LES ENFANTS DE LA MER T.1
海獣の子供 – Japon – 2007
Genre : Fantastique
Scénariste : Daisuke Igarashi
Illustrateur : Daisuke Igarashi
Éditeur : Delcourt
Pages : 336 pages
Date de Sortie : 19 octobre 2022
LE PITCH
Ruka, une collégienne éprise de liberté, vit au bord de la mer. Pendant les vacances d’été, elle fait la connaissance de deux garçons, Umi et Sora, qui ont été élevés par des Dugongs, des mammifères marins menacés de disparition. Quand ils nagent dans la mer, ils donnent l’impression de voler et parfois se mettent à briller. Qui sont réellement ces deux garçons fascinants ?
La tête sous l’eau
Réapparu à la surface grâce au film d’animation d’Ayamu Watanabe sorti en 2019 (en France et partout ailleurs), le manga Les Enfants de la mer se dote enfin d’une nouvelle édition chez Delcourt, celle de Sarbacane étant épuisée depuis longtemps.
C’est que si son manga a durablement marqué ceux qui l’avait découvert il y a maintenant quinze ans, Daisuke Igarashi reste un auteur relativement rare et dont surtout le succès, toujours d’estime, n’a jamais vraiment atteint le grand public. Ses œuvres d’ailleurs comme Sorcière ou Saru mêle toujours des univers propices aux mangas populaires mais traités avec une forte grille ésotérique et mystique pouvant se révéler déstabilisante et complexe. Et c’est clairement le cas avec Les Enfants de la mer dont même l’adaptation animée n’a pu contourner (volontairement) les abords les plus étranges et nébuleux. Une forme très particulière de poésie qui pousse constamment le lecteur à s’interroger sur les nombreux mystères évoqués par les personnages et les situations, sur les visions intensément graphiques qui composent des pages d’une grande beauté, mais dont finalement le sens réel n’aura de cesse de nous échapper et ce jusqu’au dernières pages du dernier tome. Peut-être ne faut-il pas se laisser encombrer par quelques considérations cosmologiques abscons et uniquement se concentrer sur l’essentiel : la fascination pour les océans et la vie qui l’habite.
Bercé par le chant des baleines
Une fable écologique parfaitement réussie lorsqu’elle se recentre sur le destin de trois enfants, Ruka la jeune fille témoin et attachante, et les deux fameux « enfants de la mer » Umi et Sora, découverts bébés au sein d’une famille de dugongs. Des gamins gardant une connexion profonde avec le monde du grand silence, et s’inquiétant eux aussi des multiples disparitions de créatures marines dans de curieux flots lumineux. L’essentiel du premier volume repose sur cette rencontre estivale et la mise en place de la trame du récit, avec un rythme façonné par un quotidien encore à peine bousculé et de longues phases contemplatives scrutant de magnifiques bords de mer, interceptant la chute de deux gigantesques étoiles filantes, ou plongeant plus généreusement dans le grand bleu. Cultivant déjà un style graphique fragile, délicat, légèrement tremblotant mais constamment sensible, Daisuke Igarashi expose totalement son art dans les nombreuses et spectaculaires scènes sous-marines. La reproduction minutieuse de la faune et la flore, la sensation constante de mouvement de ses planches, les effets de lumières, de scintillement et l’incarnation physique des enfants au milieu d’eux font naitre des tableaux somptueux, magiques et inoubliables. C’est le regard plongé dans cette opulence graphique, dans ces petites merveilles picturales qu’on se dit qu’effectivement Les Enfants de la mer n’a pas besoin de plus de discours pour célébrer ce paradis du vivant et souligner son rôle essentiel dans l’équilibre écologique. Superbe.