LE TROISIÈME ŒIL ACTE 1 : LA VILLE LUMIÈRE
France – 2021
Genre : Fantastique
Scénariste : Olivier Ledroit
Illustrateur : Olivier Ledroit
Editeur : Glénat
Pages : 112 pages
Date de Sortie : 12 mai 2021
LE PITCH
Paris, de nos jours. Mickaël a le don de synesthésie : il est capable de voir les sons. Son cerveau interprète la musique, il la matérialise sous ses yeux, et les notes et les vibrations prennent ainsi la forme de couleurs et de figures géométriques. Après une soirée de trip pendant laquelle il s’amuse à repousser les limites de sa perception à l’aide de THC, il ouvre par hasard la porte d’un nouvel état de conscience. Son troisième œil s’est révélé.
Ouvre les yeux
Nouveau voyage signé Olivier Ledroit, Le Troisième œil ouvre les perceptions du lecteur vers d’autres mondes, proches de nous et pourtant si étranges. Tel un shaman, l’artiste transmet son savoir et invite à l’abandon.
Artiste apparu dans les années 90 et ayant très rapidement connu le succès grâce à la saga Les Chroniques de Lune Noire, Olivier Ledroit a immédiatement impressionné par son traitement graphique percutant, très inspiré par les comics mais aussi par la génération Métal Hurlant, travaillant ses planches directement en couleurs. Une technique qui lui permet ainsi des mélanges de teintes et de textures étonnantes. Mais ce style très marqué, reconnaissable entre mille, étaient le plus souvent au service d’univers sombres et torturés, en particulier Requiem et ses batailles infernales chaotiques et décadentes. Une ampleur visuelle, une liberté de construction et un certain gigantisme qui prend ici le contre-pied de ses créations les plus célèbres pour s’engouffrer vers la lumière et un grand tout bien plus accueillant. Construit comme un tome inaugural, initiatique, La Ville lumière introduit donc Mickaël dont le don de synesthésie (un interversion son et images normalement, très involontaire) et quelques substances évaporées vont lui permettre d’entrevoir, puis de s’engouffrer, dans une perception plus complète du monde qui l’entoure.
Capitale de l’univers
Quelques fluides lumineux, les auras de ses contemporains, la performance d’une musicienne qui devient un véritable son et lumière et enfin des milliers d’ectoplasmes, de créatures fluctuantes géantes, des réseaux étincelants… Tout cela partage, sans que l’on s’en rende compte, notre propre monde. Guidé par deux mentors, dont un certain Phillipe (Druillet), Mickaël prend contrôle de son troisième œil et absorbe, investit la vérité cosmique, le grand tout. Un grand trip mystique qui établit en une centaine de pages ses propres règles et sa logique, et reste finalement assez distant avec les éléments plus polar / fantastique entrevue dans une introduction plus brutale. Mais ce qui est fascinant avec Olivier Ledroit, et peut-être ici plus que jamais, est l’importance de son dessin sur l’histoire proprement dit. Devant les révélations visuelles de ses planches, les couleurs particulièrement vibrantes, la splendeur des transparences et la vigueur des effets de lumières, Le Troisième Œil se passerait presque de textes, transporté par les flamboiements éclectiques, les superpositions liquides, se permettant même de reconstituer en quelques planches l’architecture du cosmos. Au passage rarement les bâtiments historiques de Paris, ses rues et souterrains n’auront été aussi généreusement et brillamment célébrés dans une BD.
Un sacré délire visuel, un album presque expérimental, mais qui pose parfaitement un univers parallèle qui ne devrait que s’étoffer dans les deux prochains tomes du triptyque : Le Veilleur du crépuscule et La Religion sans nom.