JOKER : L’HOMME QUI CESSA DE RIRE
Joker The Man Who Stopped Laughing #1-12 + Knight Terrors : Joker #1-29 – Etats-Unis – 2022 / 2024
Genre : Super-héros
Dessinateurs : Carmine Di Giandomenico, Francesco Francavilla, Will Robson, Stefano Raffaele
Scénaristes : Matthew Rosenberg, Ryan Cady
Nombre de pages : 488 pages
Éditeur : Urban Comics
Date de sortie : 30 août 2024
LE PITCH
Quand le chat n’est pas là, les souris dansent… L’absence du Joker à Gotham a laissé le terrain libre à ses plus fidèles rivaux, qui n’ont pas tardé à se partager le pouvoir sur les bas-fonds de la ville. Double-face, le Pingouin, le Sphinx ou encore Black Mask, aucun n’était préparé au retour du Prince Clown du Crime, et encore moins à sa vendetta. S’il ne peut pas reprendre Gotham, il prendra le contrôle des États-Unis !
Son meilleur ennemi
Il me reste encore un peu de Joker ? Je vous le mets quand même ? DC Comics n’en finit plus de multiplier les évènements autour de son célèbre bouffon, entre les séries au long court, les mini-séries concept et les expérimentations hors canon. Quitte même à le dédoubler dans la maxi-série en 12 chapitres, L’Homme qui cessa de rire où deux Joker se livrent une guerre dévastatrice pour rester les feux des projecteurs.
L’idée démultiplier les incarnations du Joker n’est pas vraiment nouvelle. Rien qu’en 2020 avec le peu convaincant Trois Jokers Geoff Johns avait essayé de nous faire croire à un triumvirat explicitant les variations de folies et les changements de style du personnage au cours des années. Dans L’Homme qui cessa de rire pas de grande entourloupe ou de relecture de la continuité, le second Joker apparait dès les premières pages. Il est même le narrateur du premier chapitre. Un Joker bis (où est-ce le vrai ?) laissé pour mort par l’officiel et qui va profiter des désirs de grandeurs de ce dernier, en marche pour tenter de conquérir les rues ensoleillées de Los Angeles, pour reprendre sa place au sein du monde criminelle de Gotham. Deux Jokers pour le prix d’un, tous deux aussi tarés et dangereux que l’autre, qui à force de se narguer vont forcément entrainer toute la ville dans leur duel chaotique et dévastateur. La qualité du récit de Matthew Rosenberg (What’s The Furthest Place From Here ?, DC vs Vampires, Task Force Z…) est justement de ne jamais vouloir réinventer la poudre, de donner sa relecture du personnage ou d’en bouleverser la trajectoire.
Les blagues les plus courtes sont souvent les moins longues
Il s’amuse surtout, en multipliant par deux les massacres, les blagues pourries, les jets d’acides et les hommes de mains sacrifiés, à appuyer sur les aspects les plus irrationnels du personnage, schizophrène sadique, comique raté, assassin sans âme et nihiliste accompli, qui semble s’amuser de tout, même de sa propre mort. Et ce souvent sous le regard médusé d’homologues costumés comme Mister Freeze, Killer Croc, Le Chapelier fou, certes inquiétants et conscients de la dangerosité du (des) bonhomme, mais tout aussi lassés de ses pitreries et de ses obsessions criminelles. Il faut donc aborder L’Homme qui cessa de rire essentiellement comme un gros défouloir où le Joker casse tout ce qu’il touche, même son reflet, s’achevant comme il se doit dans un final quasi apocalyptique et une petite pirouette violente, mais assez prévisible. Avec un illustrateur comme l’italien Carmine Di Giandomenico (Orphans, The Flash, X-Factor…) tout ne peut aller que très vite, constamment emporté par le mouvement, l’action et la dernière lubie des bonhommes, baignant dans un flot de couleurs flashy et un trait aussi vif et énergique que le découpage. Cela n’empêche pas le scénariste de montrer une compréhension et une connaissance très convaincante du Joker, de disséminer des dialogues souvent aussi drôles qu’acérés, avec tout de même comme bémol l’absence totale du Batman, remplacé ici par Red Hood et quelques seconds couteaux comme Manhunter, pas forcément à la hauteur de l’amplitude de la déflagration.
A noter aussi dans l’imposant volume intégral proposé par Urban Comics la présence des mini épisodes fill-in, version trash et parodiques du dessin animé des 90’s illustrés pour la plupart par le talentueux Francesco Francavilla, cachant derrière la farce et la quête romantique du Joker des indices sur l’identité du double. On y trouve aussi en fin de volume les deux épisodes liés à l’event Night Terror. Pas indispensable, mais l’occasion de découvrir que le pire cauchemar du Joker est de devenir un employé modèle de Wayne Entreprise cachant son costume de Batman (ou plutôt un cadavre pouvant être porté comme un vêtement) dans son placard ne manque pas de piquant, surtout quand c’est dessiné par Stefano Raffaele.