A peine achevée donc, la trilogie Thrace laisse place au premier tome d’un nouveau diptyque : La Duelliste. Pas sûr cependant que cette fois-ci la branche adulte de Graph Zeppelin n’en propose une édition plus corsée, tant l’érotisme nous semble ici nettement plus léger, voir absent. L’artiste Francesco Trifogli, connu sous le pseudonyme de Trif quand il s’agit de ses penchants plus polissons, semble peu à peu s’éloigner tranquillement de cette partie de carrière. Cela ne lui empêche pas d’apporter encore et toujours ce trait délicat, fin et élégant, et d’offrir des personnages, en particulier féminin, des plus agréables à l’œil. De la même façon les décors sont toujours excellemment brossés, sobres mais historiquement convaincants, avec un petit quelque chose d’une reconstitution théâtrale ou d’un grand classique de cape et d’épée. On pense forcément à quelques adaptations cinématographiques européennes, avec les jolis costumes, les couleurs relativement douces et ces fameux duels à l’épée, qui ajoutent à l’ensemble une énergie et une fougue spectaculaires.

La passata sotto

Une petite forme d’hommage, pour un récit qui imagine la quête de vengeance de Françoise, dont le père fut tué par un noble lors d’un duel, et qui convainc, déguisée en homme, un vieux maitre d’armes, tombé dans la bouteille et la peinture, de la former aux duels. L’occasion pour elle au passage de se lier d’amitié avec un autre apprentis, aussi beau que bon camarade (attention, romance « impossible » à prévoir), et découvrir la vie trépidante du grand Paris sous le règne de Louis XIV. Une trame bien plus classique que le récent film Une Affaire d’honneur de Vincent Perez avec lequel il partage quelques thèmes et motifs, mais une histoire feuilletonnesque tout de même parfaitement brossée et efficace. On ne s’y ennuie pas une seconde, on s’étonne à peine des nombreux hasards du scénario, et on se laisse emporter docilement par cette aventure presque adolescente où viennent tout de même s’ajouter la description d’une noblesse intouchable, une condition féminine bien entendu très limitée et quelques petites allusions aux prémisses révolutionnaires. L’Histoire proprement dite sert véritablement de toile de fond plutôt que d’argument premier, mais on note tout de même un véritable soin dans l’atmosphère générale, et on apprécie fortement les efforts des traducteurs (à priori l’album a d’abord été écrit en italien) pour retrouver le langage et les expressions de l’époque.

Plein de petites qualités qui donne à ce premier tome de La Duelliste un coté bien sympathique et tout à fait divertissant.