LA MALÉDICTION DE SPAWN VOLUME 1
The Curse of Spawn #1-11 – États-Unis – 1996 / 1997
Genre : Fantastique, Horreur, Action
Dessinateur : Dwayne Turner
Scénariste : Alan McElroy
Nombre de pages : 272 pages
Éditeur : Delcourt
Date de sortie : 23 août 2023
LE PITCH
L’univers de Spawn ne se limite pas à une succession d’arcs narratifs, mais est riche de nombreux personnages secondaires ou d’incarnations du suppôt de l’Enfer. Cette série – écrite par l’auteur du film Spawn, Allen McElroy, et dessinée principalement par Dwayne Turner – passe en revue divers personnages créés par Todd McFarlane.
Les écorchés
Delcourt exhume en intégrale (et c’est une exclusivité) la série dérivée The Curse of Spawn publiée en 1998 dans les Spawn Hors-Série de feu Semic. Une publication qui permettait à Alan McElroy (scénariste du film maudit) d’explorer plus avant l’univers de McFarlane, autant dans les arrière-cours poisseuses que dans le futur ou les dimensions célestes. Vaste et massif.
Alors donc que McFarlane se concentrait essentiellement sur la destinée de son Al Simmons, il offrit à son camarade Alan McElroy, scénariste cinéma et TV à qui ont doit Halloween 4, Rapid Fire ou Wrong Turn mais aussi la version live et la version animée de Spawn, l’opportunité de fouiller dans la mythologie et la galerie de personnages en expansion, pour y délivrer des récits originaux et pourquoi pas totalement inédits. Même si forcément l’auteur et son artiste Dwayne Turner (The Authority, Cage, Wolverine) restent bien ancrés dans les codes imposés par le créateur de la série (textes épais et sentencieux, planches sur-découpées et recouverts de détails graphiques…), ils démarrent d’entrée de jeu par un bond de quelques centaines d’années dans un futur ravagé par les forces infernales. L’intro de Terminator 2 en pire, où les démons et créatures les plus grotesques, croisements de chairs en putréfactions et d’extensions biomécaniques, dévorent et ravagent les dernières traces d’humanité. Dans ce décors ultra sombre et ultra glauque, apparait un nouveau Spawn qui a son tour va tenter de s’extraire de la malédiction et de sauver les êtres qui lui sont chers. La ligne droite est classique, mais ce sont les nombreux détails scabreux et déviants imaginés pour l’occasion qui fascinent entre les multiples bestioles qui hantent les lieux, les masses suppôts de l’enfer aux look impitoyables et bataille homérique et biblique dans une démesure sidérante que n’aurait pas renié Clive Barker pour ses Hellraiser.
Visions de l’enfer
Une certaine idée de la chair bafouée, rapiécée et transformée que l’on retrouve dans le second récit de l’album consacré à la naissance d’un nouvel ange vengeur : Suture. Une jeune femme martyrisée et violée qui va renaitre telle The Crow et poursuivre autant ses bourreaux que les nombreux serial killer (tous franchement tristement mémorables) qui enchainent massacre sur massacre et meurtre sur meurtre. Là encore une atmosphère particulièrement réussie, Seven en plus scabreux encore, puant toujours autant la charogne, le mal et le vice, que McElroy construit comme une difficile enquête du fameux duo Sam & Twitch, alors fraichement devenus détectives privés. Si ce récit se déroule en parallèle de la série principale Spawn et que le premier imaginait un futur apocalyptique possible plus lointain, les deux partagent une même vision sombre et terrible de l’humanité, sacrifiée, faible et perverse. Il est bien dommage d’ailleurs que ces personnages n’aient finalement jamais vraiment été intégrés à la série centrale. Angela cependant, protagoniste de la troisième partie, était déjà bien entendu une figure centrale de celui-ci, et même un feuilleton éditorial puisque l’enjeu d’une longue bataille légale entre McFarlane et Neil Gaiman. Un peu moins à son aise ici, le scénariste tente de délivrer à la fois les origines du personnages (contraction de plusieurs âmes de martyrs) et d’étendre sa dimension en lui creusant sa relation avec le mystérieux Surge. Pas forcément le segment le plus palpitant malgré l’apparition d’Al Simmons et une prestation toujours grandiloquente de Dwayne Turner.
Prévue en trois épais volumes La Malédiction de Spawn reste l’une des séries les plus sombres et malsaines de l’univers de Todd McFarlane et si les arcs narratifs ne sont pas tous égaux (ici les deux premiers dépassent aisément un troisième plus laborieux) la démesure constante des récits et de leurs explorations graphiques gore typiques des 90’s, en font une lourde pierre à l’édifice Spawn.