LA MAGIE D’OZ T.1&2
Grimm Fairy Tales presents Oz #1-6 + Grimm Fairy Tales presents Warlord of Oz #1-6 – Etats-Unis – 2013, 2014
Genre : Fantastique, Aventure
Dessinateur : Rolando Di Sessa, Miguel Mendonca
Scénariste : Joe Brusha, Jeff Massey
Nombre de pages : 192 et 176 pages
Éditeur : Graph Zeppelin
Date de sortie : 21 novembre 2023
LE PITCH
Emportée par une tornade, Dorothée Glade, jeune paysanne du Kansas, retrouve ses esprits dans un monde étrange du nom d’Oz. Prise au piège et chassée par les armées de la terrible Sorcière de l’Est déchue, Dorothée trouve des alliés en Glinda, la bonne sorcière d’Oz et Thorne, le lion. Ensemble, ils se lancent dans la quête du sceptre véridien, un arte-fact qui peut à la fois libérer Oz de la tyrannie de la méchante sorcière et renvoyer Dorothée chez elle. Mais leur chemin sera semé d’embûches et de rencontres extravagantes. Arriveront-ils à sauver le monde de l’obscurité qui menace ?
We’re Off To See The Wizard
Après un long voyage du coté de Wonderland, d’Alice et ses poumonées descendantes, Graph Zeppelin se tourne désormais vers la relecture par Zenetscope du Magicien d’Oz. Une réinterprétation plus sombre, plus adulte, plus sexy mais qui peine à imposer sa marque.
Vaste programme éditorial très « concept », Grimm Fairy Tales presents, n’est pas simplement une suite de one-shot et de mini-séries revenant avec la délicatesse d’un sanglier en rut dans les grands textes de contes de fées mondialement connus, mais aussi un univers que l’on découvre progressivement partagé (et oui) et une authentique marque de fabrique. Une idée qui tient assez souvent, il faut bien l’avouer, du simple argument commercial pour déverser sur les amateurs de multiples couvertures variants et des recueils d’illustrations auréolés (comme ici) de la présence d’artistes comme J. Scott Campbell, David Finch, Richard Ortiz ou Mike Lilly. Tout est une question d’apparence, encore une fois généreusement mise en avant ici par la plastique improbable de la nouvelle Dorothy Gale. Adieux la pré-adolescente encore gamine, voici la jeune femme en devenir, délaissant rapidement la jupette pour une tenue de guerrière / magicienne ultra sexy. Adieux le monde de féeries, le voyage joyeux au travers d’un monde coloré et fantaisiste, effacés au profit d’une aventure bien plus musclée aux airs de quête d’Heroic Fantasy. Déjà à l’origine de Wonderland justement, Joe Brusha fait tout de même l’effort dans le premier album (soit la première mini-série de six fascicules) de coller aux grandes lignes du roman de L. Frank Baum (et du mythique film de Victor Flemming).
Où est passée la route de brique jaune ?
Mais les accents épiques voulus, la vaste trame de magie noire annonçant le retour d’une terrible maitresse du mal, laissent clairement place dans le second volume rédigé par le collègue Jeff Massey (dont c’est là le seul haut fait) à un simple récit de conquêtes, de trahisons et de révélations sanglantes qui n’a plus grand-chose à voir avec le matériau originel. Amusant de transformer Toto en loup géant, le lion peureux en homme-fauve dissimulant derrière sa hargne sa honte d’avoir abandonné sa tribu, de faire du pauvre homme de fer une masse aux allures de cyborg hanté par un amour interdit ou de l’épouvantail une création inquiétante de la vilaine sorcière, mais l’écriture n’ira jamais vraiment chercher plus loin, oubliant d’ailleurs au passage de donner une véritable étoffe à la pauvre Dorothée. Rapidement projetée nouvelle sauveuse du monde, apprenant à combattre et à manier la magie en deux pages, découvrant (ô quelle surprise) que ses origines ne sont pas si mystérieuses que cela, elle semble là encore sortie d’un tout autre bouquin que Le Magicien d’Oz. A force de courir derrière Le Seigneur des anneaux et Game of Thrones, La Magie d’Oz oublie clairement de jouer d’un terreau pourtant plus que fertile et surtout d’en préserver autre chose que de simples clin d’œil au milieu d’un feuilleton qui pour le coup ressemble à beaucoup d’autres. Anecdotique donc, la saga dont le troisième tome est annoncé pour janvier prochain, souffre qui plus est, comme beaucoup de créations Zenetrope, de planches très inégales, pas franchement délicates et colorisées lourdement en numérique. Assez catastrophique d’ailleurs, Rolando Di Sessa laisse heureusement la place par la suite à un beaucoup plus sérieux Miguel Mendonca (Justice League : Last Ride).
Clairement moins accrocheur que le plus inquiétant Wonderland, La Magie d’Oz ne sera pas forcément très apprécié par les amateurs des romans initiaux, mais pourra au moins attirer les aficionados de la gamme mise en place par Zenetrope, surtout qu’une fois encore les volumes édités par Graph Zeppelin (couvertures en dure, grosses paginations, grosses galeries d’illustrations…) en font de beaux objets.