reste un nain, dit-on. Loin des étoiles, près de la terre… les petits hommes regardent le monde en levant les yeux. Mais, parfois, il en est qui deviennent des géants. Combien de légendes parlent de ceux-là ? Aucune… jusqu’à ce jour. Aucune jusqu’à Mjöllnir.
Entre le marteau et l’enclume
Publié au préalable sous la forme d’un diptyque complet en 2013 puis complété par un 3eme tome en 2016, Mjöllnir s’offre une nouvelle intégrale étoffée avec un cahier de croquis et d’illustrations inédites signées par quelques invités de la maison Soleil. Bonne occasion pour replonger dans cette fresque fantasy viking pleine de dieux et de fureur.
Si le scénariste Olivier Peru et l’illustrateur Pierre-Denis Goux sont des signatures particulièrement connues des lecteurs de la constellation Les Terres d’Arran, croisés sur Nains, Elfes ou Orcs et Gobelins, Mjöllnir ne fait pas partie du même univers. Au premier coup d’œil, on pourrait cependant s’y laisser prendre, la série mettant à nouveau en avant un héros du petit peuple, combattant des créatures fantastiques, se confrontant aux hommes, aux elfes ou aux géants, mais cette fois-ci dans une réinterprétation de la mythologie nordique. Inspiration première de la fantasy justement, elle imprègne ainsi ce petit monde popularisé par les œuvres de J.R.R. Tolkien (et beaucoup d’autres depuis), en transformant peu à peu cette énième guerre inter-espèce en nouvelle évocation du fameux Ragnarök. Ainsi, si notre brave héros s’appelle Thor, ce n’est certainement pas pour rien, et sa prise en main d’un marteau capable de faire tomber la foudre, n’a absolument rien à voir avec le hasard. On découvrira ainsi à l’issue du premier tome qu’Odin, lassé des disputes de ses deux fils, Thor et Loki, les avait obligé à se réincarner en mortels jusqu’à ce qu’ils prennent conscience de leur rôle et de leurs actes.
Le dernier chant des dieux
La bonne idée d’Olivier Peru c’est de transformer cette prise de conscience attendue, en révélation de la cruauté des dieux, des manipulations d’Odin (le sort réservé aux elfes n’est effectivement pas d’une grande élégance) et en étincelle menant à une rébellion totale contre Asgard et à la chute annoncée des immortels. Une épopée d’envergure peuplées de combattants et de créatures surpuissantes, jalonnée de batailles destructrices et de victimes taillées en pièces, où les pièces du puzzle imaginé par le dieu du mensonge (et oui…) se mettent peu à peu en place, du monde des hommes à celui des morts, et non sans conséquences. Un certain souffle emporte le lecteur dans ces trames tarabiscotés, ces destins malmenées et cette grande tragédie familiale qui fracasse tout sur son passage, même si finalement tout cela à déjà été mainte fois rejoué et mise en image avec plus de fougue et d’originalité. La personnalité farouche et l’abnégation de ce Thor coincé dans le corps d’un nain, se découvrant une âme plus « mortelle » et « humaine » donne par contre effectivement une note plus terrienne, plus proche du sol (désolé), à ce poème épique qui à coté de cela peut s’en donner à cœur joie dans la démesure et les batailles désinhibées à échelles très variables. Pour ceux qui ont déjà ouvert un tome de Les Maitres inquisiteurs ou Merlin le prophète, il est évident que c’est là le terrain de jeu préféré de Pierre-Denis Goux, multipliant les planches bardées de soldats de toutes sortes, d’armes et d’armures cabossés, de champs de batailles martelés par les intempéries et les pas de créatures dantesques quand ce n’est pas le vol d’un dragon ou d’une troupe de valkyries.
On n’est pas là pour chanter la gloire perdue des grands guerriers mais pour la vivre. Toutes les illustrations ne sont pas toujours d’une grande finesse et les teintes terreuses ne mettent pas toujours en valeur la beauté champêtre des lieux… mais qui était venu pour lire de la poésie ?